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PIERRE COMESTOH — PIERRE DE CORVARO


été donnés dans les synodes et deux adressés aux évêques et aux prêtres. Quelques détails caractéristiques, d’intérêt documentaire, fournis par ces allocutions, méritent d'être relevés. Parmi les signes précurseurs de la naissance du Messie, qu'énurnère Pierre Gomestor dans le premier sermon sur l’Avent, il note les deux événements suivants, que les Romains auraient, déclare-t-il, connu d’avance par l’oracle d’Apollon : à Rome, le jour de la nativité de Jésus, le temple de la Paix s'écroula et une source d’huile jaillit brusquement et s'écoula vers le Tibre.

Pendant le carême, les frères, avant de prendre leurs repas, lavent les pieds des pauvres et leur donnent à manger, la messe se célèbre après none et non entre tierce et sexte, comme en temps ordinaire, un voile est suspendu entre le choeur et les fidèles pour éviter toute distraction aux clercs durant l’office, les processions assez nombreuses, mais variables suivant les lieux, sont faites d'église à église afin de favoriser la piété des chrétiens et, dans les monastères, le jeûne devient obligatoire depuis la septuagésime.

A l’occasion de la fête de Pâques, Pierre Comestor rappelle à ses auditeurs qu’au début du christianisme tous les fidèles, qui assistaient à la messe, recevaient la sainte eucharistie. Plus tard, on s’approchait de la table sainte au moins à Pâques, à la Pentecôte et à Noël. De son temps s’introduit l’usage restreint de la communion annuelle au temps de Pâques, strict minimum pour ne pas commettre de faute, bien qu’il n’y eût pas encore de précepte ecclésiastique. Dans un des discours prononcés au synode, où il a examiné les devoirs des évêques et des pasteurs d'âmes vis-à-vis de leurs fidèles, voici ce qu’il dit par rapport à leur sacré ministère de l’eucharistie : Corpus Domini conftciunt, sumunt, sumendum aliis tribuunt, eorum ministerio panis et vinum in carnem Christi transsubstantiatur. Magna débet eorum sanctitas esse, quorum dignilas in tam sanctis habet efficaciam. Serm., xxxviii.

Au jour de la Toussaint, Pierre Comestor déclare que les âmes qui font partie de l'Église souffrante n’ont pas de part à cette fête, bien qu’elles soient déjà virtuellement sauvées. Le temps de la purification, pour certaines d’entre elles, durera jusqu’au jugement : il peut être diminué par les suffrages de l'Église.

En dehors des sermons imprimés, il en existe d’autres. Il y en avait cent quatorze dans une tombe du monastère de Longpont, intitulés : Sermones Pétri Comestoris. Bourgain, dans ses études sur la chaire française au xiie siècle, mentionne encore des manuscrits de prédications provenant des monastères de Marmoutier, de SaintVictor ou d’ailleurs et juge ainsi les progrès accomplis par Pierre Comestor. Retiré au couvent de SaintVictor, « il dépose son jargon scientifique, il obéit au goût de son auditoire ; il est clair, simple, instructif et, sans devenir éloquent, il devient naturel ».

Certaines instructions de Pierre Comestor ont probablement été destinées aux professeurs et aux élèves des écoles, puisqu’en qualité de chancelier il avait des fonctions en bien des points semblables à celles de nos recteurs modernes d’université. Mais la plupart sont cependant adressées au peuple fidèle. Avec l’Historia scolastica, les sermons constituent l'œuvre capitale du doyen de Troyes et du chancelier de Paris.

Autres travaux.

 Pierre Comestor est l’auteur

de commentaires inédits sur les épîtres de saint Paul et sur les évangiles. Avec quelque vraisemblance, on lui attribue un petit poème en l’honneur de la vierge Marie et une Pareenesis, dont on ne connaît que le titre. Mais il n’est probablement pas l’auteur de la Catena temporum, traduite en français, sous le nom de Mer des histoires, ni du traité De diligendo Deo, ni des Allégories, comme on l’a parfois prétendu. Albéric de

Trois-Fontaines, dans sa Chronique, au. 1169, attribue aussi à Pierre Manducator le Librum qui dicitur Pancrisis. Cf. Mon. Germ. hist., Script., t. xxrn, p. 853. Ce livre est contenu dans les mss. 19, d’Avranches, et 125 A, de Troyes ; quelques extraits en sont publiés dans G. Lefèvre, Les variations de Guillaume de Champeaux, Lille, 1898, p. 19-79, et Anselmi Laudunensis et Radul/i… sententix excerptse, Évreux, 1895. Il s’agit d’un recueil de Sententim et de Qusestiones, empruntées aux Pères de l'Église et commentées par des maîtres contemporains, Guillaume de Champeaux, Yves de Chartres, les deux Anselme, Raoul de Laon. On voit l’importance de ce recueil pour l’histoire de la première scolastique.

