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PIN Y (ALEXANDRE) PIRANO (LOUIS DE)


sensuel mais connues et 1res bien goûtées de l’homme spirituel. Ce dernier ouvrage montre que le « laisserfaire » suppose une ascèse vertueuse. Dans les Trois différentes manières… Piny cherche et trouve encore de ces formules qui sont comme riches de développements importants dont elles sont la semence et qu’elles peuvent suggérer pour des extensions autres que la pensée de leur auteur. H. Bremond, avec raison, attire l’attention sur l’une d’elles, p. 325 : « Ce qui se passe dans’la volonté qui est une puissance purement spirituelle ne veut et ne demande point, soit qu’il soit peine, soit qu’il soit amour, à se faire sentir. » Ainsi l’homme peut vivre dans un état et même dans un acte premier continuel à la fois de sacrifice souffrant et d’amour de Dieu. L’ordre métaphysique du subconscient dépasse l’ordre psychologiquement expérimental du conscient.

Il existe aussi, à l’état de copies, un recueil de lettres de Piny à des religieuses annonciades. Ce recueil paraît présenter par endroits un certain intérêt. Piny nous y est exprimé comme très appliqué au ministère de la direction spirituelle, ce que nous savons par ailleurs. Quoique ses écrits aient plus de vogue actuellement qu’ils n’en ont rencontré au xviie siècle et que certains aient été réédités (mais pas d’une manière critique), les lettres spirituelles de Piny sont restées manuscrites. Elles peuvent cependant finir de donner une idée de la personnalité attachante de cet auteur. Il était très désireux de mener lui-même une vie parfaite. Comme Fénelon, il rêvait d’abnégation dans les missions lointaines. Il obtint même un moment de ses supérieurs l’autorisation de passer en Indochine et en Chine, mais ce projet n’eut pas de suite.

Il nous est impossible de démêler l’affiliation des textes de Piny aux textes de Molinos ou de ceux de Fénelon aux textes de Piny, tandis que nous savons quelle fut l’influence de Mme Guyon sur Fénelon ou celle de Chardon et de Tauler sur Piny lui-même. Il suffira de redire que, parmi tant d’auteurs qui s’impliquent dans l’ensemble des courants de spiritualité a tendance passive ou quiétiste, Piny, insistant sur l’équivalence de la contemplation avec une activité supérieure profondément humaine, est un de ceux qui sont le plus aptes à maintenir unies la théologie mystique avec l’ensemble des matières de théologie morale que saint Thomas avait étudiées et que Piny d’abord avait professées lui-même. De là sans doute la grande prudence de Piny et de ses confrères dominicains. Us surent ne pas se mêler dans le camp des quiétistes condamnables lors de cette querelle du quiétisme, où, dans les dernières années du xviie siècle, des théologiens français plus connus allaient laisser chacun une part de leur prestige de sérénité doctrinale. Pourquoi Fénelon n’a-t-il pas imité cette prudence ? C’est peut-être parce que mal informé, théologien trop improvisé, muni d’un viatique insuffisant, d’une érudition trop superficielle. L’auteur des Maximes des saints n’aurait-il pas même trop ignoré le P. Piny ? A l’étudier davantage, il y eût trouvé de quoi fixer les thèses qui lui étaient chères dans un sens d’orthodoxie irréfutable. Mais il semble que les personnages, fussent-ils théologiques, dont la littérature française générale a fait ses classiques soient souvent, au regard de l’histoire véritable de la théologie, des personnages de second ordre, des esprits brouillons ou imparfaitement savants, tandis qu’on a comme caché les représentants essentiels des écoles moliniste, dominicaine, bérulienne, etc. Mieux inspiré que Fénelon dans ses Maximes des saints, son apologiste, l’abbé Bremond, dans sa Métaphysique des saints (Hist. lit. du sentiment religieux, t. viii, 1928, p. 78-178), a fait connaître Piny comme le maître du « pur amour », C’est la seule étude exhaustive et compréhensive qui existe actuellement de ce « quiétisme thomiste », si l’on peut employer une expression qui réunisse ainsi deux réalités totalement différentes (lorsqu’on les considère dans leur état séparé et absolu).

