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PISTORIUS (JEAN) — PITIIOU (JEAN ET NICOLAS)


esprits mauvais. Sa thèse est ainsi formulée : « En’admettant même que l’Église catholique ait erré, il serait encore impossible « le se persuader que Dieu ait fait choix de Luther pour rétablir la véritable religion car, dans ses écrits, il se révèle, au delà de ce qu’on peut dire, comme un esprit charnel, un grossier personnage, un menteur impudent, un calomniateur éhonté, un méchant, un présomptueux, un orgueilleux, un impudique. » La grande force de Pistorius et ail qu’il connaissait à fond les œuvres de Luther. Quand il reprochait au « réformateur » ses « esprits « d’impudicité, de mensonge, de bouffonnerie grossière, il n’avait qu’à puiser dans les œuvres authentiques de Luther et à le citer textuellement. « Je consens volontiers à être puni, disait Pistorius, dans la préface de l’Analomia, si j’ai écrit une seule syllabe qui dénature sa pensée » ; 4° la Confession d’Augsbourg a continuellement varié. Mélanchthon a joué avec elle comme un chat avec une souris : « On trouve peu de luthériens, clercs ou laïques qui, toute leur vie, aient gardé leur première manière de comprendre la doctrine protestante. Des pays entiers, des villes et des villages ont changé de foi à différentes reprises. » Pistorius prouve par là que la Bible seule ne peut pas être un principe d’unité, qu’elle ne saurait remplacer l’autorité de l’Église, que les interprétations si diverses qu’elle engendre ne peuvent être toutes inspirées de l’Esprit-Saint. II est aisé de voir que les preuves m et iv ne sont que des variantes des preuves i et n ; 5° en regard de ces notes négatives de l’Église luthérienne, Pistorius montrait les marques positives de l’Église catholique : elle a été de tout temps visible, invariable, descendant en droite ligne des apôtres. L’Église catholique est donc la seule vraie, la seule capable de sauver les âmes et de vaincre toutes les hérésies.

A cette apologétique, qui ne manquait pas de force, mais dans laquelle les arguments ad hominem tenaient une grande place, une notion très importante faisait défaut, celle par laquelle Newman a renouvelé la discussion entre le catholicisme et les Églises soi-disant réformées : la notion de « vie évolutive ». Jusque-là, les adversaires ne faisaient que se reprocher mutuellement leurs variations, avec plus ou moins de bonheur et d’éloquence.

Ajoutons que Pistorius ne fut jamais sérieusement réfuté, mais qu’il fut, en revanche, accablé d’injures en des pamphlets qui s’intitulaient : Mus exenteratus contra Pistorium, de Guillaume Holder, 1593 ; Anti-Pistorius, de Balth. Mentzer, 1(500 ; Dœmonomania pistoriana, de Heilbrunner, 1601, etc. L’un des adversaires les plus acharnés de Pistorius fut Syriacus Spangenberg, dans Gegenbericht auf Dr Johann Pistorii sieben base Geister ( Réfutation des sept malins esprits de Pistorius).

I. Sources.

Les œuvres de Pistorius, qui ne se trouvent plus que dans les anciennes éditions, devenues très rares. Les ouvrages de ses adversaires.

II. Littérature.

K. Werner, Geschichle der apologctischen und polemischen Liter. der christ, Theol., 4 vol., Schaffhouse, 1865 ; A. Râss, Die Konuertiten seit der Reformation, t. ii, Fribourg, 1886 ; A. Kleinschmidt, Jakob III., Markgraf zu Baden und Hochbcrg, Francfort, 1875 ; J. Janssen, L’Allemagne et la Réforme, t. v, trad. Paris, Paris, 1899 ; H. Hurter, Nomenclator, 3e éd., t. iii, col. 167 ; Cari Mirbt, dans Prol. Realencyklopadie, t. xv, p. 418-421.

L. Cristiani.

    1. PITHOU##


PITHOU, famille célèbre de jurisconsultes et de magistrats du xvi c siècle, originaire de Normandie, mais établie en Champagne, a pour chef Pierre Pithou. Celui-ci eut quatre fils qui illustrèrent ce nom. Leurs écrits se rattachent à la théologie et à l’histoire et ont exercé une grande influence jusqu’à la fin du xviiie siècle.