Par ses fonctions de doyen de Troyes et surtout de chancelier de Paris, Pierre Comestor n’a exercé qu’un rôle de second plan. Sa renommée commence surtout après sa mort par la diffusion de son Hisloria scolastica, une des œuvres les plus originales de la fin du xiie siècle.

I. Textes.

Sur les anciennes éditions de l' Hisloria scolastica, voir Hain, Repertorium, t. ii, n. 5529-55 tO, et Copinger, Supplément (o Hain, t. i, n. 5530-5540 ; t. n a, n. 1709 ; t. il b, n. 5532. Les éditions anciennes sont celles de Reutlingen, 1471, 1473, 1485 ; de Strasbourg, 1483, 1485, 1487, 1502 ; deBîle, 148ô ; d3 Paris, 1513 ; de Haguenau, 1519 ; de Lyon, 1526 et 1543. La P. L., t. cxcviii, col. 1053-1122, reproduit celle qu’avait donnée Em. Navarre, Madrid, 1690 ; édit. d3 Venise, 1725. — Les sermons édités, d’abord parmi les œuvres ds Pierre daBlois, figurent encore dins la Max. biblioth. Palrum, de Lyon, t. xxiv, en appendice aux oeuvres de cet auteur ; Migne a reproduit cette édition dans P. L., t. cit., col. 1721-1774, en supprimant ceux qui sont attribués à Hildsbert du Mans.

IL Notices et travaux. — Trithèms, De scripl. eccl., n. 380 ; du Boulay, Hislor. univers. Paris., t. ii, p. 261, 326, 369 ; Richard Simon, Histoire critique du Vieux Testament, t. i, p. 413 ; et Hist. cril. du Nouveau Testament, t. Et, p. 320 ; Fabricius, Bibl. lat. medix et infime eelalis, éd. de Hambourg, t. i, p. 1134-1138 ; Oudin, Script, eccl., t. ii, col. 1529 ; Cave, Script, eccles., t. ii, p. 239 ; R. Ceillier, Histoire des auteurs ecclés., t. xxiii, 1763, p. 305-311 ; Histoire lill. de la France, t. xiv, 1817, p. 12-17 (notice de Brial) ; Hauréau, -Notices et extraits de quelques mss. de la Bibl. nat., t. iii, p. 44 ; Féret, La faculté de théologie de Paris, t. i, 1894, p. 42-48 ; t. ii, p. 326 ; Bourgain, La chaire française au XIIIe siècle, Paris, 1879, p. 122-123 ; M. Grabmann, Gssc/i. der scholastischen Méthode, t. ii, Fribourg, p. 476 ; M. Manitius, Gesch. der lat. Literatur des M. A., Munich, 1931, p. 156-159.

N. IUNG.

29. PIERRE DE CORVARO, frère mineur, devenu l’antipape Nicolas V († 1333).

Pierre Rainalducci, originaire de Corvaro, dans le diocèse de Rieti, était entré, déjà marié, dans l’ordre de Saint-François, malgré l’opposition de sa femme. Après avoir mené une vie religieuse exemplaire de prière et de pénitence, il fut choisi, le 12 mai 1328, par Louis de Bavière, comme antipape, contre Jean XXII, qui habitait Avignon ; il devint ainsi un instrument docile aux mains de Louis de Bavière dans ses luttes contre le pape. L’origine de ce triste schisme doit être cherchée dans les prétentions de Louis de Bavière au trône d’Allemagne. Au moment de l’avènement de Jean XXII, en 1316, deux élus prétendaient à la couronne d’Allemagne : Louis de Bavière et Frédéric d’Autriche. Le pape s’efforça particulièrement de faire prévaloir, vis-à-vis de l’empire d’Allemagne, le principe que, pendant la vacance du trône, l’administration de l’empire revient au pape. Par conséquent, il déclara expirés les pleins pouvoirs donnés par Henri VII aux divers gouvernements, établis par lui dans différentes régions de l’Italie et, comme Clément V, il donna à Robert, roi de Naples, l’administration supérieure de toutes les parties de l’Italie appartenant à l’empire. Le désaccord dans l'élection du roi