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PLATONISME DES PÈRES. LE PROBLÈME
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Talion, Oral. adi>. Grsecos, 10, t'61d., col. 184 B ; Théophile d’Antioche, Ad AutoL, ii, 12. ibid., col. loti") H : pseudo-Justin, Cohort. ad Grsecos, 1 1. // » '<L. col. 268 C ; Clément, Strom., V, xiv. t. ix. col. 205 A ; Eusèbe, l’rup. eoang., t. X, passim. t. xxi. col. 765 sq.

3. Los philosophes païens, se plaçant sur le même terrain, soutenaient la thèse contraire. a Ils ont même use prétendre que toutes les pensées, qu’ils sont obligés d’admirer et de louer dans L'Évangile, Notre-Seigneur les a puisées dans les livres de Platon, puisqu’il n’est pas niable que Platon a existé bien avant l’avènement humain du Seigneur. > S. Augustin, De doctr. christ., II. xxviii, 43, P. L.. t. xxxiv. col. 56. Cëlse était de ces audacieux : il affirmait que les enseignements de Jésus, même ceux sur la richesse et l’humilité, et en général tout ce que disent les chrétiens, avait été dit et bien mieux, par le fondateur de l’Académie ; ils y ont seulement ajouté, assurait-il. beaucoup d’absurdités ; par exemple, quand ils parlent de résurrection, c’est qu’ils n’ont pas compris ce que les Dialogues enseignent au sujet de la métensomatose. Cf. Origène, Contra Cels.., lxv ; VI, i-xxiii : VII, xxviii-xxxii, xi. il. xliii. LIX-LXI, P. G., t. xi. col. 1288 C sq., 1460 B sq.. 1480 D sq., 1504 C sq..Malgré les réfutations d’Origène, Celse eut des imitateurs ; il y en avait encore au temps de saint Ambroise. Voir S, Augustin, Epist., xxxi. 8, P. L.. t. xxxiii, col. 125.

1. Ainsi, de part et d’autre, on se fonde sur quelques analogies, qu’on exagère, pour se renvoyer l’accusation de plagiat. Il y a ressemblance, donc quelqu’un a copié. Pour les uns, c’est Platon : pour les autres ce sont les évangélistes, ou Jésus-Christ lui-même. Il faut tenir compte de cette mentalité, quand on voit dans les ouvrages chrétiens des iie et iiie siècles des lextes platoniciens invoqués presque indifféremment avec ceux de l'Écriture. Ce serait choquant, si l’on ne savait que, pour ces auteurs, Platon avait emprunté ses meilleures idées à la Bible.

5. De cet accord, on donnait aussi d’autres explications. Justin y voyait volontiers une inspiration du Logos, source de toute vérité, qui a pu parler même aux Crées, mais pour les préparer à la vérité intégrale, que possède seul le christianisme. Et Eusèbe, Prsep. f(wi<7..I.XI, c. viii, P. G., t. xxi, col. 868 B, après avoir relevé que Platon parle des êtres immatériels comme Moïse et les prophètes, note qu’il a pu y parvenir en scrutant la nature des choses. Saint Augustin recourt à l’identité de nature chez tous les hommes, que l’observation du monde et d’eux-mêmes conduit à une certaine connaissance commune de Dieu. Si Platon parle comme l'Écriture de la formation du inonde, dit-il encore, c’est qu’il l’a lii, ou bien il l’a appris de ceux qui l’avaient lii, ou bien, grâce à l’extrême pénétration de son esprit, il est arrivé à connaître les mystères de Dieu per ea quw facta sunt , ou bien ceux qui les avaient connus de cette manière les lui ont enseignés. De civ. Dei, XI, xxi, P. L., t. xli, col. 335. Cependant, même lorsqu’il eut reconnu l’impossibilité d’une, rencontre en Egypte de Platon et de Jérémie, Augustin retint encore comme probable l’hypothèse que Platon avait connu les Livres saints. De civ. Dei, VIII, xi, t. xi.i, col. 236 ; Retract., I. U.c. iv, 2, t. xxxii, col. 632. Sur la thèse du plagiat, demeurée longtemps en faveur auprès des érudits qui dépendent de la Réforme et auprès de quelques autres, comme Huet, Thomassin. voir Pinard de La Boullaye, L'étude comparée des religions. 3 éd.. 1029. p. 177 sq.

