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PIE IV. CONCESSIONS A L’EMPIIU.

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une vive opposition à la curie, pour obtenir que Ferai nand I er accepte de clore des débats redoutables à l’autorité pontificale et de terminer le concile, Pie 1 V s’engage à concéder ce que ne cessent de réclamer les cours de Vienne et de Munich, appuyées par la France. (Voir G. Constant, La légation du cardinal Morone près l’empereur et le concile de Trente, avril-décembre 1563, Paris, 1922, p. 195 sq., 218 sq., 224sq., 309, n.l2 ; p.330, n. 13 ; p.335, n. 1 : du môme, Concession à l’Allemagne de la communion sous les deux espèces, p. 161-486.) Après l’avis de quelques cardinaux de confiance, tenus au secret sous peine d’excommunication, et à l’insu de Philippe II et de ses ambassadeurs, il accorde, par divers brefs, le 16 avril 1564, la communion sous les deux espèces à l’Allemagne, à l’Autriche, à la Bohême, à la Hongrie’, et, quelques mois plus tard, à la Styrie, à la Carinthie et aux pays voisins. G. Constant, Concession à l’Allemagne de la communion sous les deux espèces, c. vi. Il semble bien que, là où elle fut exécutée libéralement et conformément aux dispositions pontificales, la concession du calice ait eu de sérieux, bons et larges effets. Ferdinand, Maximilien II, le nonce, les évoques de l’empire l’affirment à maintes reprises. Mais la façon dont elle fut appliquée sous les successeurs de Pie IV, qui lui étaient contraires, nuisit à sa durable efficacité (ibid., c. vu : « Application et effets de la concession » ). On ne visait d’ailleurs, à Rome, après Pie IV, qu’à sa suppression d’une façon indirecte. Elle subsista néanmoins et assez répandue, en Bavière jusqu’en 1571, dans le reste de l’Allemagne et en Autriche jusqu’en 1584, en Hongrie jusqu’en 1604, en Bohême jusqu’à la victoire de la Montagne-Blanche, 1621 (ibid., c. vin).

En France, nos histoires générales continuent à ignorer la concession de Pie IV. C’est saint Charles, selon M. F. Mourret (op. cit., t. v, p. 470), « qui déjoua les manœuvres de l’empereur et de la cour de France demandant la communion sous les deux espèces poulies laïques ». Pour M. Richard (Concile de Trente, t. ix de YHistoire des conciles de Hefele et Hergenrôther, Paris, 1930-1931, p. 1026 ; cf. p. 696), la demande « fastidieuse » de l’empereur « échoua d’une manière pitoyable ».

Quant à la seconde demande impériale (la suppression du célibat pour le clergé séculier d’Allemagne), elle avait toujours été liée à la première : eadem opéra et ratione negocium quoque conjugii sacerdotum expédiât, écrit Ferdinand I er le 26 mars 1564. G. Constant, op. cit., p. 957. Jusque sur son lit de mort, Ferdinand la réclama du pape comme promise, et Maximilien, son successeur, ne sera pas moins pressant. Mais, comme l’empereur n’en avait point parlé au concile, Pie IV en profita pour disjoindre les deux questions. Son sentiment, toutefois, était connu. Au conclave de 1559, il avait déclaré au cardinal d’Augsbourg, Otto Truchsess, qu’un bon pape ne manquerait pas de faire tout ce qu’il pourrait en faveur du mariage des prêtres et du calice : le concile de Nicée avait concédé le premier à l’Église d’Orient, et Paul III le second à celle d’Allemagne ; pour lui, il ne voyait aucun mal à ce que le souverain pontife, par lui-même ou par un concile, accordât aux clercs la faculté de se marier et aux laïcs la communion sous les deux espèces. Augustani cardinalis confessio in scriptis de iis quæ de cardinali Mediceo in conclavi dixerat, 13 octobre 1559, qui se termine par ces mots : lia est et affirma cardinalis Augustani manu propria. Th. von Sickel, Zur Geschichte des Concils von Trient. Actenstùeke aus den Œsterreichischen Archiven, Vienne, 1872, p. 17 sq. Un an plus tard, il répéta à l’ambassadeur impérial qu’il était persuadé que l’on pouvait sans péché concéder ces deux articles, lesquels relevaient du droit positif. Ibid., p. 84. Dix-huit jours avant sa mort, il blâmera son nonce, qui a laissé suppo ser— à Maximilien II que le mariage des prêtres ne saurait être concédé : il che è tulto /also. Borromée à Delflno, 17 novembre 1565, archives vaticanes, A’u/jziatura di Ccrmania, arm. I, n. 4, fol. 45 1. Cf. G. Constant, op. cit., p. 587, n. 1. Mais, devant l’opposition acharnée de Philippe II, qui redoute pour les Flandres, s’il est accordé à l’Allemagne, le connubium sacerdotum, qui envoie instruction sur instruction au cardinal Pacheco et délègue à Rome Pedro de Avila pour contrecarrer sans ambages les demandes de l’empereur, le pape adopte le parti de louvoyer, essendo S. Stù ambigua di quel che debba /are (ibid., loc. cit.). Telle sera sa conduite jusqu’à la fin. L’archevêque de Lanciano, Leonardo Marini, et l’auditeur de Rote, Guicciardini, sont envoyés en Allemagne, le 24 mai 1565, pour s’informer de l’état moral du clergé et y chercher quelque remède. Mais c’est en vain qu’ils tentent de détourner l’empereur de sa demande. Tout en reconnaissant la supériorité en soi sur le mariage du célibat ecclésiastique, Maximilien répond qu’un clergé célibataire ne saurait se trouver dans l’empire. « En fait, à peine rencontre-t-on un prêtre sur cent qui ne soit marié ou concubinaire ; beaucoup même ne se contentent point d’une seule concubine ; le scandale de ces derniers est tel que plus d’un patron ne veut conférer les bénéfices ecclésiastiques qu’à des clercs mariés ; il n’est pas un diocèse qui ne souffre d’une pénurie extrême de prêtres : combien de paroisses en sont privées ! » Les pourparlers continuèrent jusqu’à la mort de Pie IV. Il furent définitivement arrêtés sous Pie V. On ne voit pas toutefois que de longtemps les mœurs ecclésiastiques en Allemagne se soient améliorées. Voir G. Constant, op. cit., p. 546-612, 1013-1023.

