Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 12.2.djvu/257

Cette page n’a pas encore été corrigée
1949
1950
PIERRE LOMBARD. VIE


contiennent un substantiel éloge du nouvel évêque : Magister Peirus Lombardus, vir mugnæ scientice et super Parisiensium doctores admirabilis, electus est Parisiensîs episcopus, dans Mon. Germ. Iiist., Script., t. vi, p. 509, lig. 35, et Bouquet, Recueil des historiens des Gaules, t. xiii, p. 302 A ; elles fixent le sacre à la fin du mois de juin ou au début de juillet : circa jestum apostolorum Pétri et Pauli. Il n’y a donc rien là qui appuie l’accusation de simonie lancée une quarantaine d’années plus tard par Gautier de SaintVictor, dont la véhémence et l’inconsidération tranchent sur le suave équilibre de Hugues de SaintVictor : l'épithète d' « intrus simoniaque » semble bien une calomnie. Contra IV labyrinthos Franche, t. II, dans Geyer, Die Sententiæ Divin’ilatis, appendice, dans les Heilrùgc de Bâumker, t. vii, fasc. 2 et 3, p. 188*. L'épiscopat de Pierre Lombard fut de très courte durée et n’est représenté que par très peu d’actes dans les documents. Lasteyrie, Cartulaire général de Paris, t. i, 1887, n. 457, p. 386-388 ; voir p. 387. On peut signaler une pièce, datée de l’abbaye de SaintVictor, reproduite dans V. Mortet à la fin de son étude, Maurice de Sully, évêque de Paris, recueil cité plus haut, t. xvi, p. 288289, et telle ou telle donation de dîmes, voir Gallia christiana, t. vii, col. 68, et éd. de Quaracchi, 1. 1, p. xxi, la fixation du droit de nomination d’un chèvecier à Saint-Germain-l’Auxerrois, qui est reconnue au doyen de cette église, et la ratification d’une donation à Saint-Lazare. R. de Lasteyrie, Cartulaire, n. 410 et 415, p. 357 et 362. Cet acte dut être le dernier : la confirmation, par une charte de Louis VII, même ouvrage, n. 416, p. 363, n’arriva que quelques jours après la mort de l'évêque.

C’est pendant cette année d'épiscopat que se place le trait rapporté par Riccobald de Ferrare, Historia imperatorum, dans Muratori, lier. ilal. script., t. ix, coi. 124, et par Jacques d’Acqui, Chronicon, dans les Mon. hist. pair., Script., t. iii, p. 1620 : la mère de Pierre Lombard serait allée à Paris pour faire visite à son fils et jouir de son élévation. Mais l'évêque ne voulut la reconnaître que lorsqu’elle eut repris ses vêtements de femme du peuple qu’elle avait remplacés, pour lui faire honneur, par de riches atours. Toutefois, ce récit, que ne connaît aucun chroniqueur antérieur à Riccobald et à Jacques d’Acqui, lesquels écrivaient vers 1320, se retrouve aussi dans les Cotlationes de decem præceptis de saint Bonaventure, qui le raconte à la louange de Maurice de Sully, Collatio, v, 20, Opéra, t. v, Quaracchi, 1891, p. 525, et dans les Anecdotes historiques d’Etienne de Bourbon, publiées par Lecoy de la Marche, Paris, 1877, p. 231 ; on le trouve encore ailleurs avec Jean de Corbeil, archevêque de Sens, comme héros, ms. Ottob. 522, fol. 233 r° (quelques extraits dans les Analecta jranciscana, t. i, Quaracchi, 1885, p. 417, et Lecoy de la Marche, op. cit., p. 388, note). Cette variabilité dans les attributions, avec le long silence des chroniqueurs, et la difficulté du voyage pour une personne déjà vraisemblablement octogénaire justifient pour le moins un certain scepticisme.