2° L’Académie de Florence. Les platoniciens de (.ambridge. Le platonisme dévoilé. Réactions des théologiens catholiques. — 1. Le Moyen Age, lui aussi, it quelquefois en certains philosophes anciens, en Platon surtout, des précurseurs de l'Évangile. Il s’inquiétait de leur salut et, sur la foi d’une légende

rapportée par Anastase le Simule, quelques-uns pensaient alors que Platon fut le premier à croire a la prédication du Christ dans les enfers. Cf. Capéran. Le problème du.va/ » / des infidèles, 2° éd., 1012, p. 162. 211. L'école de Chartres, Abélard trouvaient chez lui la Trinité. Saint Thomas parle encore de son voyage en Egypte et de ses plagiats. In / ul " Sent., dist. III, q. I, a. 4, ad lum. Platon était en ce temps-là fort mal connu.

C’est après la prise de Constantinople par les Turcs, dans l’entourage des Grecs établis en Italie, puis grâce à des traductions comme celles de Leonardo Bruni, qu’on recommence en Occident à étudier et à admirer « Platon », nom vénéré, sous lequel s’abritaient des doctrines, platoniciennes ou néoplatoniciennes, entre lesquelles on ne faisait guère de distinctions. L’engouement alla fort loin.

Au temps du concile de Florence pour l’union des Églises, le Byzantin Georges Gémiste Pléthon (13551450) est d’avis qu’il n’y a qu’une seule religion véritable, et ce n’est ni celle des chrétiens, ni celle des musulmans, mais le néoplatonisme, qui résume toutes les acquisitions faites au cours des siècles en matière de philosophie religieuse par Hermès Trismégiste, Zoroastre, Orphée, Pythagore, Platon, Plotin. Et parce qu’Aristote s’est mis en dehors de cette tradition, il le déteste. Ce retour au paganisme eût pu compromettre gravement la cause platonicienne. Voir l’art. Pléthon.

Bessarion (1380-1472), qui avait été disciple de Gémiste, se montra plus orthodoxe et plus équitable que son maître. S’il écrit pour défendre Platon contre Georges de Trébizonde (In calumniatorcm Plalonis libri IV, éd. Mohler, Paderborn, 1027), il sait aussi rendre justice à Aristote : Colo et veneror Aristotelem, amo’Platonem. Il aime Platon comme le païen qui s’est le plus approché de la vérité révélée, mais en reconnaissant qu’il s’est trompé en des questions très importantes et ne saurait remplacer l'Évangile. Cette modération assure au platonisme droit de cité en Occident et rend possible l’teuvre de Marsile Ficin (1433-1400). La traduction latine de Platon paraît en 1483-1484.

L’influence de Ficin et de l’Académie de Florence. « la famille de Platon » comme on aimait à s’y appeler, fut tellement rayonnante qu’on a pu dater le commencement de la Benaissance en France du jour où y fut connu le Commentaire du « Banquet ». Le thème qui y est développé avec complaisance, la tendance de l’homme vers Dieu et sa divinisation par l’amour, fut repris à l’envi — et déformé — par les artistes et les poètes, dans l’Italie du XVIe siècle. En général, l’Académie accentua le côté, religieux du néoplatonisme. Contre des adversaires, comme Pomponace, le professeur de Padoue (1488-1512), qui invoquaient Aristote, Alexandre d’Aphrodise et les commentateurs averroïstes pour nier la spiritualité et la survivance de l'âme, elle insista sur les enseignements platoniciens au sujet de Dieu, de l’immortalité, de la récompense des justes, du châtiment des pécheurs, et sans scrupule, comme jadis Michel Psellos faisait à Byzance, les présenta comme tout à fait d’accord avec la vérité chrétienne, cf. Marsile Ficin, Theologia platonica de immortalitate animorum. On était toujours persuadé que Xuménius, Philon, Plotin, Jamblique et Proclus, pour interpréter Platon, avaient utilisé Jean, Paul, Hiérothée ou Denvs l’Aréopagite. Sur la Benaissance platonicienne, voir Jac. Bruckerius, Historia crilica philosophie, Leipzig, 1743, period. III, pars I, I. L c. ii : De restauraloribus philosophiez platonicse, I. iv, p. 41-61 ; Vacherot, Histoire critique de /' École d' Alexandrie, t. iii, p. 178 sq. ; Ch. Huit, Le platonisme pendant la Renaissance, dans Annales de philosophie chrétienne t. xxxii. 1805. p. 376 sq., ici l’article Ficin. et celui