Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 12.2.djvu/315

Cette page n’a pas encore été corrigée
2065
2066
IMERRE D’URBINA — PIERRE LE VÉNÉRABLE


let 1658, ii fut transféré au siège archiépiscopal de Sévillc. Il mourut le G février 1663. C’est à tort que P.-B. Gams, Séries episcopomm, 2e éd., Leipzig, 1931, p. 21, l’appelle Jean d’Urbina. Ailleurs (p. 73 et 88), il le dénomme avec raison, et plus correctement, Pierre d’Urbina. Il faut noter encore que, d’après J.-H. Sbaralea, il aurait été transféré à Valence le 28 juin 1649. Cette date, toutefois, nous paraît moins correcte et moins vraisemblable que celle fournie par P.-B.Gains, puisque son prédécesseur à l’archevêché de Valence, Isidore de Alliaga mourut le 2 janvier 1648.

Dès l’année 1628, alors qu’il était lecteur à Alcala, Pierre d’Urbina publia, à Madrid, une apologie pour la défense des doctrines de saint Bonaventure et de Duns Scot. Le titre en espagnol est celui-ci : Mémorial en defensa de l’as doclrinas del doclor san Buenaventura y Escolo, sobre et juramento que la universidad de Salamanca hizo de leer tan solamente la dodrina de san Agustin y santo Tomas, 1 vol. in-fol. En 1627, on avait voulu contraindre tous les candidats aux grades de théologie à jurer d’enseigner et de défendre la doctrine de saint Augustin et de saint Thomas d’Aquin. Les franciscains et un grand nombre d’autres théologiens protestèrent énergiquement. L’acte de Salamanque fut cassé par le Conseil suprême en 1628 et la doctrine du Docteur subtil continua à être enseignée comme par le passé. Pierre d’Urbina rédigea encore quatre volumes de théologie selon la pensée de Duns Scot. Le premier traite de la foi, le second de la béatitude, le troisième de la pénitence et le quatrième de la vision. Ces volumes inédits étaient conservés à la bibliothèque du couvent des frères mineurs de la régulière observance à Madrid. Il composa aussi un Tractatus de sacramentis in génère et de virtute pœnitentiæ, qui était conservé, d’après J.-H. Sbaralea, dans le ms. A. 17 de la bibliothèque des prémontrés, à Madrid. Enfin, il est l’auteur d’une Apologia, in qua ostendit rhedarios suos capite aperto debere procedere, Valence, 1650, in-fol. et publia les Constitutiones synodales Valentini archiepiscopatus, Valence, 1657, in-fol.

J.-H. Sbaralea, Supplementum ad scriptores ordinis minorum, t. ii, Rome, 1921, p. 372 ; Dominique de Caylus, Merveilleux épanouissement de l’école scotiste auXVll » siècle, dans Études franciscaines, t. xxv, 1911, p. 312 ; H. Hurter, Nomenclator, 3e éd., t. iii, col. 891 ; P.-B. Gams, Séries epi.scoporum Ecclesiie catholicæ, 2° éd., Leipzig, 1931, p. 21, 73 et 88.

Ain. Teetæht.

70. PIERRE LE VÉNÉRABLE, neuvième

abbé de Cluny (1122-1156). I. Vie. IL Œuvres.

I. Vie.

Pierre le Vénérable a joué un rôle très important dans la vie religieuse de son époque, et a laissé des œuvres théologiques dignes d’intérêt. Né vers 1092, en Auvergne, de la noble famille qui devait au siècle suivant prendre le nom de Montboissier, Pierre fut voué par ses pieux parents, Maurice et Baingarde, à la vie monastique, et reçut une éducation soignée au prieuré voisin de Sauxilanges, qui dépendait de Cluny. Il fut admis vers 1109 à la profession religieuse par saint Hugues, qui devait mourir quelques mois plus tard. Sous l’abbatiat de son successeur, Ponce, dont la personnalité est encore mal connue (Revue bénéd., 1932, p. 351), Pierre fut affecté à l’abbaye de Vézelay en qualité d’écolâtre, puis de prieur claustral, et il y passa dix ans en compagnie de son propre frère Ponce. Il était depuis 1120 prieur conventuel de Domène, près de Grenoble, quand il fut élu abbé de Cluny, le 22 août 1122, à peine âgé de trente ans. Conformément aux exhortations du pape Calixte II, dans la bulle confirmant son élection, Pierre travailla à rétablir dans l’ordre de Cluny la discipline régulière : elle avait reçu de graves atteintes sous la mauvaise administration du trop célèbre abbé Ponce,

