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PIERRE D’ALCANTARA — PIERRE ALEXANDRE

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en leur procurant les moyens de réfléchir et d’agir eux-mêmes. De plus, on aperçoit des divergences entre les préoccupations des deux auteurs. Pour Louis de Grenade, la grosse affaire, c’est de fournir de la matière pour passer son heure à l’exercice de l’oraison, tandis que le saint franciscain cherche axant tout à développer l’esprit de dévotion et d’oraison si recommandé par saint François. Bien plus. Louis de Grenade enseigne l’oraison en docteur, en professeur, en homme de science, voulant instruire son élève, tandis que Pierre d’Alcantara se donne le rôle d’instructeur, de praticien et non de docteur ; il veut former, dresser, mettre en état d’agir. Entre les deux ouvrages, il n’y a donc pas seulement quelques nuances ; c’est tout un monde de véritable différences qui s’y offre.

Si, à ces arguments de critique interne on ajoute ceux que fournit la critique externe, il ne peut subsister de doutes que saint Pierre d’Alcantara doit être considéré de fait et de droit comme l’auteur du Traité de l’oraison. En effet, une tradition constante, qui remonte jusque vers la mort du saint réformateur, des éditions innombrables, en toutes les langues, du Traite, dont le P. Michel-Ange a énuméré et décrit 173 publications connues, attribuent ce Traité à saint Pierre d’Alcantara. Enfin, Louis de Grenade, dans l’énumération qu’il fait des ouvrages composés par lui, n’a jamais revendiqué la paternité du Traité, bien que de son vivant il en existât déjà plusieurs éditions et qu’il fût très répandu dans le peuple. De tous ces arguments il faut conclure que, s’il est certain que le Livre de l’oraison doit être attribué à Louis, de Grenade, il n’en est pas moins évident que saint Pierre d’Alcantara doit conserver la paternité la plus incontestable sur le Traité de l’oraison.

La question devient plus compliquée quand il s’agit de déterminer la priorité de l’un ou de l’autre de ces deux ouvrages ou l’utilisation de l’un ou de l’autre par saint Pierre d’Alcantara ou par Louis de Grenade. D’après le P. Cuervo, le Traité de l’oraison du saint réformateur aurait été publié entre 1556-1558 et constituerait un précis ou un extrait du Livre de l’oraison de Louis de Grenade, publié entre 1552 et 1554 et de la IIe partie de la Guide des pécheurs, éditée par le même auteur en 1557. Le P. Michel-Ange, au contraire, soutient que Louis de Grenade publia les deux premières parties de son Livre de l’oraison après le 21 août 1553, jour auquel l’évêque de Salamanque, Pierre de Castro, lui délivra la licence pour l’impression, tandis que saint Pierre d’Alcantara fit paraître au plus tard au début de 1554 son petit Traité de l’oraison, qui fut très probablement composé, et peut-être édité, pendant son gardiennat à Saint-Onuphre de La Lapa, entre 1532 et 1535. D’après le même auteur, le Livre de Louis de Grenade devrait être considéré comme une amplification philosophique, scientifique et surtout littéraire et oratoire du Traité de Pierre d’Alcantara. En face de la multitude des arguments, souvent spécieux, subtils, recherchés et compliqués, apportés par l’un et l’autre auteurs, nous devons avouer que l’argumentation d’aucun d’eux ne satisfait complètement et ne donne une solution définitive et apodictique au problème discuté. Ni le P. Cuervo n’a réussi à démontrer que le Traité de Pierre d’Alcantara constitue un précis ou un extrait du Livre de Louis de Grenade, ni le P. Michel-Ange n’est parvenu à prouver avec évidence que le Livre de l’écrivain spirituel dominicain constitue certainement une amplification du Traité du saint réformateur. Pour résoudre cette question compliquée, il faut que de nouveaux documents soient apportés au débat.

L. Wadding, Scriptores ordinis minorum, Rome, 1906, p. 181 ; J.-H. Sbaralea, Supplément/un ad scriptores ordinis minorum, t. ii, Home-, 1921, p. 320 ; Alonso de S. Bcrnardo,

