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PIK VI. L’ANCIEN RÉGIME

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3° L’Allemagne. Le schisme hollandais trouvait des sympathies on Allemagne, où le sufîragant de Trêves. Hontheim, venait de susciter des curiosités,

des critiques et des adhésions par la publication de son livre De statu pressenti Ecclesise (1763), sous le pseudonyme de Fébronius. Pour le détail, voir l’art. Fébro-HIUS, t v. col. 21 1.").

L’archevêque-électeur de Trêves avait essayé de faire condamner le livre à Paris, par l’Église gallicane (décembre 177.")) : du moins obtint-il. en 1778, la soumission de l’auteur qu’on était parvenu à découvrir, cl Hontheim envoya même à Pic Y 1, 1e 1 er novembre 1778, sa rétractation pleine et entière. Celle-ci, publiée au consistoire du 25 décembre 1778, souleva naturellement l’indignation des partisans d’une réforme de l’organisation ecclésiastique, et particulièrement de la Gazette d’Utrecht, et l’on répandit le bruit que Hontheim n’avait cédé qu’aux menaces et aux violences. De fait, le versatile Hontheim, d’ailleurs fort âgé, affirme ce point de vue dans une lettre qui circula dans nombre de milieux, ce qui ne l’empêcha pas de renouveler sa rétractation par une déclaration adressée a son archevêque le 2 avril 1780. Seulement, dans un ouvrage imprimé en cachette à Francfort, sous le titre de Commentaire sur ma rétractation, Hontheim reprenait un grand nombre de ses erreurs, dont trente-huit furent données à examiner par Pie VI au cardinal Gerdil. barnabitc. qui les trouva d gnes de censure. Néanmoins, le pape se contenta d’inviter l’électeur de Trêves à admonester Hontheim. Mais l’électeur fit comprendre à Pie VI qu’il était impossible d’obtenir davantage de Hontheim. lequel, en effet, vécut jusqu’à sa mort (1790) sans être l’objet de nouvelles tentatives de réconciliation.

Les idées fébroniennes, parmi leurs multiples effets, eurent, en particulier, celui de préparer l’ambiance, où se développa une tendance non moins inquiétante pour la papauté, à savoir le joséphisme. Voir art. JosÉ-PHISME, t. viii, col. 1543. L’Autriche, où Marie-Thérèse n’avait cessé d’affirmer ses sentiments de profond respect à l’égard de Rome, devait, à la mort de cette princesse (29 novembre 1780). changer d’orientation avec son nouveau maître, Joseph II. Déjà comme associé au gouvernement de sa mère, Joseph II avait, par quelques actes, marqué son goût pour les réformes d’ordre ecclésiastique à réaliser par le pouvoir laïque. Désormais, seul maître des États héréditaires, il va mettre en pratique ses principes, qui sont peut-être davantage ceux de ses ministres Kaunitz et Cobenzl, l’un et l’autre imbus d’esprit philosophique, aidé à Rome même par son ambassadeur, le cardinal Herzan. Dès le début de son règne, Joseph II veut enlever au pape la collation exclusive des bénéfices autrichiens, et toute une correspondance délicate s’engage à cet égard. Le 4 septembre 1781, il publie une nouvelle loi relative aux dispenses matrimoniales, qu’on ne doit >"tnais plus demander à Rome, mais aux Ordinaires autrichiens. C’est l’occasion d’une nouvelle correspondance entre Rome et Vienne par l’intermédiaire du nonce Garampi. Si quelques prélats autrichiens, et en particulier l’archevêque de Vienne, restent fidèles aux traditions romaines, une grande partie de la haute Église allemande, et particulièrement les électeurs de Mayence. Trêves et Cologne, désireux d’indépendance et pour autant hostiles à la primauté du Saint-Siège, soutiennent la politique de Joseph 11. Celle-ci s’accentue pourtant ; il ne s’agit bientôt plus du droit d’accorder des dispenses ; d s couvents sont supprimés, leurs membres sécularisés, la mainmorte traquée. Pic Y I s’inquiète et. malgré la confiance qu’il a dans le caractèreet l’habileté de son nonce à Vienne, décide d’aller conféreren personne avec Joseph II. Malgré l’opposition de Kaunit », malgré les déclaration, décou rageantes de l’empereur, malgré les avis hostiles des cours d’Europe, il part pour l’Autriche le 26 février 1782,

