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PLATONISME. EVOLUTION DE LA DOLTHINE


TrEpiaycoy/)’>' y /J& ^b crû^uxTOÇ. La ressemblance à Dieu, fin de la vie morale, ôfxotoxriç 9ecp xxxà to Sovceràv (c. xxviii), n’est pourtant point représentée comme une extase ; autant qu’on en peut juger, Albinus était moins porté au mysticisme que Plutarquc et Apulée.

c) "Vers la fin du 11e siècle, précédant d’une génération les débuts du didascaléc chrétien d’Alexandrie, Maxime de Tijr, le conférencier-voyageur, dans les 41 discours qui nous restent de lui, et Numénius, disciple de Platon autant que de Pythagore, dans les fragments qu’Eusèbe ou Proclus ont conservés, sont aussi des témoins du même courant d’idées. Selon Maxime, la croyance commune, à travers l’extrême confusion des doctrines, est qu’il y a un Dieu suprême, roi et père de.toutes choses, et une multitude de divinités qui régnent avec lui. Disc., xi, 5 : tîç ô ôeôç xaxà nxdrra>va. « Dieu demeure là où il est, quand il gouverne le ciel… ; mais il y a certaines natures immortelles, dieux subalternes… moins puissants que Dieu, mais plus puissants que l’homme ; … ce sont eux qui apparaissent aux hommes… et leur donnent tout ce que ceux-ci demandent à Dieu. »

L’âme a pourtant le désir de voir ce Dieu lointain, et elle le peut « par sa partie la plus belle, la plus pure, la plus intellectuelle, la plus légère, la plus vénérable », somme toute, la plus semblable à Dieu ; elle peut le voir à cause de la ressemblance qu’elle a avec lui, Si’ô[xoiÔTy)Ta, Sià auyyéveiav, oXov àôpôov àOpôa ouvéasi 7rapayiv6(j.evov. Disc., xi, 9. Mais, pour y arriver, la condition est toujours la même, elle doit « s’éloigner des choses d’ici-bas » ; elle doit « dépasser le ciel et les corps célestes », bien qu’ils soient de vrais enfants de Dieu, et monter plus haut « jusqu’à ce lieu véritable… où le souci de la chair ne trouble plus la vue ». Disc., xi, 10.

Quant à Numénius, il parle du premier Principe, replié sur lui-même éauTÛ auyyivôfzevoç (dans Eusèbe, Prsep. evang., XI, xviii, P. G., t. xxi, col. 893 A sq.), qui ne crée pas le monde mais seulement le Démiurge, créateur du monde ; qui est sans contact avec les hommes, le Démiurge seul en étant connu ; qui est seul œÙToayaOôv, le « Bon en soi », dont la bonté du Démiurge dérive. Ibid., XI, xxii, col. 905 C.

C’est dans ce milieu et cette atmosphère que se sont formées les premières hérésies. Les apologistes du ne siècle et les alexandrins du iiie se ressentent d’y avoir vécu.

2° Les traits distinctifs de ce « platonisme moyen ». — 1. Une opposition de plus en plus accusée, conformément à l’enseignement néopythagoricien, entre Dieu et le monde. Par une première transformation introduite dans le platonisme primitif, l’auteur de l’univers devient le lieu des Idées ; mais comme, par le fait même, il contracte une certaine multiplicité, il faut le dépasser pour atteindre la raison suprême des choses et, par de la les Idées, monter jusqu’à l’Un qui est aussi le Bien absolument transcendant.

2. Par suite, le rôle des intermédiaires devient de plus en plus important. Logoi, esprits, puissances, démons, de nature divine mais subordonnés entre eux, ils s’échelonnent, s’efîorçant de combler l’abîme, transmettant l’action divine jusqu’aux natures inférieures, et permettant aux hommes de remonter par degrés jusqu’à leur premier principe.