qui avait donné sa démission à Borne dans des conditions et des sentiments difliciles aujourd’hui à préciser ; et la réforme n’avait pu être envisagée par le vieil Hugues II, durant les quatre mois de son abbatiat. Le jeune abbé appela à cet effet près de lui le prieur de Saint-Martin-des-Champs, Matthieu, qui devait être son meilleur auxiliaire et devenir cardinal d’Albano. Deux ans après son élection, pendant une visite qu’il faisait de ses monastères d’Aquitaine, il apprit que l’ancien abbé Ponce avait envahi à main armée l’abbaye de Cluny et la mettait au pillage ; ce fut le pape Honorius II qui le remit en possession de sa charge et excommunia l’intrus, qui mourut de la malaria quelques mois plus tard (1126). De miraculis. t. II, c. xii, P. L., t. clxxxix, col. 922-926. A son tour, l’abbé de Cluny eut l’occasion de défendre l’Église romaine, en 1130, lors du « schisme d’Anaclet » ; mise au second plan par celle de saint Bernard, son intervention efficace en faveur d’Innocent II ne fut pas sans mérite, puisque la cause était en somme assez douteuse et que Pierre de Léon avait été moine clunisien. Son dévouement devait être assez mal récompensé ; en effet, c’est à Cluny même, dont il avait consacré l’église, que le pape accorda aux cisterciens, en février 1132, l’exemption de la dîme, qui enlevait à Cluny la dixième partie de ses biens. Pétri Ven. epist., t. I, 33-36, P. L., t. cit., col. 164-175.

Non content de remettre de l’ordre dans l’administration temporelle de l’abbaye mère, et de lui assurer mois par mois de suffisantes ressources (col. 1047), il veilla avant tout à la discipline régulière. Au carême 1132, il réunit un chapitre général de deux cents prieurs de l’ordre, et leur imposa, bon gré mal gré, un certain nombre de réformes qu’il est difficile d’apprécier aujourd’hui, puisque le détail n’en a pas été conservé. Il publia d’autres décrets plus modérés, à différentes époques. Ce sont ces statuts divers qu’il reprit en 1146, en 76 points relatifs à la liturgie, à la profession monastique et aux observances religieuses, où l’ordre même des sujets abordés permet de reconnaître la compilation de plusieurs décrets successifs.

Le souci de diriger l’ordre exigeait aussi de l’abbé de Cluny une correspondance active avec quelques protecteurs séculiers, avec les papes et autres dignitaires ecclésiastiques, et avec des représentants des divers ordres monastiques, qui avaient compris autrement que Cluny la réforme religieuse : tels les chartreux, les cisterciens, et de nombreux ermites ; à tous, il montre combien il comprend leur genre de vie. Cependant, à un libelle émané des milieux cisterciens, il répondit, vers 1124, par une longue lettre où il défendait les coutumes de Cluny, et semblait du même coup réfuter l’apologie de saint Bernard pour Cîteaux ; vingt ans plus tard (1143), il tenta à nouveau d’expliquer à son bouillant ami les divergences d’esprit qui marquaient les deux ordres. Epist., t. I, 28 et t. IV, 17. Ses lettres à ses propres moines sont relativement rares, et encore deux d’entre elles sont des consultations théologiques. Il encourageait d’ailleurs chez les clunisiens le goût des études par son exemple, par les conseils et les éloges qu’il leur donnait, par le soin qu’il prenait de leur procurer des manuscrits (col. 106) — la bibliothèque de Cluny, à sa mort, renfermait plus de 500 volumes des Pères et une centaine de volumes d’auteurs classiques (L. Delisle, Cabinet des manuscrits, t. ii, p. 458-481) — par sa constance enfin à défendre contre les cisterciens cette conception déjà traditionnelle dans son ordre. Cf. Pierre de Poitiers, Epist. ad Petrum Cluniacensem, P. L., t. clxxxix, col. 62.

Il fit six voyages à Rome, malgré le mauvais état de sa santé quand il se trouvait en Italie et les mésa-