L963
1MKUHK LO.MBA H I). LES SENTENCES, DATE
l ! » ii'
Ia-IIæhile de composition. Il suffira de rappeler
brièvement ce qui a été indiqué plus haut dans la biographie ; l’authenticité e, st hors de toute contestation.
L'œuvre date de la période qui précède l'épiscopal : le plus ancien manuscrit daté que nousen connaissions, celui dé Troyes, n. 900, fol. 220, a été transcrit, d’après l’affirmation du scribe, en 1158 ; voir Le traité de Pierre Lombard sur les sept ordres ecclésiastiques, dans la Revue d’histoire ecclésiastique, t.. 1909, p. 721. n. 2. D’autre part, l’on sait que la traduction du De fide orlhodoxa de Jean Damascène, faite sur l’ordre du pape Eugène 1Il par Burgundion de Pise, n’a pu avoir lieu ayant 1 1 15-1 146, première année du pontificat de ce pape, et Pierre Lombard qui en extrait une trentaine de citations à peu près, a tellement bien conscience d’introduire une auctoritas toute nouvelle en Occident qu’il éprouve le besoin de la couvrir du patrolage pontifical, 1. 1. dist. X IX. 9, p. 133. Cela fixe donc les deux limites extrêmes entre 11 16 et 1158. Il y a facilement moyen de délimiter davantage ces données chronologiques. La traduction de Burgundio a été achevée, semble-t-il, vers 1148-1150, Mouvement théologique, p. 247, 1'. Fournier. Deux eontroverses sur les origines du Déeret de Gratien, dans la Revue d’histoire et de littérature religieuses, t. iii, 1898, p. 257-258, date qu’assignait déjà la précieuse chronique de Robert du Mont-Saint-Michel, Mon. Germ. hist.. Script., t. vi, p. 501, et Pierre Lombard n’en a pu utiliser que quelques chapitres dans ce que les exemplaires occidentaux appellent plus tard le I. III (division en livres inconnue dans les manuscrits grecs du De fide orthodoxe !). Or, une note due à un disciple du Maître dès la première heure, Pierre de Poitiers sans doute, nous apprend que Pierre Lombard prit contact avec l'œuvre de Jean Damascène pendant son séjour à Rome, et ce séjour, assez bref sans doute, se place dans l’hiver de 1151-1152, à en croire le præsentium latorem, comme on l’a vu plus haut (col. 1947) à propos de la lettre d’Eugène III à l'évêque de Beauvais, datée de Segni, 19 janvier 1152. Voir La carrière de Pierre Lombard, quelques précisions chronologiques, dans la Revue d’hist. ecclés., t. xxvii, 1931, p. 815-819, qui corrige à la suite du P. Pelster, Wann hat Petrus Lombardus die « Libri IV Sententiarum « vollendel ? dans le Gregorianum, t. ii, 1921, p. 387-392, l’ancienne date adoptée dans le Mouvement théologique, p. 127, n. 6, p. 130 et 174, et acceptée par Denifle, Fournier, von Walter, etc. C’est donc à la fin de l’hiver, ou après l’hiver de 1151-1152, que Pierre Lombard achève les / V libri Sententiarum ; l’emploi restreint fait de l'œuvre du Damascène permet de croire qu’après le retour de Rome les Sentences n’ont guère tardé à paraître.
On serait fortement porté à croire que l'élaboration du I. I date d’avant 1148 ; outre le nombre relativement minime de citations de Jean Damascène (8 sur 27), et l’appartenance à ce I. I de la plupart des compléments ou notuliv conservées par les gloses des mss. ( 12 sur 19), dont il va être question, on en a de sérieux indic s dans son insistance presque véhémente contre les « hérétiques » gilbertins, dist. XXXIII et XXXIV. p. 209, 211, 212, 213, 216, et dans sa circonspection, juxla infirmitalis nostrw valitudinem, pour établir un principe reconnu au concile de Reims en 1 148, attitude difficilement explicable après cette date ; voir Schupp. Die Gnadenlehre des Petrus Lombardus, p. 9-10.
2o Rapport chronologique des / V libri Sententiarum s avec d’autres œuvres apparentées. — La date de composition des Sentences est liée de près à la question de l’originalité de Pierre Lombard ou des sources auxquelles il est allé puiser. Cette originalité, entendue dans le sens restreint qui sera exposé plus loin, a été menacée par les déterminations chronologiques divergentes, qui ont été émises à propos de l'œuvre de
Bandinus, de Gratien de Bologne, de Gandulphe et de
la Summa Sententiarum. Il faut rappeler brièvement ces tentatives et souligner leur résultat négatif.
