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PIE X. LA RÉFORME DE L’ÉGLISE


Pie X ont eu pour effet de rendre légal et de droit commun ce qui était déjà de pratique courante.

Plus important encore était-ilde codifier la législation ecclésiastique dont les différentes pièces, multipliées depuis des siècles, se trouvaient éparses en une foule de recueils depuis l’antique Corpus juris canoniri jusqu’aux commentaires et aux compilations modernes. Comme le dit fort justement le molu proprio du 19 mars 1904, c’était là une entreprise souverainement ardue, arduum sane muniis, devant laquelle on reculait depuis des siècles et que rendait plus difficile chaque année qui s’écoulait. Le pape en chargea une commission cardinalice dont l’animateur fut Mgr Gaspard, plus tard cardinal. Son zèle infatigable, son ardeur au travail, sa science canonique éprouvée devaient mener à terme, en dix années, cette gigantesque entreprise. Pie X n’eut pas la joie de la voir entièrement terminée, mais en promulguant, à la Pentecôte de 1917, le Codex juris canonici, son successeur, Benoît XV, rendit pleinement hommage à l’initiative si hardie qui en avait permis la réalisation. — La constitution Promulgandi du 29 octobre 1908, instituant un journal officiel du Saint-Siège, qui prit le nom d’Acta apôstolicse Sedis, et commença de paraître le 1 er janvier 1909, compléta d’une manière extrêmement heureuse l’œuvre de codification.

La réforme de l’administration ecclésiastique.


De ce côté aussi, les desiderata se multipliaient depuis longtemps. La curie romaine, en particulier, siège de l’administration centrale de l’Église, avait vu croître au cours des âges le nombre des bureaux, offices, commissions, congrégations, tribunaux dont les compétences et les attributions respectives avaient été à bien des reprises modifiées. Après quelques essais de réformes particulières — motu proprio du 28 janvier 1904, unissant les deux Congrégations des Indulgences et des Reliques à celle des Rites ; motu proprio du 26 mai 1906, supprimant les Congrégations super disciplina regulari et de statu regularium ordinum — on se décida à entreprendre une refonte totale de la curie. Elle fut réalisée par la constitution Sapienti consilio du 29 juin 1908, complétée par la Lex propria romanec Rotæ et Signatures aposlolicæ parue le même jour ; un décret organique du 29 septembre suivant donna les règlements généraux à observer dans les trois organismes entre lesquels se partageait désormais la curie : congrégations, tribunaux et offices. Il est impossible de donner un aperçu sommaire des modifications profondes que cette réforme amena dans la curie romaine. Voir de ceci un excellent résumé dans V. Martin, Les cardinaux et la curie et Les congrégations romaines, Paris, s. d. (1930). Quant à l’esprit général, il est certain que le principe de la centralisation ecclésiastique y triomphe, mais, comme on l’a dit fort justement, « à considérer la réforme en elle-même et dans ses conséquences générales, la réforme semble moins faite pour centraliser que pour organiser une centralisation déjà accomplie ».

On en dira autant des règlements qui furent pris pour faciliter le contrôle de la curie romaine tant sur le clergé régulier que sur le clergé séculier. Pour le premier, voir un décret de la Congrégation des Évêques et Réguliers du 16 juillet 1906 sur le rapport triennal que doivent fournir les chefs des congrégations à vœux simples ; pour ce qui est du second, le décret de la Consistoriale, en date du 31 décembre 1909, donnant aux évêques les directives sur la rédaction des rapports quinquennaux : ordo servandus in relatione de statu ecclesiarum. Sur les précisions ultérieures apportées en 1918, voir l’article Papk, t. xi. col. 191 1 sq. Les règles actuelles sur la nomination dis évêques que l’on verra au même article, col. 1896 sq., ont pris également naissance sous le ponti lient de

Pie X, bien qu’elles aient été complétées par la suite.

3° Les ré/ormes liturgiques. — Elles ont été moins profondes, mais tout aussi radicales.

La plus apparente fut relative à la musique sacrée. Les abus les plus graves, en ce domaine, se produisaient en Italie, où la musique la plus profane sévissait dans les églises. Évêque de Mantoue et patriarche de Venise, Pie X avait essayé de réagir contre cette intrusion ; ce fut aussi une de ses premières préoccupations quand il fut devenu pape. Le molu proprio sur la musique sacrée du 22 novembre 1903 posait les principes généraux, demandait que l’on rendit au chant grégorien (c’est-à-dire au plain-chant) sa place dans les cérémonies liturgiques « tous devant tenir pour certain qu’un ollicc religieux ne perd rien de sa solennité quand il n’est accompagné d’aucune autre musique que de celle-là ». l’ne concession néanmoins était faite à la polyphonie classique, tout spécialement à la musique palestinienne que, pour les besoins de la cause, on disait « toute proche du chant grégorien », et qui ne pouvait guère perdre droit de cité à la Chapelle pontificale. Ce souci de rétablir le plain-chant dans ses droits obligeait, dès lors, à procurer une édition typique de ce chant, édition à laquelle travaillèrent les bénédictins de Solesmes, qui, depuis plus de dix ans déjà, s’étaient efforcés de remonter aux mélodies originales. Lettre du 14 février 1904 à dorn Pothier ; motu proprio du 25 avril 1904, de Yalicana editione librorum liturgicorum concentus gregorianos re/erenlium ; décret du 8 avril 1908 sur l’édition typique du graduel romain. Peut-être y eut-il en tout ceci un peu de hâte et tout le monde, même au sein de la commission préparatoire n’était pas d’accord. Mais le pape imaginait aisément que les questions, mêmes celles d’art et d’érudition, se tranchaient par voie d’autorité. Du moins eut-il le mérite de faire aboutir par des actes, quelquefois un peu impératifs pour la matière et qui confondent assez facilement unité et uniformité, une restauration du chant grégorien qui, ailleurs qu’en Italie, était déjà bien avancée quand il prit le pouvoir.

Par contre, la réforme du bréviaire représente très certainement une de ses pensées personnelles. Elle fut définitivement réalisée par la constitution Divino afflatu du 1 er novembre 1911, complétée par un motu proprio du 23 octobre 1913, relatif aux « propres diocésains », lui-même interprété par un long Decretum générale de la Congrégation des Rites en date du 28 octobre. On sait quel est l’esprit de la réforme : remettre en honneur la récitation hebdomadaire du psautier que la multiplication des fêtes, aux dépens des fériés, avait rendue de plus en plus rare. Une heureuse combinaison fut trouvée qui associa le férial et le sanctoral d’une manière très neuve et permit, tout en gardant la célébration des fêtes sur semaine, d’assurer la récitation, en temps ordinaire, de l’office férial. L’allégement du calendrier festival, la suppression de toutes les fêtes que l’on avait jadis fixées au dimanche pour éviter la récitation de l’office dominical vraiment trop chargé, mais que le nouveau psaulier ramenait à des dimensions raisonnables, des mesures analogues prises pour les calendriers diocésains, achèvent de donner au bréviaire de Pie X son caractère spécial, qui en fait quelque chose de très nouveau. Les indispensables modifications qu’exigeait le légendaire ne purent être aussi rapidement exécutées. Nous avons dit les raisons d’ordre intime qui devaient paralyser la réforme. Des tiraillements qui durent avoir lieu au sein de la commission consultative chargée d’y pourvoir, on peut surprendre quelque trace dans le motu proprio « Quanta semper cura" du 16 janvier PU 4, qui supprime définitivement cette commission et d’autres, pour en reverser les membres à la Congrégation des Rites.