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général, une exhortation morale, des récits de l’histoire de l’Église ou <le La vie des saints, un « discours sur le livre <, sorte de commentaire improvisé de quelque page de l’Écriture ou d’un livre édifiant. Tout se fait sur un ton familier, sans apprêt littéraire, sans érudition scolastique, méthode bien opposée, si l’on eu croit de bons témoins, aux habitudes de l’époque. A cela s’ajoutent souvent des pèlerinages en groupe à quelque église de Rome, des chants populaires, de la musique, d’où naîtra un genre musical, appelé lui aussi oratorio.

Ce nouveau mode d’apostolat connut un succès considérable : en 1580, c’est toute une armée que Philippe réunit autour de lui, ou entraîne au pèlerinage des sept églises. Pour diriger et intéresser tout ce monde, Philippe avait besoin de collaborateurs. Dès le début, de jeunes disciples se groupèrent autour de lui ; il se les attacha, les prépara au sacerdoce et les employa à son œuvre. L’Oratorio exigeait encore un local approprié et une certaine liberté d’action. A Saint-Jérôme de la Charité, l’un et l’autre faisaient défaut. En 1563, la petite communauté prit la charge de l’église nationale Saint-Jean des Florentins. Douze ans plus tard (1575), elle reçut du pape l’église de Santa-Maria in Vallicella, qui, reconstruite, prit le nom populaire de Chiesa Nuova. C’était l’établissement définitif et, en même temps, la reconnaissance officielle par le pape de la société de prêtres qui s’était constituée et qui s’appela congrégation de l’Oratorio (de l’Oratoire). Saint Philippe en fut le premier supérieur. Il le demeura jusqu’en 1593, époque où, chargé d’ans et d’infirmités, il dut imposer sa démission à ses confrères, et fut remplacé par Baronius. Il mourut le 26 mai 1595 et fut canonisé dès 1622.

Saint Philippe Néri eut toujours de la répugnance à créer des succursales de son institut. Il se refusa à fonder, à Milan, une communauté oratorienne, comme l’en priait saint Charles Borromée. S’il ne montra pas toujours la même fermeté, si, en 1586, après quelques hésitations, il permit la fondation de Naples, et l’agrégation de San-Severino (fondée depuis 1579), ce fut toujours à son corps défendant. Les communautés de Fermo (1580) et de Païenne (1593) se fondèrent encore spontanément, mais n’obtinrent jamais une affiliation complète. Au contraire, l’assemblée de 1588 décida de rendre à toutes les communautés déjà constituées, sauf Naples, leur indépendance. La scission effective n’eut lieu qu’après la mort de saint Philippe. Mais elle fut complète et définitive. Naples même devint autonome et, de nos jours encore, chaque maison de l’Oratoire philippin forme une congrégation séparée, sans liens administratifs avec les autres.

Cette nouvelle disposition semble avoir provoqué l’éclosion de nombreux oratoires locaux. Rapidement, presque en chaque ville d’Italie, à Camerino Brescia (1578), Aquila (1607), Pérouse (1614), Bologne (1615), se formèrent des communautés à l’imitation de l’Oratoire romain. Au xviiie siècle, on compte plus de cent fondations en Italie. L’Oratoire philippin se répandit même à l’étranger. En Espagne et au Portugal, il connut tout d’abord un certain succès : Valence (1642), plus tard Grenade, Cadix ; Lisbonne (1668). En France, son développement fut, de bonne heure, gêné par l’existence de l’Oratoire du cardinal de Bérulle. Pourtant, on cite, au xvine siècle, huit maisons de l’Oratoire philippin. En Bavière et en Autriche, des communautés furent fondées : Aufhausen (1692), Vienne (1700), Munich (1707), mais se développèrent peu et disparurent avant la fin du siècle. Il y eut encore des fondations en Pologne (Gostyn, Studzian, 1674), en Amérique du Sud, au Mexique, voire même en Extrême-Orient avec le célèbre P. Joseph Vaz, l’apôtre de Ceylan († 1711).

