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PÉCHÉ. DISTINCTION SPÉCIFIQUE


l’objet valeur matérielle. D’où l’adage de saint Thomas que celui qui vole en vue de forniquer est davantage fornicateur que voleur. I a - 1 1 83, q. xviii, a. 6, 7.

Les circonstances de l’acte tantôt sont spécifiantes et tantôt ne le sont pas. Le concile de Trente a consacré, sur ce point, un enseignement traditionnel de la théologie, en même temps qu’il en signalait l’importance, quand il inscrivit, comme matière nécessaire de la confession, dans le sacrement de pénitence, les circonstances qui changent l’espèce du péché : eas <ir<umslanlias in con/essione explicandas esse quæ speciem peccaii mutant. Sess. xiv, c. v ; cf. can. 7. Or, sont spécifiantes les circonstances qui passent en condition de l’objet voulu, c’est-à-dire celles-là qui, relatives à l’objet ou à la hn voulus, disent convenance ou répugnance spéciales à la raison, en sorte qu’elles possèdent un intérêt moral propre et que la volonté, inclinant à son objet ou à sa fin, ne les peut accepter sans en recevoir une bonté ou une malice spéciales. Rien n’empêche, en effet, que cela même qui ne constitue pas la substance de l’acte humain, possède un spécial rapport avec la raison. La circonstance ainsi spécifiante demeure une circonstance, n'étant voulue ni comme objet ni comme fin ; néanmoins, elle est spécifiante, constituant, comme dit saint Thomas, une condition de l’objet ou de la fin entendus dans leur sens moral. l a -II æ, q. xviii, a. 10 ; q. lxxii, a. 9. Soit prendre le bien d 'autrui, qui se trouve être un vase consacré au culte : de simple vol, le péché devient vol sacrilège. Dans le cas, cependant, où la circonstance intéressant la raison se trouve n'être point relative à l’objet ni à la fin voulus, elle n’introduit pas une espèce nouvelle de péché, si elle est mauvaise, mais multiplie seulement la raison de péché dans la même espèce. Soit le prodigue qui, dépensant inconsidérément son argent, en donne à qui il ne faut pas : cette circonstance du bénéficiaire non convenable, qui dit spéciale répugnance à la raison, cependant, ne détermine point en une nouvelle espèce le péché de prodigalité, car elle n’en intéresse point l’objet même, qui est de donner plus qu’il ne faut, mais se trouve seulement accompagner l’acte même de la prodigalité, lue étude détaillée de la spécification opérée par les circonstances, comme aussi bien par la fin ou l’objet, appartient à la doctrine de l’acte humain, dont le péché n’est qu’une espèce. Voir l’art. Aggravantes (Circonstances). Il apparaît assez que l’objet dont nous avons parle concerne Je terme de l’appétit volontaire ; il se rencontre donc identique en des matières qui seraient en elles-mêmes spécifiquement distinctes ; l’orgueil, par exemple, trouve son objet dans les plus mesquins avantages, comme une gracieuse démarche, et dans les plus nobles perfections, comme une science consommée.

2. Distinction d’après les précepte*. -On a proposé de distinguer spécifiquement les péchés selon les pr< ceptes auxquels ils s’opposent.

Vasqucz représente cette opinion, op. cit., dlsp. KCVIII, c. il. A la suite de saint Thomas, qui s’en déclare expressément l’ennemi (unde secundum diversa præcepta legis non dmersificantur percata lecundum speciem, Sum. theol., Ia-IIæ, q. lxxii, d ~" iii), les thomistes la réprouvent communément. I.a loi. en effet, donne lieu a l’aversion dans le péché, étant cela de quoi le péché détourne, et la spécification des péchés se prend de la conversion. A cette explica lion, il est vrai, on peut opposer que l’objet même où se porte la volonté du pécheur, et duquel, selon nous,

le péché reçoit son espèce, n’est point l’objel brnl. si l’on peut dire, mais un objet prohibe : d’où la qualité morale de cette tendance ; des lors, la prohibition, donc le précepte, intéresse la conversion même de l’acte et non seulement son aversion. A quoi les Sal

niCT. DB TBKOL. CATHOI.

