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PIE VII. LA RÉORGANISATION DE L’ÉGLISE


rien faire en l’absence de Pie VII. Au reste, celui-ci devait bien vite rentrer dans sa capitale, lorsque Waterloo eut brisé les espérances de Napoléon et celles de Murât L’article 1015 du traité de Vienne, négocié par Consalvi, assura la restitution au pape de tous ses États, à l’exception de la partie de la Légation de Ferrare, sur la rive gauche du Fô, qui demeurait aux mains de l’empereur d’Autriche, lequel avait, en outre, droit de garnison à Ferrare et Comacchio.

III. FlE VII ET I.A HÉOHOANISATION DE 1, ’ÉgLISE. —

Cette fois, c’était bien l’ère de la restauration qui s’ouvrait, tempérée à Rome par un esprit de véritable charité : de fait, Fie VII accueillait dans ses Etats non seulement Lucien, duc de Canino, mais le cardinal Fesch, mais’Madame Mère : il délivrait le cardinal Maury, arrêté le 12 mai sur l’ordre des autorités pontificales, et enfermé au château Saint-Ange. Au consistoire du 4 septembre 1815, exposant les derniers événements, il ne craignait pas d’adresser l’expression de sa gratitude au tzar, aux rois de Prusse et de Suède, de protester contre l’occupation de Ferrare et d’envisager une compensation pour Avignon, gardé par la France, sans d’ailleurs désigner nommément le Comtat.

Si le gouvernement de Louis XVIII ne paraissait pas disposé à restituer Avignon, le Saint-Siège semblait disposé à accepter, en vue d’une réorganisation de l’Église de France, les directives que le duc de Richelieu, ministre des Affaires étrangères, chargeait le duc de Blacas, nouvel ambassadeur à Rome, d’y soutenir (mai 1816). Quelques difficultés surgissaient également du côté du royaume de Naples, à l’occasion du tribut de la haquenée, que Ferdinand de Bourbon ne voulait pas reconnaître, et de Bénévent et Ponte-Corvo qu’il ne voulait pas restituer. Mais, pour répondre aux engagements de Consalvi à Vienne, Pie VII publiait, le 6 juillet 1816, un motu proprio pour la réorganisation administrative de ses États, et il est intéressant de noter que l’influence de l’administration napoléonienne se fait certainement sentir dans ce document.

Le nouveau concordat français, signé par le pape le 25 août 1816, fut retourné par Pie VII le 6 septembre, avec une lettre où le chef de l’Église stigmatisait ceux des évêques anciens constitutionnels qui, selon lui, avaient « reproduit les erreurs auxquelles ils avaient paru renoncer », en même temps que les titulaires d’avant 1801 qui n’avaient pas donné leur démission. Le gouvernement français, de son côté, aurait désiré obtenir la démission de tous les évêques concordataires, pour procéder à une nomination générale, de sorte que l’idée préconisée par le duc de Blacas de ne pas tenir compte de la convention du 25 août gagna du terrain et, à la suite de nouvelles négociations, Blacas et Consalvi signèrent, le. Il juin 1817, une nouvelle convention, connue sous le nom de Concordat de 1817, et qui fut confirmée par une bulle pontificale du 19 juillet, elle-même complétée par une bulle de circonscription pour 90 diocèses.

Ce concordat avec la France rentre dans la politique générale suivie par Consalvi et tendant à affirmer partout l’action du Saint-Siège. Ainsi avaient été signés, avec l’Autriche, plusieurs traités relatifs à l’organisation du clergé, à la vente des biens ecclésiastiques, à la navigation du Fô (janvier 1817) ; un concordat avait été conclu, en août 1817 encore, avec le Piémont, et le 28 janvier 1818 il en fut signé un autre avec la Russie pour la Pologne ; de même le 16 février 1818, avec le royaume des Deux-Siciles. Mais le texte arrêté par Blacas et Consalvi ne put avoir en France force de loi. Le nouveau ministère libéral ne pouvait accepter ce qui avait été arrêté, et décida d’envoyer à Rome, pour reprendre la négociation, le fils de Portalis lui-même. En réalité, il était impossible

qu’elle pût désormais aboutir et, au consistoire du 23 août 1819, le pape expliqua que le concordat de 1817 ne pouvait être exécuté et que les archevêchés et évêchés fondés en 1801 resteraient administrés par leurs titulaires ; du moins, en 1822. la nouvelle circonscription, comprenant 80 diocèses, fut-elle déterminée par une bulle de Pie VII ; ainsi se trouvait consolidée l’une des grandes réalisations de Napoléon. Voir l’art. Concordat, col. 777 sq.