1. Le " Magister Bandinus ». — Le Magister Bandinus était pratiquement un inconnu, lorsque la découverte de sa courte synthèse théologique à l’abbaye de Melk, par Jan Eck, en 1510, lit croire à un plagiai de Pierre Lombard, tant les deux œuvres se ressemblaient, les / V libri Sententiarum ne paraissant être qu’un développement du précédent ; la fameuse question posée par Eck, Quis ex eis ciiciilus fuerit ? était souvent résolue contre le Magister Sententiarum. D’autres mss. furent découverts dans la suite, entre autres par B. Pez, Thésaurus novissimus, t. i, 1721, p. xlv-xlvii ; l’un d’eux portait le titre d' Abbrevialio du Maître des Sentences, ce qui tranchait définitivement le débat en faveur de la priorité lombardienne. En 1834, Rettberg, Goltinger Weihnachtsprogramm, comparatio inter M. Bandini libellum et P. Lombardi I V libros Sententiarum, établissait la même thèse. Voir les hésitations, qui durent encore sans raison au xviiie siècle, dans le Mouvement théologique, p. 191 et notes ; R. Martin, La « Fifta Magistri », un abrégé de Pierre Lombard, dans The bulletin of the John Rylands' library, oct.-déc. 1915, p. 7 du Reprint ; texte de Bandinus, avec le récit de J. Eck, dans l'édition de Chelidonius, reproduite par P. L., t. cxcii, col. 965-1112. cf. col. 970 ; voir Ed. Dhanis, art. Bandinus, dans le Dict. d’hist. et de géogr. ecclés., t. vi, 1931, col. 488-489.
2. Gratien de Bologne.
Par rapport à Gratien de Bologne, au contraire, l'œuvre de Pierre Lombard a failli jouir d’une réputation d’originalité à laquelle elle n’avait pas droit. La thèse de F. von Schulte, énoncée en 1870, rencontraitpas mal d’adhérents ; elle donnait la priorité à Pierre Lombard, auquel revenait par suite la paternité du dossier patristique et des Dicta communs aux deux œuvres. Voir Zur Geschichle der Literatur iïber das Dekret Gratians, dans les.S’17zungsberichte der k.k. Akademie der Wissenschaften. Philos. -histor. Klasse, t. lxv. Vienne, 1870, p. 53-54. Mais les études de P. Fournier, de Denifle et d’autres, ont rendu à Gratien de Bologne les droits dont il allait indûment être dépouillé et, actuellement, la thèse de Fournier est universellement acceptée par Friedberg, Gaudenzi, Patetta, etc. ; voir Le mouvement théologique, p. 142 et 143, et surtout Le traité de Pierre Lombard sur les sept ordres ecclésiastiques, ses sources, ses copistes, dans la Revue d’hist. ecclés., t. x, 1909, p. 724, n. 2 et 3 ; cf. ici l’article Gratien, t. v, p. 1730.
3. Gandulphe de Bologne. -- Plus dangereuse, à cause de l’extension qu’elle avait sur toute l'œuvre et du patronage de son principal protagoniste, spécialisé dans l’histoire des écrits médiévaux, la concurrence de Gandulphe de Bologne faillit un moment être funeste à la réputation de Pierre Lombard. Mise en avant, en 1885, par le sagace chercheur médiéval qu'était Déni Ile, elle rallia, sans contestation d’abord, à peu près tous les suffrages. Voir Die Sentenzen Abælards und die Bearbeitungen seiner Théologie, dans l’Archiv fur Literatur-und Kirchengeschichle des M. A., t. I, 1885, p. 621 sq. Elle trouvait son appui dans diverses classes de mss. des Sentences qui portaient dans les marges ou dans leur texte glosé l’indication des passages pris par le Magister à Gandulphe. l’ne étude plus minutieuse de l'œuvre de Gandulphe, que n’avait pas pu faire Denifle, permit bientôt de renverser le rapport entre les deux sentenciers. La comparaison d’un certain nombre de chapitres, l’utilisation du Damascène, puis les relations avec l'œuvre de Pierre de Poitiers, aboutirent à fixer définitivement, sans conteste possible. la priorité de Pierre Lombard et son originalité vis à vis de Gandulphe. Voir Le mouvement théologique, 1914, p. 178-211 : Paul von Walter. Die Sentenzen