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PIE V. LA RÉFORME DE L’ÉGLISE

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4° En Espagne. Pie V n’avait pas à y développer le zèle contre l’hérésie, il aurait eu plutôt à le modérer, mais il dut se préoccuper « les Pays-Bas. Charles-Quint avait porté des édils rigoureuje contre ceux qui ose raient introduire dans les Flandres les doctrines de Wittemberg et de Genève », ce qui n’avait pas empêché le protestantisme d’y conquérir des adeptes. Ceux-ci, sous la conduite de Guillaume de Nassau, préparaient une rébellion qui atteindrait à la fois L’Espagne et le SaintrSiège. Pic V conjura Philippe II de passer aux Pays-Bas pour une action immédiate et décisive. Le roi jugea plus facile d’y envoyer le duc d’Albe, Ferdinand Alvarez de Tolède. La méthode du nouveau gouverneur fut si sanglante que les catholiques la désavouèrent et en pâtirent. La lutte perdît désormais son caractère confessionnel et devint une résistance des Flamands contre la tyrannie espagnole. Le duc d’Albe ayant battu séparément les deux frères Guillaume et Louis de Nassau (mai et septembre 1568) annonça ces succès comme des victoires religieuses, si bien que le pape fit chanter un Te Deum à Saint-Pierre et lit envoyer au vainqueur une épée d’or ornée de cette inscription : Accipe sanctum gladium, munus a Deo, in quo dejicies adversarios populi mei Israël. Mais, plus tard, informé par les évêques d’Ypres, de Gand et de Bruges, du rôle tout politique du gouverneur et de l’influence néfaste du « Tribunal du sang », le pape conjura Philippe II de donner d’autres ordres à son représentant. Le roi dut regretter plus tard de ne pas avoir tenu compte aussitôt de ces sages conseils. 5° L’affaire de Baius.

L’enseignement de Baius

à l’université de Louvain avait suscité des plaintes, au point que la Sorbonne dut censurer 18 propositions extraites de ses œuvres (27 juin 1560) ; la question ayant été déférée au Saint-Siège (1566), Pie V procéda d’abord avec de grands ménagements puisqu’il ne nommait personne dans sa bulle Ex omnibus afflictionibus (1 er octobre 1567) qui condamnait près de 80 propositions. Cependant, Baius se plaignit d’avoir été condamné sans avoir été entendu et pour des opinions qu’il ne professait pas. Pendant que Granvelle et son vicaire général, Morillon, le comblaient d’égards, il adressa au pape un plaidoyer presque comminatoire (8 janvier 1569) et rédigea une apologie destinée au cardinal Simonetta. Les esprits s’échauffaient, les cordeliers de Louvain annonçaient le retrait imminent des censures. Un acte de fermeté semblait nécessaire. Un bref pontifical du 13 mai 1569 obligeait Baius à se soumettre. « Tout bien considéré, disait le pape, nous jugeons que nous n’avions point porté encore notre décret sur cette doctrine, il le faudrait faire, comme en effet nous le faisons de nouveau. Aussi nous vous imposons, et à tous les protagonistes desdites erreurs, un silence perpétuel avec défense de les avancer et de les soutenir. »

Baius tenta d’épiloguer, refusa d’abord à Morillon une rétractation formelle. Il ne fallut pas moins qu’un concile national et les instances réitérées du duc d’Albe et du pape pour le décider à signer avec ses collègues un acte de soumission (29 août 1571). Voir l’art. Baius’t. ii, spécialement col. 47 sq. ; pour l’étude dogmatique de la bulle, col. 64-111.

II. La réforme de l’Égltse. — L’activité de Pie V fut prodigieuse, comme on en peut juger par les centaines de pièces du bullaire. Maximilfen se plaignait que « le pape entreprit tous les jours quelque chose de nouveau ».

Régénération du clergé.