manticenses répondent, disp. VIII, dub. ii, n. 27, que la condition d'être prohibé ne dit pas dans l’objet quelque chose qui se tienne du côté de l’objet, et vers quoi, dès lors, tendrait le pécheur ; mais bien plutôt un extrême à quoi cet objet s’oppose : le pécheur ne se porte point vers la prohibition ni vers l’objet comme prohibé, mais vers l’objet, lequel est affecté de prohibition, ou plutôt s’oppose à la prohibition. L’objet est dénommé prohibé extrinsèquement. Le précepte intéresse bien l’aversion du péché. Dans la mesure où les préceptes se distinguent selon les matières qu’ils concernent, leur distinction se trouvera rencontrer celle des péchés : coïncidence pareille à celle que nous signalions au sujet de l’opposition des péchés à la vertu, mais dont l’objet même, ici comme là, rend en dernier lieu raison.

Les préceptes, par ailleurs, se divisent comme tels en maintes manières qui ne concernent en rien la division spécifique des péchés. Ils se divisent en négatifs et positifs, lesquels donnent lieu respectivement aux péchés de transgression et d’omission : or, ces deux catégories de péchés n’ont point valeur spécifique. Assurément, la transgression et l’omission représentent matériellement deux espèces (si l’on entend ce dernier mot dans un sens assez large où il puisse comprendre la privation) ; mais un seul et même motif y donne lieu : l’avarice, par exemple, se traduira en rapines désordonnées et en défaut des libéralités convenables. Sum. theol., l^-ll^, q. lxxii, a. 6. Cette réduction de l’omission au même motif qui cause la transgression est une règle fondamentale, et dont s’accommodent toutes les complexités selon lesquelles se vérifie le péché d’omission ; il restera, dans tous les cas, que celui-ci est spécifié selon l’objet même que l’on a omis de poursuivre. Voir sur ce point les Salmanticenses, disp. VIII, dub. i. On peut dire que cette division des préceptes, qui n’entraîne pas une distinction spécifique des péchés, signale la voie montante de la vie morale : s’abstenir du mal, accomplir le bien, et, par là, elle est suffisamment justifiée. Sum. theol., Ia-IIæ, q. lxxii, a. 6, ad 2°™. Les préceptes se divisent encore selon les droits qu’ils traduisent et les législateurs de qui ils procèdent : préceptes de droit naturel, positif, divin, ecclésiastique, civil, etc. Cette division des préceptes n’emporte non plus aucune dist indien spécifique des péchés. Un même acte, qui est défendu par plusieurs de ces préceptes, n’est cependant qu’un seul péché : par exemple, le vol. A plus forte raison, un précepte relevant du même droit, par exemple le droit positif, multiplié par plusieurs représentants de ce droit, ne multipliera-t-il pas le péché qu’il défend. Cajétan, IMI 33, q. lxxii, a. 6 ; Salmant.. disp. VIII, dub. n.

3. Autres divisions des péchés.

Les principes ii dessus établis permettent d’apprécier les diverses divisions du péché qu’a proposées la théologie, au gré des occasions.

Nous venons d’opérer cette critique sur la division du péché en transgression et en omission, qui est des plus traditionnelles ; nous l’avions opérée plus haut sur la division du péché en excès et défaut qui s’inspire de la morale aristotélicienne. Reste que nous

l’appliquions a quelques-unes des autres catégories en cours.

Il en est parmi (elles là qui intéressent l’objet du

péché et donc possèdent une certaine valeur spécl

Qque. Ainsi, la distinction des péchés charnels et des pél lus spirituels. ( >n la doit -., smnt Grégoire qui par lageait les péchés capitaux en ces deux grandes cale

Moralia, i. xlv, 88, /'. l… t ixxiii col..'.' i teptem capttalium vitiorum qutnque $unt splritualla et duo carnalta. Saint Thomas, qui connaît deux espèces de délei i étions, prêt Isément dénommi 1 1

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