    1. PIERRE PITHOU##


1. PIERRE PITHOU, le père (1496-1554), né en 1496, à Ervy, petite localité du bailliage de Troyes, fut un avocat distingué ; il passa au calvinisme vers 1554 et éleva ses enfants dans la religion réformée : d’un premier mariage, il eut deux fils jumeaux : Jean et Nicolas, et d’un second mariage naquirent Pierre et François, tous célèbres. Pierre Pithou mourut à Troyes en 1554.

Il conserva les Œuvres de Salvien, que son fils Pierre édita en 1579, et quarante-deux constitutions des empereurs Théodose, Valentinien, Majorien et Anthémius, dont Cujas parle avec éloges dans l’épître dédicatoire du Code Justinien (1566). Ces constitutions, qui tracent le tableau de l’État et des mœurs à l’époque des invasions, furent éditées en 1571 par ses fils, François et Pierre, sous le titre : Imp, Theodosii, Valentiniani, Majoriani et Anlhemii nouellæ. constitutiones XLII, in-4°, Paris, 1571, et in-fol., Bàle, 1576.

Grosley, Vie de P. Pithou avec quelques mémoires sur son père et sur ses frères, 2 vol. in-12, t. i, Paris, 1756, p. 1-45 ; Haag, I. « France protestante, t. viii, p. 250-251 ; Et. Georges, Les illustres Champenois, in-8°, Troyes, 1849, p. 6-7.

2 et 3. JEAN ET NICOLAS PITHOU, frères jumeaux,

issus du premier mariage de Pierre Pithou, naquirent à Troyes, en 1524, furent tous deux élevés dans la religion protestante et durent se réfugier à Genève. Nicolas était avocat comme son père et il mourut en 1598, à Troyes, durant un voyage qu’il avait fait dans sa ville natale. Jean était médecin et il mourut à Lausanne, le 18 février 1602. Un de leurs biographes a écrit : « Ils se ressemblent exactement par la taille et par la physionomie, mais ils se ressemblent encore davantage par une entière conformité de goût, d’esprit, de volonté ; une même âme semblait les animer. Ils habitèrent et vécurent ensemble ; tous leurs biens étaient en commun ; inséparables en France et dans les pays étrangers, dans leurs fréquentes transmigrations, dans leur séjour à la ville et à la campagne. » En qualité de fils aînés de Pierre Pithou, ils reçurent en héritage la très riche bibliothèque de leur père et conservèrent quelques travaux qui furent édités par leur frère plus jeune.

Jean Pithou a publié un Traité de la police et du gouvernement des républigues, in-8°, Lyon, 1550. Nicolas a publié des extraits des plus belles œuvres de saint Bernard, sous le titre : Thésaurus a monumentis D. Bcrnardi, Clarev. abbalis primi, non perfunctorie, sed onmi cura, diligentia et fide erutus, in-8°, Lyon, 1589, dédié à son frère. Les deux frères ont publié en collaboration, l’Institution du mariage chrétien, in-8°, Lyon, 1565. Ils célèbrent la grandeur et la dignité du mariage, mais l’esprit calviniste s’y manifeste en plusieurs endroits ; au c. iv du I. I er, on lit que la défense du mariage faite aux prêtres et autres est tyrannique et que le diable s’efforce, par là, d’obscurcir la dignité du mariage, et, au c. xxii, les deux frères approuvent les thèses protestantes sur cette -institution.

Nicolas Pithou a laissé deux manuscrits.qu’on trouve à la Bibliothèque nationale, collection Dupuy, ms. 698 et 940 : ils ont pour titres : Histoire ecclésiastique de l’Église prétendue réformée de la ville de Troyes, de la restauration du pur service de Dieu et de l’ancien ministère dans ladite Église jusqu’en l’an 1594 (ms. 698). C’est une histoire très partiale du calvinisme, où l’auteur s’étend fort longuement sur le massacre de Vassy. L’autre manuscrit (940) a pour titre : La discipline ecclésiastique des Églises réformées de France, c’est-à-dire l’ordre par lequel elles sont conduites, avec des notes et corrections autographes de Nicolas Pithoi’, p. 5-70. Au ms. 104 de la même collection Dupuy, on trouve, fol. 10-12, 17-19, 24-25, des lettres écrites, de 1566 à 1573, par Théodore de Bèze à Nicolas Pithou.