Peu de semaines auparavant avait paru à Vienne, anonyme, un livre contre la primauté pontificale, sous le titre Quid est papa’.' C’était l’ouvrage d’un professeur de droit canonique, autorisé par la censure imj criale, Eybel, et son apparition coïncidait singulièrement avec la démarche du pape. Joseph II, cependant, cachait son jeu, partait au devant de Pie VI, qu’il rencontrait le 22 mars à peu de distance de Neustadl. Surtout Kaunitz s’efforçait de maintenir, dans les mémoires qu’il adressait à son maître, les points de vue affirmés dès l’abord par l’empereur touchant les serments des évêques au pape, les dispenses des vœux religieux, les dispenses en matière matrimoniale, le placet royal imposé aux actes du SaintPère, la suppression de certains ordres contemplatifs, l’indépendance des ordres religieux à l’égard de leur général résidant hors d’Autriche. Cobenzl, de son côté, assurait à Joseph II, le 28 mars 1782 : « En tout, il paraît que le pape en veut personnellement à V. M. » L’un et l’autre faisaient bonne garde auprès de Joseph II qui obtint du pape une discussion par écrit des questions controversées. Le 22 avril, Pie VI quittait Vienne, se rendant d’abord, sur l’invitation de l’électeur de Trêves, à Munich, et reprenant ensuite la route d’Italie. Il était à Rome le 13 juin, ayant évité la rupture avec Joseph II, affirmant même, dans le consistoire secret du 23 septembre, qu’il avait « obtenu de sa justice certaines choses importantes », tandis que, de son côté, Joseph II prétendait qu’il n’avait rien accordé, ou presque rien, au pape. De fait, en dehors d’une petite concession en matière de placet royal, Joseph II demeurait intraitable, continuait à proscrire de nombreux ordres religieux de ses États, à prendre en matière liturgique des initiatives de toute espèce.

A la fin de 1783, Joseph II vint à Rome rendre sa visite au pape, sous le nom de comte de Falkenstein. Il ne devait rien sortir d’utile pour le Saint-Siège de ce voyage, que l’empereur poursuivit, se rendant à Naples, dans le dessein de détacher le roi, son beau-frère, de l’alliance française. Mais, de retour en janvier 1784, il écrivit au prince Kaunitz qu’il avait passé avec le Saint-Père une convention heureuse touchant les évêchés et une partie des cures de Lombardie.. Il laissait son ambassadeur, le cardinal Herzan, liquider les négociations en suspens et, à son retour à’Vienne, il imposa la barette au nonce Garampi, créé cardinal dans le consistoire de 1785, et remplacé à la nonciature par Mgr Caprara.

Ce n’est pas au joséphisme ni au fébronianisme proprement dits que se rattache l’affaire des nonciatures et, cependant, il se révèle dans celle-ci, de la part des grands prélats allemands, un souci d’indépendance fort inquiétant pour le Saint-Siège : les électeurs de Trêves, de Mayence et de Cologne, l’archevêque de Salzbourg, contestèrent en effet à Pie Vf le droit de créer à Munich la nonciature qui lui avait été demandée par l’électeur palatin Charles-Théodore (1785). S’appuyant sur l’autorité de Joseph II, « protecteur suprême de la constitution de l’Église germanique ». ils demandèrent la cassation de l’acte en question, essayant d’entraîner dans leur cause, le cardinal de Hohan, évêque de Strasbourg, et le prince-évêque de Liège. L’attitude ferme de Pie Y I amena les révoltés à se réunir auprès de Coblentz, à Ems, le 25 août 17811. el les vingt-trois articles de la Punctatio d’Ems définirent la doctrine des prélats allemands. L’affaire devait Irai lier jusqu’à la veille de la Révolution, nourrie surtout des ressentiments de l’électeur de Cologne, frère d< Joseph II. Le pape précisa les vues de l’Église dan un bref du 1 I novembre 1789, dans un exposé général sur la question des nonciatures et dans une lettri envoyée à l’archevêque de Cologne. Les électeurs de