Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 12.2.djvu/296

Cette page n’a pas encore été corrigée
2027
2028
PIE R RE DE LUNA. ŒUVRES


chaient d’avoir violé le serment prêté au conclave (ci-dessus, col. 2021), d’être fauteur de schisme pour D’avoir pas accepté la voie de cession ». d’être même fauteur d’hérésie pour avoir condamné cette voie et l’avoir déclarée illicite. L’auteur des Allégations entend ne rien laisser subsister de ces griefs, après quoi il conclut que la soustraction d’obédience était illégitime, que ceux qui l’avaient décrétée avaient suscité dans l’Église un — schisme secondaire Sllbscisma, extrêmement dangereux, que, dès lors, tant que dure rait cette soustraction.il était impossible d’aboutir à l’union de l’Église. On y trouvera une argumentation véhémente contre les cardinaux rebelles. Voir Ehrle, loc. cit., p. 507, lig. 19 sq. Leur conduite, dit l’auteur, est absolument inconséquente : inévitablement, ils sont tombés dans le schisme, car, ou bien le pape romain est légitime et ils se sont séparés de lui, ou bien c’est le pape avignonnàis, et ils viennent d’entrer en révolte ouverte contre celui qu’ils reconnaissent vrai successeur de Pierre. On ne saurait mieux exprimer le dilemme dans lequel se débattait la question du Grand Schisme.

3. De novo subscismale (appelé aussi de son incipit : Quia nonnulli). — Ce traité est contenu dans les mss. suivants : Vatic. lat. 5608, fol. 238-272 ; id. 4039, fol. 70 v°-86 V ; Paris, lat. 1474, fol. 1 r°-43 v° ; id. 14 : * ;, fol. 1 r°-58 r° ; id. 11 891, fol. 1-40 ; Barber, ai/, %2, fol. 1-36 ; Casanat. 1406, fol. 132-161 ; Scorial. L. ii, 17, fol. 141-179.

Il est expressément attribué à Pierre par le 1 er ms. cité : Tractatus subtilis Pétri de Luna super facto scismalis, docendo de ipsius vera et canonica electione et reprobando gesta in concilio Pisano. Cette dernière indication en fixe la date après le milieu de 1409 ; il y est fait mention d’Alexandre V (26 juin 14093 mai 1410). mais non de Jean XXIII, et l’élection d’Alexandre V est encore récente. (Sur la difficulté soulevée par une correction de Fr. Ehrle, voir N. Valois, op. cit., t. iv, p. 150, n. 1. Valois, qui admet les dates d’Ehrle, suppose qu’il a pu y avoir des interpolations ultérieures.) Le traité fait le procès en règle du concile de Pise, et tout spécialement des cardinaux de l’obédience clémentine, qui, en se joignant à leurs collègues de l’autre obédience, ont convoqué le concile. Ainsi le mot subscisma, qui figure dans le titre, n’a-t-il point le même sens que précédemment dans le n. 2. Là il désignait la soustraction d’obédience de 1398 ; il s’applique ici à la collusion des cardinaux de l’obédience de Benoît, seuls légitimes à ses yeux, avec les cardinaux de « l’intrus ». En raisonnant exclusivement d’après les principes, il montre comment les cardinaux de l’une et de l’autre obédiences, séparés de leur pape respectif, ne peuvent avoir dans l’Église quelque juridiction que ce soit. Poursuivant avec àpreté sa démonstration. Pierre de Luna semble ne laisser aux schismatiques » de Pise, aucune échappatoire. C’est la première fois qu’il s’attaque à la « théorie conciliaire. Il va être amené à y revenir dans les traités suivants ; aussi bien, à partir de 1408, c’est la question qui prime toutes les autres.

1. Replicatio contra libelhun factum contra præcedenlem tractatum. — Le traité Quia nonnulli avait circulé d’abord sans porter le nom de Benoît XIII ; il avait été pris à partie par un canoniste, Guillaume d’Ortolan, évêque de Bodez, dans un petit écrit : Licel tractatus isle. Pour ce prélat, dit N.Valois, rien de moins utile, au point où l’on en était arrivé, que d’entamer la discussion des droits réciproques d’Ange Correr et de Pierre de Luna ; la plus grande partie de la chrétienté se groupait autour de Jean XXIII ; on pouvait espérer que la mort de ses rivaux achèverait l’union commencée ». Op. cit., t. iv, p. 151. La dissertation de l’évêque de Rodez avait été écrite dans la seconde

moitié de 1110 ; Benoît XII] n’en eut connaissance qu’assez longtemps après et entreprit de la réfuter.