Il édicté nombre de

règlements ; la simonie est interdite sous peine d’excommunication, de déchéance, même de peines corporelles ; il défend aux clercs les spectacles, les jeux, les banquets publics, l’accès des tavernes. Il s’oppose énergiquement à l’empereur Maximilien qui’croit trouver le

remède à la crise religieuse dans la suppression du célibal ecclésiastique, cf. ci-dessus a l’art. Pie IV, col. 1616. Il lutte contre le fléau des commendes qui désolait alors l’Église. Il impose la résidence aux évoques : les délinquants, dans le délai d’un mois, seront privés de leur litre. Il veille au choix des évêques et refuse de ratilier le choix des chanoines d’Alhcrstadt qui ont élu un enfant de six ans, proche parent du duc de Brunswick, ou de ceux de Freising qui ont nommé Ernest, fils du duc de Bavière, âgé de onze ans. Par contre, il sait défendre les évêques quand ils sont injustement attaqués ; l’inquisition espagnole détenait en prison l’archevêque de Tolède, Barthélémy de Carranza sous l’inculpation d’hérésie ; Pie V obtient que le prévenu soit jugé à Borne (décembre 15(16). Le procès ne sera d’ailleurs conclu que sous Grégoire XIII. Voir l’art. Miranda. Il presse aussi les évêques d’instituer des séminaires pour la formation des clercs, il en fonde un, lui-même, à Locarno.

Congrégations romaines.

Il organise la Pénitencerie,

il fonde deux commissions cardinalices pour la conversion des hérétiques et des infidèles (15 68). première ébauche de la future Congrégation de la Propagande ; il crée la Congrégation de l’Index pour s’opposer à la dilîusion des mauvais livres. Pie IV avait fondé la Congrégation chargée d’exécuter les résolutions du concile de Trente ; il augmente ses privilèges et lui concède de prononcer sur les cas simples, se réservant l’examen des alïaires complexes.

Étude de la théologie.

Le concile de Trente

avait demandé la rédaction d’un exposé clair, succinct et intégral de la doctrine chrétienne.

Jean Dietenberger et saint Canisius avaient composé des catéchismes populaires. Le pape voulut un ouvrage officiel et en confia la rédaction aux trois dominicains Léonard de Marinis, Gilles Foscarari, évêque de Modène et François Foreiro, aidés du secrétaire de saint Charles Borromée, le docte Pogiani. Il suivit de près leur travail, le fit examiner par diverses commissions et le fit paraître en un volume in-4° de 359 pages sous ce titre : Catechismus ex decreto concilii Tridenlini ad parochos, PU Quinti Pont. Max. jussu editus (septembre 1566). Le pape pressait les évêques de le faire enseigner ; dans une bulle du 6 octobre 1571 il invitait l’épiscopat à ériger des confréries de catéchisme. L’ouvrage fut traduit en plusieurs langues pour en favoriser la diffusion.

Le pape fit publier, en 1570, une édition complète des œuvres de saint Thomas d’Aquin en 17 volumes, d’après les manuscrits conservés au Vatican. Il n’épargna ni soins ni dépenses pour que cette édition fût la plus exacte, la plus correcte et la plus parfaite de toutes ; les plus habiles théologiens y travaillèrent sous la direction du P. Vincent Justiniani, général des frères prêcheurs et de Thomas Mauriquès, maître du Sacré Palais. Il déclara saint Thomas docteur de l’Église . Il août 1567) et obligea les universités à enseigner la Somme théologique.

4° Ré/orme liturgique. — : Pie IV avait chargé une commission cardinalice d’aviser à l’institution d’une musique sacrée conforme aux décisions conciliaires. Pie V nomma Palestrina maître de la chapelle pontificale et encouragea puissamment ses efforts.

1. Bréviaire.

Le concile de Trente n’avait pas eu le temps de réaliser cette réforme désirée de tous. Pie V publia la bulle Quod a nobis (9 juillet 1568) où il ennuierait les raisons de la refonte et les principes qui la dirigèrent. Seules seraient dispensées les églises ou monastères qui posséderaient, depuis deux cents ans au moins, un bréviaire approuvé par le Siège apostolique. Le nouveau bréviaire parut en novembre. Les psaumes graduels, l’office des morts, l’office de la sainte Vierge étaient désormais facultatifs ; l’office