En 1160, la mort mettait fin à la carrière épiscopaie de Pierre Lombard. On a longtemps hésité entre les deux dates de 1160 et de 1164. S’il fallait admettre cette dernière, Pierre Lombard aurait renoncé à l'épiscopat après douze mois environ de gouvernement et aurait survécu quatre ans. Car une chose est sûre, c’est la nomination, au mois d’octobre 1160, de son successeur, Maurice de Sully, celui qui devait bâtir NotreDame et dont l'épiscopat eut une durée de 36 années. V. Mortet, Une élection épiscopaie au XIIe siècle, Maurice de Sully, dans les Annales de la faculté des lettres de Bordeaux, nouv. série, t. ii, 1885, p. 149-157 ; Note sur la date des actes de Maurice de Sully, dans le Bultetin de la Société de l’histoire de Paris et de l’Ile-de France, t. xiv, 1887, [>. 34-36 ; Maurice de Sully, dans les Mémoires de la Société de l’histoire de Paris et de l’Ile-de-France, t. xvi, 1889, p. 105-318 ; voir surtout p. 119-144. La date de 1164 n’avait aucun appui en dehors de l'épitaphe, car le dire d’Aubri des TroisFontaines qui écrivait en 1252, dans sa Chronica, que Pierre Lombard fut évêque /ère per triennium, ne contient rien de ce chef en faveur de l’année 1164, puisqu’il relate le fait pour l’année 1 156, ce qui placerait la mort de Pierre Lombard vers 1159. Chronica, dans Mon, Germ. hist.. Script., t. xxiii, p. 843. Quant à l'épitaphe placée dans l'église Saint-Marcel et qu’on peut voir dans Gallia christiana, t. vii, col. 69, et dans l'édition de Quaracchi, t. i, p. xxm-xxiv, il est établi que l’addition de 1164 est toute moderne et fautive. Cf. Hist. litt. de la France, t.xii, p. 586 et 587, n. 1, et G. Dubois, Historia Ecclesiæ Parisiensis, t. ii, Paris, 1710, p. 123. C’est au mois de juillet, le 21 ou le 22, qu’eut lieu le décès ; l’obituaire de Notre-Dame le fixe bien au 3 mai, Obituarium, n. 125, dans Guérard. Cartulaire de l'église Notre-Dame de Paris, t. iv, n. 125, p. 60, mais il est en contradiction avec tous les autres documents ; le nécrologe de Saint-Martin-des-Champs le place au 21 juillet, Molinier, Obituaires de la province de Sens, t. i, 1902, p. 447, comme la partie ancienne de l’inscription de Saint-Marcel ; l’obituaire de Saint-Victor est pour le 22 juillet, Bibliothèque nationale, ms. lat. 14 673 ; cf. V. Mortet, op. cit., p. 136. n. 3 ; de même l'érudit annaliste de Saint-Victor, Jean de Thoulouze, Annales Sancti Vicloris, Bibliothèque nationale, ms. lat. 14 368-14 374 ; un document des archives de Notre-Dame, publié par Guérard, Cartulaire, t. iv, p. 358, n. 14 des extraits du Liber niger de l’appendice, rappelle la redevance due le jour de l’anniversaire de Pierre Lombard « au mois de juillet. Herbert de Boseham, cité plus haut, nous dit aussi, avant 1176, que Pierre Lombard mourut peu de temps après sa nomination au siège de Paris. Ms. 150 de Trinity Collège de Cambridge, fol. 1 r°.

U n’y a donc plus lieu d’hésiter ni d’expliquer la date de 1164 par une sortie de charge en 1160, suivie d’une survivance de quatre ans, comme on l’a fait jadis.

Un texte des Décrétâtes, qui a trouvé place dans le Corpus juris canonici. Décrétai., t. III, tit. xxiv, c. 2. ne doit pas jeter une ombre rétrospective néfaste sur l’intégrité de la gestion épiscopaie de Pierre Lombard. Le pape Alexandre III y rappelle que le prédécesseur du destinataire de la lettre avait fait plus d’une donation préjudiciable à son église et sans consultation préalable du chapitre. Mais la vraie leçon n’est pas Parisiensi episeopn, en l’occurrence Maurice de Sully. successeur de Pierre Lombard ; il faut lire Papiensi episcopo, et les deux évêques sont Lanfranc de Pavie et Pierre Toscani (vers 1178-1180). L’erreur, rectifiée par les manuscrits que Friedberg mentionne dans son apparat critique, Corp. jur., t. ii, p. 533, avait déjà été corrigée par Antoine Augustin, Antiquæ collectiones Decretalium, dans les Opéra omnia, t. iv, Lucques. 1759, p. 170, et la correction est confirmée par les travaux de Kehr, Iïegesla pontificum romanorum, Italia pontificia, t. vi a, Berlin, 1913, p. 183 (Pavie, n. 45) : voir aussi le relevé sommaire des décrétales d’Alexandre III, d’après les Iiegesta de Jaffé, dans P. L., t. ce. col. 1358 D, lettre cdxci. La courte correspondance, toute banale et bourrée d’allégorismes, avec Arnold de Metz et Philippe de Reims, contenue dans un ms. de Leipzig, Feller, Catalogus cod. mss. bibliotheese Paulinse in Academia Lipsiensi. Leipzig, 1686, p. 182, n. 10 (la voir dans édit. de Quaracchi, t. i, p. xxxv), n’a rien d’intéressant et n’inspire aucune confiance, les deux destinataires n’ayant jamais occupé les sièges épiscopaux qu’on leur attribue dans ces deux lettres.