Cette réplique est contenue dans les mss. suivants : Barber, ai /, 82, où les trois traités de Benoît et de son contradicteur se suivent dans leur ordre naturel : traité Quia nonnulli ; réponse de Guillaume, Licel tractatus ; réplique de Benoit, Inter distractionum molestias, celui-ci, fol. 82-97 ; et aussi dans Vat. lat. 5608, fol. 273-301 ; Paris, lat. I4ï> ;, fol. 79-168 ; id. 1474, fol. 56-132. La date est fournie par une allusion qui est faite aux premiers pourparlers relatifs à la tenue d’un concile à Constance ; c’est donc en 1411. Benoît prévoit que cette nouvelle réunion ne fera qu’accroître la confusion qu’a amenée le concile de Pise. Sans doute, comme le pense le contradicteur de Benoît, on va proclamer à Constance la nullité de ce qui s’est fait à Pise : et hoc sperat fieri in conciliabulo Conslanciensi, quod ad hoc in dubie procuratur, ut per illas inlrusiones, posl duas quas jam fecerunt de Petro de Candia et Ballazar Cossa, tandem procédant ad novam electionem inio inlrusionem allerius antichristi. Cf. Ehrle, p. 545, lig. 15. En d’autres termes, Pise a déjà ajouté un schisme, Constance ne pourra qu’en superposer un troisième. Tels sont les beaux résultats de la doctrine conciliaire. D’ailleurs, au moment où il écrivait ces lignes, Pierre de Luna s’était déjà exprimé tout au long sur ladite doctrine, dans le plus volumineux de ses traités qu’il nous reste maintenant à étudier.

5. Tractatus de concilio generali.

Ce traité figure, sans nom d’auteur, dans les mss. suivants : Vat. lai. 4124, tout entier ; Paris, lat. 4171, tout entier ; id. 1474, fol. 136 r°-255 v° ; Turonens. 218. L’attribution à Pierre de Luna ne fait aucun doute ; l’auteur se donne comme ayant composé le traité De novo subscismale (ci-dessus, n. 3), et inversement l’auteur de celui-ci renvoie par avance aux développements plus amples que fournira ce gros ouvrage. De plus, on renvoie ici au traité De principali scismate (n. 1) comme à un bien propre. La date se déduit aisément de ce que l’on vient de dire. Postérieur au De novo subscismale, le présent traité est antérieur à la Replicatio (ci-dessus, n. 4) ; il se situera donc au mieux en 1410, et plutôt au début qu’à la fin. Écrit après les événements de Pise, il ne se contente pas de récriminer contre ce qui s’est passé en cette ville. Il entend donner une consultation canonique en règle sur la possibilité de porter remède au schisme par la « voie du concile ».

C’est en effet la quæslio principalis qu’après divers préambules l’auteur veut aborder : Ulrum pro sedatione occurenlis scismatis sit générale concilium celebrandum ? La division est non moins claire. Après avoir donné des n ; tions générales sur les conciles, il entend étudier les questions suivantes : Qui doit*convoquer le concile ? Q)ui doit y être convoqué ? Qui doit le présider ? En cas de partage des voix, quelle décision doit l’emporter ? Le pape peut-il être jugé par le concile général pour quelque crime ou quelque défaillance (de aliquo crimine vel lapsu) ? Le pape est-il tenu de se soumettre à la décision du concile ; qu’arriverait-il, s’il ne s’y soumettait pas ? Plusieurs de ces questions amènent de nombreuses sous-questions. Mais, malgré la complexité du plan, l’idée directrice n’est jamais perdue de vue. II est aisé de voir l’intérêt que présente. pour le théologien, tout autant que pour le canoniste. ce volumineux traité. Les quelques extraits qu’en donne Ehrle ne suffisent pas, malheureusement, à en donner une idée suffisante. Mais il est très facile de voir le sens dans lequel s’orientait la pensée de l’ancien professeur de Montpellier. Elle n’allait à rien de moins qu’à incarner toute l’Église dans le pape, source exclusive de tout pouvoir, de tout droit, de toute juridiction. On aimerait lire la réponse qu’il fait, à propos de la convocation au concile, aux questions suivantes qu’il