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IMKKKK DE CORVARO

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contre Louis et engagea les princes allemands à procéder à une nouvelle élection. Trop faible pour résister aux at laques de Robert de Naples, l’empereur dut déguerpir, de Rome, le 1 août 1328, avec son antipape, sous les huées de la foule et, dès le 8 août. Rome se retrouvait sous L’obédience de Jean XXII. Louis gagna, par Todi, la ville de Pise, où il arriva le 21 septembre. Il » trouva un renfort des plus hauts dignitaires des frères mineurs fugitifs d’Avignon, le général Michel de Césène, Guillaume Occam et Buonagrazia de Bergame, qui recommencèrent, à Pise, la guerre de plume contre Jean XXII, par un appel à un concile général. Lorsque, au commencement de janvier 1329, l’antipape eut rejoint Louis de Bavière à Pise, ils organisèrent, le 19 février, une véritable comédie : Jean XXII fut une fois de plus excommunié et déposé ; cela fait, il fut condamné sous le nom de Jacques de Cahors, en qualité d’hérétique, livré au bras séculier et brûlé en effigie. Mais, le 6 juin 1328, Jean XX 1 1, de son côté, excommunia et déposa les frères mineurs fugitifs, en particulier leur général Michel de Césène. Le jeudi saint 1329, il publia de nouvelles condamnations contre Michel de Césène, l’empereur Louis et l’antipape et, le 18 novembre 1329, survint une. autre bulle, Quia vît reprobi s. plus impérieuse et fort longue, encore dirigée contre Michel de Césène.

Entre temps, l’antipape allait de déboires en déboires. Un registre de lettres communes permet de délimiter assez exactement la zone d’influence religieuse de Nicolas V. Dans la Haute-Italie, il compte des partisans à Milan, ainsi qu’à Crémone, à Ferrare et dans les Marches. Son autorité fut plus généralement reconnue à Todi, Viterbe, Volterra, Arezzo, Pistoie, Lucques, Pise, Gênes, Savone, Albenga. Ailleurs, elle s’exerce dérisoirement, même en Allemagne, dans les diocèses de Strasbourg, Freising, Eiehstàdt, Trêves, Spire, Munich, Ratisbonne, Bâle, qui subissaient plus directement l’autorité de l’empereur. La hiérarchie épiscopale, constituée par Nicolas V, se composa de dix-huit évêques, dont deux résidèrent en terre d’empire, à Bâle et à Camin et les autres en Italie. Encore des divers prélats nommés à ces sièges, n’y en eut-il que quatre environ à prendre réellement possession de leur titre.

Le parti des schismatiques compta surtout des adeptes dans l’ordre des frères mineurs et dans celui des ermites de Saint-Augustin. Les dominicains ne fournirent que de rares recrues. Si les augustins et les franciscains furent les seuls à se rallier à Nicolas V. ils déployèrent un zèle fanatique pour soulever l’opinion en sa faveur. Ils prêchèrent contre Jean XXII non seulement en Italie, mais aussi en Corse, en Castille, en Angleterre, en France, en Allemagne et en Esclavonie. Michel de Césène et Guillaume Occam accumulèrent libelles sur libelles. Voir l’art. Occam, col. 873-876. Malgré tant d’efforts, leurs accusations et leurs prédications ne trouvèrent presque aucun écho auprès des populations chrétiennes. C’est à grand’peine que Nicolas V put grouper autour de lui un collège de cardinaux. Ceux qui acceptèrent la pourpre — neuf en tout

— furent gens de rien, déjà en rupture avec l’Église officielle. Somme toute, l’influence de Nicolas V fut presque nulle et ne se maintint pas plus longtemps que ne dura la protection de Louis de Bavière. Deux mois et demi après son élection, l’antipape avait quitté Rome (4 août). Dès lors, il erra à la suite de l’empereur. Le 3 janvier 1329, il entrait à Pise, où l’attendaient les pires avanies. Le 4 mars, sa chancellerie expédiait sa dernière bulle. D’après ses dires, il se sépara momentanément de Louis de Bavière, qui quitta Pise le. Il avril. C’était le signal de la déroute générale.

