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Charles-Quint ; en 1531. il est chargé par le pape de porter au frère de l’empereur. Ferdinand [", une épée

bénite, attestant que le pape choisissait le roi de

I [ongrie comme le chef de la croisade contre les Turcs. Vers le même temps, il dédie au pape divers petits écrits conservés encore eu ras. au Vatican : Ile progymnasmatis geographicis, dans Vat. lut. tS78 et 6176 ; Nova Moscovite, lettre sur la situation présente de la Russie, dans Vat. lut. 3922 (imprimée à Venise en 1543 et. en traduction italienne, dans les Navigationietviaggi de J.-B. Ramusio, éd. de Venise, 1550-1559. t. ii, p. 126-131) ; Adversus Grxcorum errons, dans Val. Int. : S04. Paul III (1534-1549) continue à Pighi les mêmes faveurs que Clément VII ; il lui accorde, en 1535, la prévôté de Saint-Jean d’Utrecht, vacante en cour de Rome. Il n’est pas certain que Pighi ait regagné dès ce moment les Pays-Ras ; mais il résida certainement au lieu de son bénéfice à partir de 1537.

II y était en 1538. date à laquelle il eut à soutenir un procès devant la cour souveraine de Malines. En 1539, il est en passant à Rruxelles, d’où il écrit au pape Paul III au sujet de son livre De hivrarchia ecclesiastica, voir Zeitschr. fur Kirchengesch., ibid., p. 114. Il fait à Louvain un assez long séjour au printemps de 1540 ; regrettant son isolement relatif à Utrecht, il serait heureux, écrit-il au cardinal Cervini, de recevoir à Louvain un bénéfice qui lui permettrait de vivre en une compagnie plus intellectuelle. Ibid., p. 123. Les mois suivants allaient le tirer de son isolement. Le l r octobre, une lettre du pape Paul III lui intime l’ordre de se rendre au colloque de Worms, où l’on devait rechercher une entente entre protestants et catholiques sur les questions controversées. Ibid., p. 125. Le colloque est bientôt transféré. Le nonce Lampeggio, qui représentait le pape à Worms, reçoit l’ordre d’emmener à Ratisbonne les théologiens pontificaux. Mais Pighi ne fait pas route avec le nonce et ses collègues. Il s’arrête assez longuement à Ingolstadt.où il prépare, avec une hâte un peu fébrile, l’impression d’un volume relatif aux questions controversées. Voir ibid., p. 126, 127, 128, 131, 133. Il arrive à Ratisbonne sensiblement à la même date que le cardinal Contarini, envoyé comme légat par le pape. D’abord en défiance, le cardinal ne tarde pas à apprécier la vigueur du théologien néerlandais. C’est, selon toute vraisemblance, à l’influence de Pighi qu’il faut attribuer la rédaction du texte relatif à la justification (art. 5 de la formule de Ratisbonne) sur lequel s’entendirent protestants et catholiques, au début de mai 1541, mais qui ne tarda pas à être désavouée par les théologiens du pape. Sur tout ceci voir Fr. Dittrich, Gasparo Contarini, Praunsberg, 1885, p. 651-668, et passim, et dans les lïeç/esten und Briefe des Card. G. Contarini, publiés par le même, Braunsberg, 1881, les Inedita, p. 381-384, 387-389. On sait qu’à ce colloque de Ratisbonne l’entente provisoire obtenue sur quelques points ne put se réaliser sur d’autres. Le 29 juillet, la diète était dissoute sans que l’on fût arrivé à des résultats positifs. Libre de ses mouvements, Pighi retourne à t’trecht, après un voyage en Italie (il était à Venise le 13 octobre ; cf. Zeitschr. fur Kirchengesch., ibid., p. 152). Sa santé n’avait jamais été brillante ; les excès de travail auxquels il s’était livré, tant durant les colloques qu’au cours de l’année suivante, hâtèrent sa fin. Il mourut à l trecht le 26 décembre 1542 et fut enterré dans son église Saint-Jean. Voir diverses épitaphes, toutes fort intéressantes, dans Paquot, Mémoires…, t. ii, p. 178-180.