i). v. m.. Vida <lct glorioso son Pedro de Alcânlara, Madrid, 1783 ; Acta sanctorum, octobre 1. rai, Paris-Rome, 1866, p. 023-809 ; Enciclopedia uniuersal ilusirada europeo-americana, t. xlii, p. 1309-1310 ; Nic. Reagan, l’eter of Alcantarc, dans The catholic encgclopedia, t. xi, New— York, 1911, p. 770-771 ; René de Nantes, (). M. Cap., Saint Pierre d’Alcan tara et sainte Thérèse, dans Études franciscaines, t. x, 1903, p. 162-168, 384-394 ; Francisco Ferrando, O. F. M., dans Eco franciscano, 1890, 15 janv., 15 févr., 15 mai, 15 juillet, 15 nov., 15 déc. ; 1891, 15 janv., 15 févr. ; Juste Cuervo, O. P., dans / ; / sanlissimo rosario, 1890, sept, et oct. ; le même, Biografla de Fr. Luis de Granada con wws ariiculos literarios donde se demuestra que et vénérable Padre y no san Pedro <te Alcânlara effet verdadero y unico aulor del « Libro de la oraciôn, Madrid, 1890 ; le même, Ediciôn crilica y eompleta de las obras de fray Luis de Granada, Madrid, 19011908, où au t. x, p. 139-520, est publié Tratado de la oraciôn y meditaciôn recapilado por et Fr. Pedro de Alcânlara ; le même, Fr. Luis de Granada verdadero y ùnico aulor del « Libro de la oraciôn », dans Rivista de archivas, bibliotecas y museos, t. xxii, 1918, p. 293-359 ; le même, Fr. Luis de Granada, verdadero y ùnico aulor del « Libro de la oraciôn ». Estudio crilico de/inilivo. Réplica documenlada a un escrilor francés, Madrid, 1919 ; Ubald d’AIençon, O. M. Cap., Louis de Grenade ou Pierre d’Alcantara, dans Éludes franciscaines, t. xxxv, 1923, p. 198-213, où l’on trouve une bibliographie étendue sur saint Pierre d’Alcantara ; P. Dudon, lions son " Traité de l’oraison », saint Pierre d’Alcânlara a-t-il démarqué Louis de Grenade, dans Revue d’ascétique et de mystique, | t. ii, 1921, p. 384-101, où l’on trouve un bon exposé de la controverse. — Voici, d’autre part, la liste des publications du P. Michel-Ange, O. M. Cap., Le « Traité » de saint Pierre d’Alcantara, dans Éludes franciscaines, t. xxxvi, 1924, p. 63-83, 141-106 ; dans Rivista de archivos, bibliotecas y museos, t. xx, 1916, p. 139-222 ; t. xxi, 1917, p. 145-199, 321-368 ; La caria de Eucherio, dans Estudios jranciscanos, t. xxiii, 1919, p. §1-98 ; Sobre la palcrnidad del « Tratado de or<tciôn y contempluciôn », ibid., p. 241-259 ; A proposito del « Tratado de oraciôn » ; el ampliador, ibid., t. xxiv, 1920, p. 93-113 ; A cada uno lodo y solo lo suyo, ibid., t. xxvi, 1921, p. 86-110 ; La « Ré/ilica documenlada », ibid., p. 401-428 ; Adoclrinando a la « Réplica », ibid., t. xxvii, 1921, p. 106-177 ; t. xxviii, 1922, p. 99-110, 180-185, 342358 ; En solos cinco plieglos impresos, ibid., t. xxx, 1923, p. 101-114 ; Le problème de saint Pierre d’Alcantara, dans Orient, t. vii, 1923, p. 443-451 ; Traité de l’oraison et de la méditation, ibid., p. 469-479 ; Le centenaire du « Traité de l’oraison », 1533-1933, dans Orient, t. xiii, 1929, p. 100-113 ; t. xiv, 1930, p. 24-61, 189-238, 378-421 ; t. xv, 1931, p. 51-100, 170-238, 354-401 ; t. xvi, 1932, p. 59-99 ; Éditions connues du « Traité de l’oraison » de saint Pierre d’Alcantara, dans Orient, t. xiv, 1930, p. 62-82, 239-259, 422-441 ; t. x, 1931, p. 101-118, 239-258, 402-419 ; t. xvi, 1932, p. 100114. — Lor. Pérez, O. F. M, , Informaciôn sobre el « Tratado de la oraciôn y meditaciôn » de san Pedro de Alcânlara, dans Archiva ibero-americano, t. vii, 1917, p. 290-297 ; le même, Esta resuella la cuestion de quién sea et verdadero y ùnico aulor del « Tratado de la oraciôn y meditaciôn », alribuido por unos a san Pedro de Alcânlara y por olros a Fr. Luis de Granada ? ibid., t. xiv, 1920, p. 112-125 ; le même, Doctrina cristiana englosada en la Informaciôn instruida en Coria el 20 deagostode 1559, ibid., t. viii, 1917, p. 310-311 ; le même, La provincia de San José fundada por san Pedro de Alcânlara, ibid., t. xvii, 1922, p. 145-175 ; H. Flurter, Nomenclator litlerarius, t. ii, 3e édit., col. 1571.

Am. Teetæet.

    1. PIERRE ALEXANDRE##


4. PIERRE ALEXANDRE, canne belge

du xvie siècle ; apostat de l’ordre et protestant. Né à Bruxelles de parents patriciens vers 1510 (c’esl à tort que Cosme de Villiers le dit né à Arras ; en plus, de même que Simler, Lelong, etc., il omet soigneu sèment de dire qu’Alexandre apostasia la foi catholique pour se faire protestant), il embrassa la vie carmélitaine au couvent d’Arras, dont il devint plus tard prieur, et prit le doctorat à Paris. Homme de science et excellent prédicateur, il devint chapelain de la reine Marie de Hongrie, sœur de Charles-Quint et gouvernante des Pays-Bas. C’est à la cour de cette princesse, et probablement sous son influence, qu’Alexandre tomba dans le protestantisme, lui I il fut accusé de protestantisme ; Marie de Hongrie soi