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PIERRE A.URIOL. LES CRÉATURES


rame ne produit pas naturellement, mais que Dieu lui infuse. Dieu est nécessité ici a donner la vie éternelle non par un acte que l’âme produit naturellement, mais par un don qu’il lui fait d’abord, surnaturellement. La charité infuse nécessite donc Dieu, d’après Auriol, à donner la béatitude, la vie éternelle. Selon le docteur franciscain. Dieu est tenu, sous peine d’injustice, d’accepter certaines âmes. La justification est une œuvre de justice : c’est pourquoi elle paraît nécessaire. Voir ici. t. xi. col. 774-775.

Selon Pierre Auriol. les habitus des vertus infuses s’identifient avec les dons, les fruits et les béatitudes du Saint-Esprit.. Il est question de dons, quand on considère l’origine des habitus ; et de vertus, quand on considère la manifestation des habitus. Mais, essentiellement, les dons s’identifient avec les vertus.

Tainen videtur es>e dicendum distinguend >, quia aliter possunt distingui proprie loquendo, ac propriate : si proprie, ita quod distinguantur sicut habitus spécifiée distincti, tune dicendum quod non, immo omnes virtutes intusse sunt idem quod dona et beatitudines et fructus, ita quod ha’c dona sunt habitus realiter, sed virtutes in comparatione ad actum, qui virtus pensatur secundum ultimuni potentise ; dona autem in comparatione ad principium, a quo habentur. Fructus vero dicuntur in comparatione ad delectationem et gaudium annexum operi spirituali : sic dicuntur hab’.tudines in comparatione ad principium, quod ois debetur. Ht sic tôt sunt dona, quot virtutes, et quot beatitudines. ita quod icquantiir in natura. In III Sent., dist. XXXIV, q. i, a. unie.

La manifestation des habitus s’opère en ce que la volonté est déterminée par l’intelligence à différents actes. Ces actes peuvent être ad intra et ad extra, et, dans chaque catégorie, on distingue deux sortes d’actes. Si la volonté est mue ad intra, à savoir à la contemplation de la divinité et de la béatitude céleste, on a le don de sagesse ; si la volonté contemple, au contraire, des choses temporelles, comme la passion du Christ, on a la science. Si l’on considère l’intelligence comme le principe de l’action de la volonté ad extra, ou bien elle voit le but de l’opération actuelle, et c’est « l’intelligence » ; ou elle considère le but d’actions futures, et c’est le « conseil ». In III Sent., dist. XXXV, a. 1.

Auriol renverse donc l’ordre des dons établi par saint Thomas, d’après lequel les dons intellectuels auraient la préséance sur les dons affectifs, parmi les dons intellectuels, les dons spéculatifs précédant les dons pratiques. Selon Pierre Auriol, les quatre dons sont les derniers actes de la même intelligence, reliés entre eux par la charité. Saint Thomas distinguait les dons d’après l’objet auquel ils se rapportaient ; Auriol les distingue d’après les conditions dans lesquelles ils opèrent. C’est pourquoi le docteur franciscain rapporte les dons de sagesse et de science à la vie contemplative, ceux de l’intelligence et du conseil à la vie active : Vita contemplativa exercetur per donum sapientiæ et scientiæ ; vita autem activa per donum intellectus et consilii. In III Sent., dist. XXXV, a. 1 ; cf. Boeckl, Die sieben Gaben des heiligen Geisles, Fribourg-en-B., 1931, p. 111-1 10. Auriol enseigne aussi que la vie contemplative l’emporte sur la vie active en perfection et en noblesse, parce que la vie contemplative se base sur des activités plus parfaites et plus hautes. In III Sent.. p. 529 b.

Le maître franciscain rejette la nécessité du lumen gloriæ pour la vision béatiflque de Dieu, parce qu’il est impossible qu’une qualité créée rende l’intelligence humaine et angélique proportionnée à la vision immédiate de Dieu. Barth. Xiberta, op. cit., p. 152. 103. Pierre Auriol semble admettre la croyance qui place le séjour des bienheureux dans la région immuable du ciel empyrée. C’est là un fait du domaine de la foi, dit-il, qui est entièrement soustrait au contrôle de la raison naturelle. In II Sent., p. 54 b, 55 b. Quant aux

peines des damnés, il laisse la question du feu corporel sans solution : Une est ergo pœna spirituum damnntorum. Sed ulrum talis qualitas possit causari ab igné corporeo in spiritum, dijjicile est videre. Tango ergo 1res imaginaliones. Eligat quilibel, quod magis place !. In IV Sent., p. 207 a ; In II Sent., p. 55’! >. 29.S b ; In

III Sent., p. 510 b.

