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PIK X. LUTTE CONTRE LE MODERNISME

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vention, si continue, au cours de cinq années, dans les affaires de France, palissent les autres manifestations de sa politique extérieure. L’encyclique Jamdudum in Lusitania, du 21 mai 1911, flétrit en des termes fort véhéments la séparation de l’Église et de l’État, effectuée en Portugal à la suite de la proclamation de la République et qui, de fait, s’accompagna de violences qui furent épargnées à notre pays. Cette protestation fut renouvelée dans l’allocution consistoriale du 21 novembre de cette même année, et dans une longue lettre adressée au patriarche de Lisbonne le I er mars 1913. — Quelques nuages s’élevèrent entre le Saint-Siège et l’Allemagne à la suite de l’encyclique Editai semper du 2(5 mai 1910, à propos du troisième centenaire de la canonisation de saint Charles Borromée. L’Allemagne protestante s’insurgea contre le portrait, tracé par l’encyclique, des premiers réformateurs, et l’on put craindre un instant quelque éclat de la part du gouvernement impérial. — Les États de l’Amérique latine donnèrent également quelques préoccupations au pape : la Bolivie spécialement, qui entendait proclamer la liberté des cultes, la suppression de l’immunité judiciaire des ecclésiastiques, l’obligation du mariage civil. Voir lettre aux évêques de Bolivie du 24 novembre 1906. Un incident assez pénible eut lieu au Chili, dans l’été de 1913, causé par quelques imprudences de l’internonce ; le conflit fut vite aplani d’ailleurs. Voir lettre aux évêques du Chili du 22 août 1913.

— Avec l’Italie, Pie X maintint, au moins extérieurement, l’attitude intransigeante de son prédécesseur ; on a dit la position prise par son secrétaire d’État lors du voyage à Rome du président Loubet. Quelques incidents, toutefois, marquèrent que l’on se rapprochait insensiblement du point de vue qui allait bientôt prévaloir dans les rapports de l’Italie et du Saint-Siège.

III. Le gouvernement intérieur de l’Église. La lutte contre le modernisme. — Interférant avec les questions politico-religieuses, s’y mêlant jusqu’à un certain point, y trouvant à plus d’une reprise de nouvelles raisons d’agir, le mouvement réformiste catholique que l’on a désigné sous le nom de modernisme se trouva accaparer, et jusqu’aux derniers moments, une très grande part de l’activité de Pie X. L’essentiel sur tout ceci a été dit à l’article Modernisme, t. x, col. 2029-2041. Nous voudrions simplement marquer ici l’ordre dans lequel les actes se suivirent, destinés dans la pensée du pape, soit à juguler l’erreur elle-même, soit à promouvoir, dans la pensée chrétienne, les réactions jugées indispensables.

Mesures de condamnation.

Voici l’ordre dans

lequel se succédèrent les condamnations en provenance du gouvernement central de l’Église.

23 décembre 1903 : décret de la Congrégation de l’Index proscrivant les ouvrages de A. Houtin, La question biblique chez les catholiques de France au xixe siècle, et de A. Loisy, La religion d’Israël, L’Évangile et V Église, Études évangéliques, Autour d’un petit livre, Le IVe évangile. — 5 avril 1906, décret de la même Congrégation condamnant : P. Viollet, L’infaillibilité du pape et le « Syllabus », L. Labérthonnière, Essais de philosophie religieuse et Le réalisme chrétien et l’idéalisme grec ; A. Fogazzaro, // Santo. — 2cS juillet 1906, encyclique Pieni l’animo, qui vise surtout l’action populaire italienne, mais ne laisse pas d’exprimer les inquiétudes du pape sur les nouveautés ri’ordre intellectuel. —. Il décembre 1906, décret de la Congrégation de l’Index condamnant A. Houtin, La question biblique au XXe siècle. — 29 avril 1907, lettre de la même Congrégation au cardinal Ferrari, archevêque de Milan, au sujet du périodique italien // rinnovamento ; la Congrégation exprime « le dégoût qu’elle a éprouvé de voir publier, par de soi-disant catholiques, une revue notoirement opposée à l’esprit et à l’ensei gnement catholiques », déclare combien » il est douloureux de voir figurer parmi ceux qui semblent vouloir s’arroger un ministère dans l’Église et faire la leçon au pape lui-même, des noms déjà connus par d’autres écrits animés du même esprit, comme Fogazzaro, Tyrrell, von Hùgel, Muni et d’autres ».