Se dirigeant vers le Nord, Louis put se convaincre, à son grand étonnement, qu’en Lombardie comme en

Toscane, le parti du pape avait considérablement augmenté. L’impossibilité de continuer la guerre en Italie sans nouveaux secours d’Allemagne et aussi l’état de l’Allemagne déterminèrent Louis à repasser les Alpes. A Trente, il apprit la mort de Frédéric le Bel, survenue le 13 janvier 1330. Rentré à Munich avec Michel de Césène et d’autres, Louis feignit de braver hardiment le pape. Néanmoins, dès le début de 1330, il fit faire à Avignon des démarches en vue d’une réconciliation. Louis promit le sacrifice de l’antipape, qu’il avait laissé sans secours en Italie, l’abandon de son appel au concile général, le désaveu de sa conduite contre l’Eglise et l’acceptation de la sentence d’excommunication qui l’avait frappé. Il demandait, en retour, la reconnaissance de son pouvoir. Le pape répondit, le 31 juillet, qu’il lui était impossible de s’entendre avec Louis, hérétique et protecteur d’hérétiques, et qu’il fallait, par conséquent, procéder à une nouvel le élection.

Quant à l’antipape Nicolas V, quand il se vit réduit au seul Paul de Viterbe comme défenseur, il comprit que tout était bien fini. Sa cour, ou ce qui en tenait lieu, avait disparu, la ville de Pise l’invitait à s’éloigner et il n’eut d’autre ressource que de se réfugier au château de Bargaro, inconnu de tous, au point que Jean XXII lui-même ignorait le lieu de sa retraite. A l’approche d’une armée florentine, le comte Bonifazio de Donoratico le renvoya à Pise et le cacha dans son hôtel ; mais le secret fut ébruité et le pape réclama du comte la remise du pauvre homme, dont personne ne se soucia plus. Cela arriva le 10 mai 1330. On négocia pour la forme. Le pape promettait à l’intrus la vie sauve et le pardon de ses fautes, et lui octroyait une pension annuelle de 3 000 florins. Pierre de Corvaro, trouvant que l’épisode prenait fin mieux qu’il ne pouvait l’espérer, prodigua ses protestations, ses rétractations et ses objurgations. Sur la foi d’une lettre bienveillante de Jean XXII, du 13 juillet 1330, il s’exécuta, le 25 juillet, en présence de l’archevêque de Pise et de l’évêque de Lucques. Le 4 août, on l’embarqua, confié aux soins d’un armateur marseillais, et le 6 août il était à Nice. Conformément aux prescriptiens dé Jean XXII, il dut réitérer la confession publique de son crime à Toulon, Marseille, Arles, Tarascon. Le 23 du même mois, il arrivait à Avignon et le 25, il dut en présence du pape, des cardinaux et des dignitaires de la curie, lire, revêtu de l’habit franciscain et la corde au cou, l’acte solennel de l’abjuration de ses erreurs. Texte dans Baluze, Vitæ paparum Avenionensium, t. i, p. 142-152. Après quoi il fut absous de toutes les censures et gardé au palais papal, pendant trois ans, dans une captivité supportable. II y mourut le 16 octobre 1333.

L. Wadding, Scriptores ordinis minorum, 2e édit., Rome, 1906, p. 192, et J.-H. Sbaralea, Supplementum, t. ii, 2e édit., Rome, 1921, p. 362. attribuent à Pierre de Corvaro un Opusculum de Christi imitatione. L’auteur de la Conjectura de libris de Imitatione Christi, eorumque auctoribus, publiée à Rome, en 1667, se demande si l’on ne pourrait attribuer les trois premiers livres à Jean de Verceil (Yercellensis), ou à Hubertin de Casale ou à Pierre de Corvaro ; quant au t. IV, il serait l’œuvre de Gerson ; Thomas à Kempis n’aurait été que le compilateur de ces quatre livres. Jean Baie, Scriptorum illustrium majoris Brilanniiv catalogus, part. II, Bâle, 1559, p. 137, ne considère point Pierre de Corvaro comme l’auteur d’un Opusculum de imitatione Christi, mais d’une Glossula super Christi imitatione. Ce sont là autant de questions importantes qui intéressent fortement le problème toujours vivement discuté de l’auteur du De imitatione Christi.

L. Wadding, Annales minorum, t. vii, Rome, 1733, p. 78-81 et 106-111 ; du même, Scriptores ordinis minorum.