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PIERRE’SAINT). IIe EPITRE, CANONICITÉ

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En tout cas, rien n’oblige, dans l’étal actuel de’nos connaissances, à adopter la thèse de ilarnack, et lis arguments de Zahn en faveur de l’indépendance littéraire de la II* Pétri par rapport a l’Apocalypse de Pierre gardent toute leur valeur.

3° Avec les « Antiquités juives « de Josèphe. — On a relevé quelques ressemblances de vocabulaire et de style entre la II* Pétri et les Antiquités juives de l’historien Josèphe ; cf. E.-A. Abbott, The Expositor, IIe sér., t. iii, p. 1 !) sq. ; J. Moiïatt, Introduction to the literature of the New Testament, p. 28-29. Mais il s’agit de coïncidences purement verbales’et vraiment fortuites ; elles ne sont pas telles qu’il faille conclure à la dépendance littéraire de l’un des deux écrits par rapport à l’autre ; elles s’expliquent par ce fait que, .dans les dernières décades du I er siècle, les chrétiens et les Juifs hellénistes usaient d’un même langage. On constate des ressemblances de même nature entre la préface du IIIe évangile et un passage du Contre Apion de Josèphe, i, 10 ; or, ces deux textes sont absolument indépendants au point de vue de la rédaction. Cf. Salmon, Introduction to the New Testament, l re édit., p. 638 sq. ; Chase, toc. cit., p. 814.

IV. Unité et intégrité de l’épître. — Au xviie siècle déjà, Grotius avait émis des doutes sur l’unité littéraire de la II* Pétri ; d’après lui, notre document canonique serait fait de deux lettres, distinctes quant à leur origine, dont la seconde commencerait avec le c. m. Parmi les critiques modernes qui se sont prononcés contre l’unité de l’épître, il faut citer en premier lieu E. Kûhl. D’après lui, ii, 1-m, 1, est une interpolation ; originairement, la lettre ne comprenait que i, 1-21, et iii, 2-18 ; l’allusion à la prophétie, i, 2021, introduisait directement l’exhortation à la méditation « des choses annoncées d’avance par les saints prophètes », iii, 2 sq. ; la partie centrale a été ajoutée après coup par un rédacteur qui s’est inspiré de l’épître de Jude et qui, pour faire la suture, a retouché les versets 1 et 2 du c. ni ; cf. E. Kiihl, Die Briefe Pétri und Judée, dans le Commentaire de Meyer, 6e édit., p. 346 sq.

Cette hypothèse de Kiihl ne saurait être acceptée du point de vue critique pour diverses raisons : 1. Les contacts entre la 11* Pétri et l’épître de Jude ne sont pas limités aux seules péricopes regardées comme primitives. 2. Sous le rapport du style il n’y a aucune différence entre ii, 1-m, 1, et le reste de la lettre comme le prouve l’emploi de part et d’autre des mots àcrr/)ptxTOt, . àrooXsia, TYjpsïv, èvtoA7), s7Ûyvuaiç, YjaÉpx xptoswç, etc. 3. La transition est excellente entre i, 20-21, et ii, 1. 4. Il est bien difficile de séparer le c. m du c. i, car ce sont manifestement les objections présentées au c. i qui se retrouvent au c. ni. 5. Les railleurs dont il est parlé dans ni, 3 sq., sont identiques aux faux docteurs dépeints dans ii, 1 sq. Ces observations, d’une objectivité indiscutable, suffisent à montrer combien est inconsistante l’opinion de Kiihl. Elles ont la même valeur contre toutes les hypothèses qui atteignent l’unité ou l’intégrité de l’épître.

C’est pour mieux réfuter l’opinion de Kiihl que Mgr Ladeuze a émis la supposition de dislocations du texte original avec déplacement de péricopes. D’après Ladeuze, iii, 1-16, se lisait primitivement à la suite de n, 3 a, et les sections différentes de la II 2 — Pétri sont à replacer dans l’ordre suivant : i, L-n, 3 a : iii, 1-16 ; n, 3 6-22 ; iii, 17-18. Voir Transposition accidentelle dans la II* Pétri, dans Revue biblique. 1905, p. 543 sq. Cette reconstitution a sans doute l’avantage de disposer dans un ordre plus logique les développements successifs et de donner à l’épître une cohérence interne plus grande ; mais on doit reconnaître qu’elle est fondée sur une série d’hypothèses aussi gratuites qu’incontrôlables. En effet, la transposition aurait été faite au IIe siècle ; tous les témoins du texte dépendraient du

manuscrit qui aurait souffert de l’accident ; la lettre aurait été rédigée suivant les règles de la logique, etc. Comme, d’une part, tout cela ne saurait être démontré et quc. d’autre part, le raccord de ii, 3 b, avec iii, 10, et de iii, 17, avec ii, 20-22, dans la reconstitution proposée par Ladeuze. est loin de paraître naturel et satisfaisant, il convient de donner la préférence à l’ordre actuel du texte, tel qu’il se présente dans les manuscrits grecs et dans les anciennes versions.