Si, du côté de la France, Pie VII n’était pas parvenu à corriger ce qui, dans les textes de 1801, pouvait, en

1819, lui paraître contraire à ses vues, il n’obtenait point, non plus, de la part des autres princes chrétiens, toutes les garanties qu’il pouvait croire indispensables. A cette époque, le bruit courait que l’empereur d’Autriche, le grand-duc de Toscane, le roi des Deux-Siciles avaient des vues sur telle ou telle partie des États pontificaux. Du moins, ces rumeurs provoquaient-elles le désir, de la part des autorités pontificales, de gouverner le mieux possible ces États. Par ailleurs, le Saint-Siège entretenait des relations excellentes avec les princes protestants d’Allemagne, qui avaient préparé une Déclaration pour régler le sort des catholiques de la Confédération germanique ; le concordat avec la Prusse, signé au début de 1821 fut l’un des résultats de cette négociation.

La santé du pape, médiocre depuis au moins cinq ans, inquiétait son entourage, au moment où des événements graves bouleversaient à nouveau la péninsule. La révolution de Naples ne pouvait manquer d’avoir des conséquences de toute espèce. Dès juillet

1820, Bénévent et Ponte-Corvo avaient été repris au pape ; il était question d’une offensive des Autrichiens contre les Napolitains et, dans cette éventualité, on songea, en février 1821, à faire partir Pie VII pour Cività-Vecehia, mais ce voyage n’eut pas lieu, les Autrichiens étant passés près de Rome pour descendre contre les révolutionnaires napolitains. Après le retour de Ferdinand I er, à Naples, Bénévent et Ponte-Corvo furent une nouvelle fois restitués au pape. La bulle du 13 septembre 1821 contre le carbonarisme marque à la —fois la fin de la fièvre révolutionnaire et l’étendue de l’action autrichienne en Italie.

Pie VII avait, après la crise de 1821, peu de temps à vivre. Plusieurs chutes du vieillard avaient inquiété son entourage dans les années précédentes ; il en fit encore une, le 6 juillet 1823, se cassa le col du fémur et, s’étant affaibli progressivement, il mourut au matin du 20 août 1823, à l’âge de 81 ans, après un règne de plus de 23 ans.

Le pontificat de Pie VIL qui a duré plus longtemps que ne pouvait le faire prévoir la faible résistance physique du cardinal Chiaramonti, a mis en lumière à la fois la charité inépuisable d’un prêtre qui a su pardonner totalement à son persécuteur, mort deux ans avant lui à Sainte-Hélène, et aussi la faiblesse d’un homme qui, assis sur la chaire de Pierre, a pu hésiter sur la meilleure méthode à suivre pour réaliser le bien de l’Église et la paix du monde. Ainsi s’explique, en ce qui concerne la France seulement, les trois concordats de 1801, 1813 et 1817. Du moins, en ces diverses circonstances essaya-t-il de sauver les principes, et. s’il lui arriva de s’abandonner, il sut exprimer son repentir avec la plus méritoire humilité. Si la préoccupation française a été essentielle pour Pie VII, ce pape n’a cependant point négligé l’ensemble du monde chrétien, surtout quand l’Europe a cessé de s’identifier avec la France. Ainsi s’explique l’œuvre concordataire des années de la restauration. Mais la restauration n’a pas été totalement, pour Pie VII, la Sainte-Alliance : il a pu condamner le carbonarisme, responsable de la révolution napolitaine, mais il ne s’est pas soumis à la volonté de l’Autriche de s’imposer à l’Italie. Dans