Quand on considère — et dans cet article nous n’avons pu tout indiquer — ce que fit pour l’Église, en un pontificat de six années, celui que ses adversaires par mépris appelaient il Medichino, « Médicis le petit », on ne voit pas que Pie IV ait moins mérité que certains pontifes au nom plus illustre, aux vertus plus austères, à la renommée plus retentissante. Sans lui, qui sait combien de temps il aurait fallu encore pour que fût achevé le concile et entreprise la réforme urgente qu’avaient décrétée — sans grand espoir — les Pères de Trente.

Si f’on voulait dresser une bibliographie détaillée, plusieurs colonnes seraient nécessaires. Nous nous contenterons de signaler les ouvrages où elle se peut trouver.

I. Documents.

J. Le Plat, Monumenlorum ad historiam concilii Tridentini illusirandam spectantium amplissima colleclio, Louvain, 1781-1787, t. iv-vn ; A. Theiner, Acta genuina SS. œcumenici concilii Tridentini sub Pauln III, Julio III et Pio IV PP. MM. ab Angelo Massarello episcopo Thclesino ejnsdem concilii secretario conscripta, nunc primum intègre édita, Agram et Leipzig, 1872, t. i et il ; Concilium Tridentinum. Diariorum, actorum, epistularum, trætatuum nova collectio, edidit Societas Goerrcsiana, Fribourg-en-Brisgau, t. il et iii, par Seb. Merkle, 1911-1930 ; t. viii, par Ehses, 1919 ; S. Steinherz, Nuntiaturberichte aus Deutschland, IIe part., 1560-1572, Vienne, 1897-1914 ; t.i.m, iv ;.I. Susta, Pic rômische Kiirie und das Konzil » on Trient unter Pins IV., Vienne, 1904-1914, 4 vol. ; G. Constant, Rapport sur une mission scientifique aux archives d’Autriche et d’Espagne, Étude et catalogue critique de documents sur le concile de Trente, t. xviii des’Nouvelles archives des missions scientifiques et littéraires, 1910 ; du même, La légation du cardinal Morone prés l’empereur et le concile de Trente (avril-décembre 1563), 233e fascicule de la Bibliothèque de l’École des hautes-études, Paris, 1922.

IL Ouvrages principaux avec longue bibliographie.

— J. Susta, Pius IV pred pontifikatén a na pocâtku pontifikâia (Pie IV, au commencement de son pontificat), Prague, 1900 ; L. von Pastor, Geschichte der Pàpste seit dem Ausgang des Mitlelalters, t. vu : Pius IV. (1559-1565), Fribourg-en-Brisgau, 1920, c’est l’ouvrage que suit en