Le 3 juillet 1907, publication par le Saint-Office du décret Lamentabili sane exila, bientôt suivi, le 8 septembre 1907, par l’encyclique Pascendi. Ces deux actes tendent à préciser quelles sont les erreurs du modernisme, et organisent la répression du mouvement. Ils sont confirmés par le molu proprio Præstantia, du 18 novembre, qui, en dehors d’une déclaration relative aux décisions de la Commission biblique (voir ci-dessous, col. 1728). décrète que « si quelqu’un avait assez de témérité pour défendre n’importe laquelle des propositions, opinions et doctrines réprouvées dans l’un ou l’autre des documents en question (Lamentabili et Pascendi), il encourrait ipso facto la censure portée par le chapitre Docentes de la constitution Aposlolicse Sedis, laquelle censure est la première des excommunications latie sententite réservées au pontife romain », sans préjudice des peines « que peuvent encourir ceux qui se seront opposés en quelque manière aux susdits documents en tant que propagateurs et fauteurs d’hérésie, lorsque leurs propositions, opinions ou doctrines seront hérétiques, ce qui, à la vérité, est arrivé plus d’une fois aux adversaires de ces deux documents, surtout lorsqu’ils se sont faits les champions du modernisme, c’est-à-dire du rendez-vous de toutes les hérésies ». — Sur cette question, le pape revient encore dans l’allocution consistoriale du 16 décembre 1907, où, après avoir exposé les mesures prises par lui au cours de l’année, il proteste contre les subtils raisonnements par lesquels certains de ceux qui ont été frappés déclarent que les condamnations portées ne les concernent pas et contre l’insolent orgueil de ceux qui ont ouvertement résisté. Ce dernier passage doit viser Tyrrel : de fait, celui-ci avait été averti, le 22 octobre 1907, que, le pape consulté, il était privé des sacrements (on évita de parler d’excommunfeation), à raison des deux lettres de protestation contre l’encyclique publiées dans le Times (30 septembre et 1 er octobre). Cette mesure faisait prévoir celle qui n’allait pas tarder à frapper A. Loisy ; on attendit néanmoins qu’il eût fait acte positif d’insubordination et ce fut seulement après la publication par lui, en janvier 1908, des Évangiles synoptiques et des Simples réflexions qu’il fut excommunié nommément et déclaré vitandus par le Saint-Ofhce (7 mars 1908).

Un certain nombre de condamnations moins retentissantes frappèrent en ce temps-là divers ouvrages, jugés suspects de complaisance à l’endroit des idées nouvelles : 26 juillet 1907. décret de la Congrégation de l’Index condamnant E. Dimnet, La pensée catholique dans l’Angleterre contemporaine ; Ed. Le Roy, Dogme et critique ; Jean Le Morin, Vérités d’hier ? La théologie traditionnelle et les critiques catholiques ; A. Houtin, La crise du clergé et enfin le Cœnobium, rivista internazionale di liberi studi, années 1906 et 1907. Sur la liste des auteurs condamnés ce jour-la figurait également P. Batifîol, pour ses Éludes d’histoire et de théologie positive, IIe série, L’eucharistie, la présence réelle et la transsubstantiation (le décret ne fut d’ailleurs publié que le 2 janvier 1911). — 17 mars 1908, condamnation du livre de P. Bureau, La crise morale des tempsnouveaux.

On constate ensuite un certain ralentissement dans les proscriptions d’ouvrages. Mais celles-ci reprennent en 1911. Le 12 juin, A. Humbert voit inscrire à l’Index Les origines de la théologie moderne. Le 1 er septembre, une lettre signée du cardinal de Lai’, président de la