Mais la plus illustre fondation fut, au siècle dernier, celle de l’Oratoire d’Angleterre. Newman, venu à Home peu après sa conversion, était entré en relations avec les Pères de la Vallicella. Il fit même un noviciat à Sainte-Croix de Jérusalem, sous la direction du P. Rossi. Rentré en Angleterre, il fonda (1 er février 1818) une communauté philippine de dix membres, bientôt rejoints par le P. Faber et ses compagnons. Après un bref séjour à Maryvale (Old Oscott), à Cheadle (Saint-Wilfrid, 1848), à Birmingham (Alcester street, 1849), la communauté s’établit enfin à Edgbaston, faubourg de Birmingham (16 février 1852). Pendant ce temps, une seconde maison avait été fondée, sous la direction du P. Faber, à Londres, d’abord King William street (1849), puis (1854) à South-Kensington, où elle est demeurée jusqu’à nos jours.

II. But et esprit.

Saint Philippe n’avait pas prémédité, semble-t-il, de fonder une congrégation. Lorsque les circonstances l’eurent mis en présence du fait accompli, il ne s’y résigna qu’avec peine. En tout cas, il se refusa toujours à instituer un ordre religieux. Au fond, une chose l’intéresse avant tout : l’Oratorio ; cet apostolat demandait des collaborateurs, il se les attacha. Mais il n’exigea jamais d’eux autre chose que le strict nécessaire pour son dessein ; les oratoriens seront des prêtres séculiers, sans vœux, disposant librement de leur personne et de leurs biens.

Pourtant, qu’il l’ait voulu ou non, saint Philippe Néri a doté l’Église d’un institut nouveau, et des plus caractérisés. Pour n’être pas centralisée, la congrégation fondée par lui n’en possède pas moins une individualité propre, un esprit original. Cet esprit semble être le résultat de ces trois influences : la personnalité si marquée du fondateur ; l’attachement à un genre d’apostolat nouveau ; l’organisation de la congrégation en communautés séculières autonomes. De tout cela se dégagea l’esprit philippin, qui survécut à la personne de saint Philippe, qui survécut même à l’Oratorio, disparu ou transformé selon les exigences des temps. « C’est un esprit qui consiste, je crois, à mettre à l’aise, à ne pas contraindre, à laisser chacun, dans les limites permises, manifester l’originalité de sa pensée ou de son caractère, à se complaire dans la diversité non moins que dans l’unité, à respecter infiniment la spontanéité des âmes. » L. Ponnelle et L. Bordet, Saint Philippe, préface de Mgr Baudrillart, p. xx et xxi. C’est encore un esprit réaliste, montrant une préférence pour ce qui est concret et tangible et un certain dédain pour les vues spéculatives et la théorie, ou, du moins, ayant une tendance marquée à en découvrir et à en apprécier surtout les applications immédiates et les conséquences pratiques.

III. Histoire littéraire.

Or, ces mêmes traits et ces mêmes influences se rencontrent dans l’histoire littéraire de la congrégation. On y remarque, d’une part, ce respect de la personnalité, ce culte de la spontanéité, voire de l’indépendance, qui rend difficile et quelque peu artificiel, tout essai de classification. Et, pourtant, d’autre part, on ne peut méconnaître l’existence de certains traits communs, expression peut-être de cet esprit réaliste dont nous avons parié.

Ce qui frappe, en effet, tout d’abord, lorsqu’on étudie les écrivains de l’Oratoire philippin, c’est l’absence presque absolue, chez eux, d’études spéculatives : la théologie scolastique ne semble pas les intéresser. Le traité des Grandeurs de la Trinité du P. Antonio (Naples, t 1644) est plutôt une œuvre de spiritualité que de théologie ; et le P. Ant. Barcellona (Païenne. t 1805) nous avertit, au début de son livre sur La félicité des saints, qu’il n’a d’autre but que de convertir les pécheurs par la contemplation de la récompense promise aux justes.

Par contre, la théologie pastorale, le droit cano-