M. —M. Gorce.

    1. PIPPRE (Louis LE)##


PIPPRE (Louis LE), chanoine régulier ou frère mineur capucin français (xvir s.), que J.-IL Sbaralea identifie avec Louis de Paris, frère mineur capucin de la province de Paris et auteur d’une Exposition littérale de la règle des frères mineurs, 4e éd., Paris, 1625. Louis Le Pippre a édité en latin, et non en français, comme le soutient le même J.-H. Sbaralea, un ouvrage sur les obligations qu’ont les curés vis-à-vis de leurs paroissiens : Paroclwphilus, seu de quadruplici debito in propria parochia persolvendo : concionis, missæ, con/essionis paschalis, paschalisque communionis, Anvers, 1635, Paris, 1657. Il faut noter, toutefois, que dans les éditions citées, ce traité est attribué à Bonaventure de La Bassée, frère mineur capucin. On y lit en effet, après le titre : Aulhore R. P. Bonaventura Bassean, capuccino prædicatore, ce q^c fait aussi Sbaralea, Supp’.ementum, t. i, Borne, 1908, p. 186. Ellies du Pin, toutefeis, soutient que l’auteur de ce traité est Louis Le Pippre qui ne fut po’nt capuc n mais chanoine régulier. D’autres affirment qu’étant déjà prêtre il entra chez les capucins de la province de Paris, où il prit le nom de Bonaventure. Les éditions du Paroclwphilus semblent d’ailleurs confirmer cette opinion. Il serait, en etlet, étrange que des éditions contemporaines et faites peut-être du vivant de Louis Le Pippre aient été publiées sous le nom de P. Bonaventure de La Bassée, capucin, alors que l’ouvrage n’aurait pas été de lui. La personne de Louis Le Pippre est encore enveloppée de ténèbres que nous ne sommes point parvenu à dissiper.

L. Wadding, Scriplores ordinis minorum, Rome, 1906, p. 1(5 1 ; Bernard de Bologne, Biblioiheca scriptorum <>rd. min. capuccinorum, Venise, 1747, p. 175 ; d’après ces deux historiens, Louis de Paris ne serait pas à identifier avec Louis Le Pippre ;.J.-IL Sbaralea, Supplementum ad scriptores ordinis minorum, t. ii, Rome, 1921, p. 192 ; Hllies Du Fin, Nouvelle bibliothèque des auteurs ecclésiastiques, t. xvii, Amsterdam, 1711, p. 183 ; Bibliothèque sacrée, t. xix, p. 465. ; L. Moréri, l.e grand dictionnaire historique, t. vii, p. ISO.

Am. Teetært.

    1. PIRANO (Louis ou Aloïs de)##


PIRANO (Louis ou Aloïs de), frère mineur (XVe siècle). Originaire de Pirano, sur le golfe de Trieste dans la province italienne actuelle de Pola, il entra dans la province de’Saint-Antoine de Padoue des frères mineurs. Docteur en théologie, il enseigna la philosophie et la théologie et fut appelé de son temps : philosophorum theologorumque princeps. En 1434, il gouverna sa province de Saint-Antoine de Padoue et, en sa qualité de provincial, prit part au concile de Bàle. Le jeudi saint 1434, il prononça un discours devant les Pères du concile. Le 7 août, Eugène IV l’éleva au siège épiscopal de Segni et le 18 février 1437, le transféra à celui de Forli. Il assista au concile de Ferrare en 1438, auquel il prit une part très active. Le 10 janvier 1438, dans la re session solennelle du concile de Ferrare, présidée au nom du pape par Nicolas Albergati, cardinal de Sainte-Croix de Jérusalem, Louis de Pirano lut le décret, par lequel Eugène IV transférait le concile de Bàle à Ferrare et déclarait nuls et sans valeur tous les décrets que pourraient promulguer les Pères de Bàle, en dehors de la question tchèque, ainsi que toutes les peines qu’ils avaient fulminées ou porteraient contre les membres du concile de Ferrare. Le 27 janvier, quand Eugène IV fit son entrée solennelle dans Ferrare, il tint un sermon à la cathédrale, devant le pape. Le 15 février, dans la n" session du concile, le pape le chargea de lire le décret, dans lequel il déclarait le concile légitimement transfère-