V. Canonicité de l’épître et témoignage de la tradition. — On ne trouve pas de trace certaine de la 11* Pelri dans l’ancienne littérature chrétienne antérieurement à la fin du iie siècle. Les contacts verbaux relevés entre cette épître et Clément Romain, vii, 6 ; ix, 4 ; xi, 1 ; Ilermas, Vis., III, vii, 1 ; Simil., Y, vii, 2 ; IX, iv. I : Barnabe, xv, 4 ; saint Justin, DiaL, li, lxxxi ; saint Polycarpe, Phil., m ; saint Irénée, Cont. hser., Y, xxiii, 2 ; Théophile d’Antioche, Ad Autol., II, ix, 13 ; la lettre des Églises de Lyon et de Vienne, dans Eusèbe, Hist. eccl., t. V, c. i, n. 45, sont trop vagues pour qu’on puisse conclure à une dépendance littéraire directe et penser que les auteurs de ces documents connaissaient la II* Pétri.

Il est très probable, mais non prouvé, que Clément d’Alexandrie ait eu en mains la seconde épître de Pierre. En effet, au dire d’Eusèbe, Hist. ceci., t. VI, e. xiv, n. 1, Clément avait fait dans ses Hypotyposes « des exposés, sous forme de résumés, de toute l’Écriture testamentaire, sans omettre les livres controversés, à savoir l’épître de Jude et les autres épîtres catholiques, celle de Barnabe et l’Apocalypse dite de Pierre ». La même indication se retrouve dans Photius, Biblioth., cod. 109. Or, Eusèbe rangeait la II* Pelri dans la catégorie des « livres controversés > ; cf. ci-dessous. On peut donc tenir pour très probable que Clément connaissait la II* Pétri, bien que Cassiodore paraisse dire le contraire dans un endro.t passablement embrouillé de son commentaire sur les Écritures. De insiit. divin, lilter., viii, 2. Cette conclusion est d’autant plus légitime qu’elle est appuyée par les deux constatations suivantes : d’une part, Clément d’Alexandrie parait s’être inspiré de la II* Pétri en trois ou quatre passages de ceux de ses ouvrages qui nous sont parvenus (pour le détail, voir C. Bigg, op. cit., p. 202) ; d’autre part, son disciple Origène parle explicitement de la IIe épître de Pierre, ce qui prouve que cette lettre était connue de l’Église d’Alexandrie au début du me siècle.

Des anciens auteurs ecclésiastiques, Origène est le premier qui cite explicitement la II* Pétri. Dans son Commentaire exégélique sur l’évangile de Jean on lisait ces lignes, reproduites par Eusèbe : « Pierre, sur qui est bâtie l’Église du Christ, contre laquelle les portes de l’enfer ne prévaudront pas, a laissé une épître incontestée et peut-être une seconde, car la chose est controversée. » Hist. eccl.. t. VI, c. xxv. n. 8. Par ailleurs, il est hors de doute que, personnellement, Origène regardait cette lettre comme étant de saint Pierre lui-même ; cf. In Lev., iv, 4 ; In epist. ad Rom., iv, 9 ; viii, 7.

Saint Firmilien, évêque de Césarée en Cappadoce, contemporain et ami d’Origène, partageait la même opinion, car il a fait allusion à la II* Pétri en parlant « des bienheureux apôtres Pierre et Paul qui, dans leurs lettres, ont maudit les hérériques et nous ont avertis de les éviter ». Inter epist. Cypr., lxxv, 6.

Des attestations du même genre se rencontrent chez saint Méthode, évêque d’Olympe en Lycie, De resurrectione, édition Bonwelsch. p. 423. texte emprunté à Pitra, et chez Didyme d’Alexandrie, .De Trinilale. i. 15, —-.’8. 29.

Quant à Eusèbe, bien informé de tout ce qui intéressait l’histoire des livres canoniques, au moins poulies Églises orientales, il parlait de la II* Pétri en ces