3. Une note religieuse et même mystique prédominante. L’assimilation à Dieu y est, comme chez Platon, le sommet de l’activité humaine ; mais cette assimilation est conçue, du moins par plusieurs, comme une absorption dans la divinité, accessible aux initiés, même dès cette vie, par un contact unifiant qui défie toutes les tentatives de la pensée conceptuelle ; c’est encore une conséquence de la transcendance divine telle qu’on la comprend.

Faut-il reconnaître là une influence de l’Orient ? On l’a prétendu. En tout cas, il n’est pas facile de mesurer cette influence, et c’est une chose remarquable que l’extase est décrite même par Philon le Juif avec des éléments tous empruntés à la tradition platonicienne, sans aucune allusion au prophétisme d’Israël. Cf. les textes de Philon cités par Ueberweg-Prœchter, Die Philosophie des Altertums, 12e édit., p. 377 sq.

4. Certaines thèses d’ordre psychologique et moral, en liaison avec la solution qu’on donne au problème de la destinée et dont on emprunte le principe à Platon : la nature de l’intelligence, la plus haute et la plus pure partie de l’âme, apparentée à Dieu, semblable à lui, et, par suite, capable de l’atteindre dans l’extase ; la nécessité d’une purification qui libère cette intelligence de toute servitude à l’égard du sensible ; d’où l’importance grandissante du détachement et de la préparation morale.

Dans l’une ou l’autre thèse de cette doctrine syncrétiste presque toutes les écoles antérieures pouvaient se reconnaître.

Sans parler de l’opposition du monde intelligible et du monde sensible qui est caractéristique de tout platonisme, l’Un, le plus haut principe et la source universelle des êtres, venait du néopythagorisme, qui peut se rattacher lui-même, sur ce point, à la dernière époque de la métaphysique de Platon ; les spéculations sur l’intelligence se retrouvent dans le péripatétisme ; l’âme du monde dans le Timée et chez les stoïciens ; les âmes particulières, fractions de l’âme totale, la métempsycose, la vie périodique du monde dans le pythagorisme.

Le stoïcisme platonisant, que les Diatribes avaient rendu populaire, fournissait les développements sur le Logos, la « sympathie » entre les diverses parties du monde, qui jouera un rôle important chez Piotin et chez Jamblique dans les théories sur la prière et la magie ; en morale, l’indifférence des biens extérieurs, l’impassibilité, le portrait du sage. Philon enseignait non seulement la transcendance divine (une transcendance qui s’allie à une certaine immanence, car Dieu pénètre intimement le monde), non seulement les intermédiaires et le Logos et les Idées dans le Logos (ce qu’on trouve aussi chez Atticus), mais la prédominance de la vie intérieure, le grand problème consistant à atteindre Dieu et à écarter les obstacles qui barrent la route ; il enseignait l’intelligence, partie principale de l’âme et image de Dieu, enfin l’extase accessible par le moyen de la purification et du renoncement.

3° Le « platonisme moyen » et les écrivains ecclésiastiques. — C’est à l’école de ce platonisme moyen que la plupart des écrivains ecclésiastiques ont, aux premiers siècles, appris la philosophie.

Lorsque Justin nous confie qu’en se mettant sous la conduite d’un platonicien, son secret espoir était de voir Dieu tout de suite, « car tel est le but de la philosophie de Platon », quand Clément loue Platon d’avoir reconnu que Dieu est le lieu des Idées, quand les apologistes ou les ; ilexandrins, appliquant au Fils la doctrine du Logos, le considèrent comme un intermédiaire quelque peu subordonné par lequel on peut s’élever jusqu’à la transcendance du Père, quand Clément et Origène parlent de cette partie de notre âme qui est proche parente de Dieu et capable de le contempler, quand Grégoire de Nysse décrit les étapes de l’ascension mystique dont le terme est l’extase, ce n’est pas sans quelque fondement de vérité qu’ils peuvent se recommander de Platon, car le germe de tout cela s’y trouve, et pourtant la véritable source de ce qu’ils enseignent (dans la mesure où ils dépendent de la philosophie) n’est point Platon, mais le platonisme intermédiaire dans lequel les grandes lignes