Par rapport à l’union hypostatique, Auriol enseigne que Vunio natures humante ad Verbum non est habit udo de génère relationis sed est quidditiva unio, ou encore que non est <diud quam ipsa divina natura unita humanie. Barth. Xiberta, op. cit., p. 382-383.

9. Les sacrements.

Le maître franciscain considère le petit nombre des sacrements du Nouveau Testament en comparaison des innombrables cérémonies de l’Ancien Testament comme un privilège. //(

IV Sent., p. 30 a. La meilleure explication de l’efficacité des sacrements est celle qui les explique cum puucioribus pactis. lbid., p. 13 b. Il soutient qu’une croyance au Sauveur, même rudimentaire et indirecte, était suffisante pour sauver les âmes sous l’empire de la loi de la nature. Les Juifs pouvaient se contenter de croire, d’une manière générale, ce qu’avait cru leur père Abraham, de même que beaucoup de chrétiens, dans leur simplicité, se contentent de croire tout ce que l’Eglise enseigne. Job, parmi les gentils, eut la révélation de la foi. Il en résulte qu’une multitude de gentils, disciples de Job, ont eu en Jésus-Christ une sorte de foi dérivée. Mais que penser des philosophes grecs ? Pour Platon, Auriol aimait à se persuader, en s’appuyant sur saint Augustin (Enarr. in ps. OXL, 19), qu’il avait eu communication de la foi au Christ par Jérémie, avec lequel il avait dû s’aboucher en Egypte ( !). Le docteur franciscain semble ignorer toutefois le passage du De civitale Dei (vm, 11), où saint Augustin démontre l’impossibilité de cette rencontre. Quant à Aristote, Auriol rappelait la légende, suivant laquelle une profession de foi en « celui qui devait naître d’une vierge » avait été trouvée dans le tombeau d’Aristote. D’autres soutenaient que, pour être sauvés, il avait suffi aux anciens Grecs de croire à un dispensateur de tous les biens, ce qui revenait en somme à croire implicitement que Dieu ferait le nécessaire pour opérer le salut des hommes. Mais, d’après Auriol, Aristote n’avait jamais soutenu ni admis que Dieu fût ce dispensateur. Auriol demeurait donc perplexe pour le cas d’Aristote. In IV Sent., p. 148 sq. ; N. Valois, op. cit., p. 524-525.

Auriol s’est prononcé énergiquement pour le secret de la confession ; nul prêtre ne peut le violer, même sur l’ordre du pape, même pour déjouer des projets funestes à l’Eglise. Ceux qui, se trouvant à la portée de la voix du pénitent, ont entendu son aveu et ceux à qui un prêtre indigne a révélé quelque fait appris en confession, sont également astreints à l’obligation du secret. In IV Sent., p. 153 a.

K. YVerner, op. cit., t. iii, p. 243, a relevé quelques divergences entre Auriol et l’école thomiste sur d’autres points de la théorie des sacrements, par exemple au sujet de l’eucharistie et du mariage, ainsi qu’au sujet de la résurrection des morts. N. Valois, op. cit., p. 525, soutient qu’il n’est pas tout à fait exact de dire, comme Pierre Allix (Prirfatio historien de dogmatc transsubstanliationis, Londres, 1080, p. 00) et Pierre Bayle (Dictionnaire historique et critique, t. i, p. 399), que la foi de Pierre Auriol en la transsubstantiation était uniquement fondée sur l’autorité des saints. Voici d’ailleurs ce que dit le docteur franciscain : Prima (conclusio) est quod, data quod intellect ni modo non apparcret ratio et modus, lumen propter solas aucto ritates sanctorum leneo quod transsubstantiatio est veru transitus et conversio loti us punis in totum corpus Domini… Secundo propositio est quod, licel sil vuldc