II. Œuvres. — La production littéraire de Pighi est considérable. Avant de s’adonner à la théologie, il avait composé plusieurs ouvrages relatifs à l’astronomie, science où il était assez versé : Adversus prognosticorum vulgus qui animas prxdietiones edunt et se

astrologos mentiuntur astrologix (entendre, l’astronomie ) defensio, Paris, 1518 ; De sequinoctiorum solstitiorumque inuentione, et de ratione paschalis celebrationis, deque restitutionc calendarii ad bealiss. patrem Leonem X, Paris. 1520 ; Léon X, en 1516, avait chargé l’université de Louvain d’examiner ce que l’on pourrait faire pour la réforme du calendrier, d’où cette réponse du jeune savant. Deux autres ouvrages sur l’astronomie de position sont beaucoup plus techniques ; en voir les titres dans Paquot. op. cit., p. 182. Nous avons signalé plus haut les ouvrages composés par Pighi à la curie romaine, col. 2095.

A partir de son retour à Utrecht, Pighi, conscient du péril que crée la Réforme, s’adonne exclusivement à la théologie, et tout spécialement à la controverse. Toute son œuvre est dès lors inspirée par le désir de mettre à mal les doctrines nouvelles. Entre 1537 et 1542, il entasse de volumineux ouvrages, quelquefois trop hâtivement composés, qui ne laissent pas de témoigner d’une érudition considérable. En voici la liste dans leur ordre d’apparition :

° Apologia indicli a Paulo III K. P., concilii adversus lutheranae confœderationis rationes plerasquc quibus eidem detrahunt, nuper in orbem sparsas, in-fol., 23 feuillets, Cologne, octobre 1537. Le 2 juin 1536, Paul III avait convoqué un concile général à Mantoue pour le 23 mai de l’année suivante, et pris les premières mesures pour la réalisation de ce dessein. Entre autres oppositions, le projet de concile avait rencontré celle de la Ligue de Schmalkalde. Celle-ci avait fait paraître un manifeste exposant les raisons de droit et de fait pour lesquelles ce concile ne pouvait être libre. C’est à ce manifeste, dont il donne d’abord le texte, que Pighi entend répondre. A plusieurs reprises, il renvoie à des arguments qu’il expose, dit-il, de manière plus développée dans un ouvrage beaucoup plus volumineux qui n’allait pas tarder à paraître. Il s’agit du suivant.

2° Hierarchiæ ecclesiasticse asserlio, in-fol., 268 feuillets (plus un index alphabétique et une longue analyse de l’ensemble non foliotés), Cologne, 1538 (dédié à Paul III en la fête de saint Grégoire) ; autres éditions : Cologne, 1544 (revue par l’auteur peu avant sa mort) ; ibid., 1558, 1572. Les t. III, IV et V ont été réimprimés dans Rocaberti, Bibliotheca maxima pontificia, t. n. C’est une ecclésiologie extrêmement remarquable, pour l’époque, quoi que l’on puisse penser de certaines assertions. Alors que les premiers contradicteurs de Luther s’étaient attaqués aux doctrines particulières du novateur, tout spécialement à la doctrine de la justification, Pighi a très bien vu que le point capital sur lequel on n’était plus d’accord entre protestants et catholiques c’était l’autorité de l’Église. D’où cette démonstration très large du rôle de l’Église et tout spécialement de son chef, le pape. Après avoir établi, au t. I, quelle est l’Église instituée par Dieu, Pighi étudie au 1. II l’unité de l’Église et les différents ordres qui la composent ; il établit en particulier la distinction entre les prêtres et les laïques, et montre l’institution de droit divin du sacerdoce. Le sacerdoce a un chef, c’est le pape, successeur de Pierre et détenteur dans l’Église d’une primauté telle que tout pouvoir ne peut émaner que de lui. C’est l’objet des 1. III et IV. Le 1. V traite des rapports entre le pouvoir ecclésiastique et le pouvoir civil et s’attaque expies sèment à la doctrine de Marsile de Padoue que Luther, en somme, ne faisait que renouveler. A cette hérésie. qui met l’autorité sur l’Église dans l’État et ses repré sentants, Pighi oppose la doctrine qui avait eu, surtout depuis le xive siècle, la faveur des théologiens pontificaux, celle du pouvoir direct de l’Église (disons plus exactement du pape qui l’incarne) sur le temporel. Il tire de la métaphore des deux glaives toutes