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PHILARÈTE DROZDOV. DOCTRINE


et V.-C. Markov en trois gros volumes, Moscou, 19031906. Comme nous l’avons déjà dit, ces Avis et réponses touchent aux questions les plus variées, tant civiles qu’ecclésiastiques. Plusieurs intéressent la théologie. Le plus grand nombre regardent l’administration ecclésiastique. Particulièrement curieux et intéressant est le volume consacré aux aflaires de l’Église orthodoxe en Orient, de 1858 à 1867. On y voit avec quelle attention le Saint-Synode et le gouvernement russe ont suivi les démêlés entre les Bulgares et le patriarcat œcuménique et leur immixtion en cette affaire.

16° Lettres à divers personnages. — Philarète a entretenu, pendant sa vie, une vaste correspondance. Après sa mort, ses correspondants ou d’autres commencèrent à la publier. Une douzaine de tomes ont paru. Le recueil le plus intéressant, au point de vue doctrinal, paraît être celui de A. N. Mouraviev, Pisma rnetropolita Moskovskago Philaretn k A. N. M., 18321867, Kiev, 1869 (en tout 447 pièces). Un grand nombre de ces lettres sont sans intérêt et, si elles ont vu le jour, elles le doivent plus à la réputation de leur auteur qu’à leur importance intrinsèque. C’est le cas, en particulier, des 1681 lettres adressées à l’archimandrite Antoine, sous-prieur de la laure Saint-Serge, de 1831 à 1867, publiées en quatre volumes par E.-S. Krotkov, Moscou, 1877-1884.

17° Décisions épiscopales. — On a édité, après la mort de Philarète, plusieurs recueils de ses décisions (rezolioutzii) administratives comme évêquedes divers sièges qu’il a occupés. Ces décisions n’intéressent guère la théologie, mais elles sont instructives au point de vue canonique et nous renseignent sur l’administration intérieure de l’Église russe pendant la période synodale. Ces décisions furent d’abord éditées par petites séries dans la revue Doukhepoleznoe tchténié {Lecture e’di fiante), à partir de 1871. Un premier recueil systématique fut publié à Orel en 1889 ; Rezolioutzii Moskovskago milropolila Philareta po raznym razdielam i glavam oustava doukhovmjkh konsislorii i po oupravleniiou doukhovno-outchebnymi zavedeniiami : Décisions de Philarète, métropolite de Moscou, suivant les divers divisions et chapitres du règlement des consistoires ecclésiastiques et d’après l’administration des établissements scolaires ecclésiastiques, in-8° de V669 pages. Eli 1903, 1.. Korsounskii et V. C. Markov commencèrent la publication d’un recueil complet de ces décisions. Le t. i parut à Moscou sous le titre : Polnoe Sobranié rezolioutzii Philareta, milropolila Moskovskago, xx-(>31 p. Nous ignorons si d’autres tomes ont paru depuis. III. Doctrine. Pendant la plus grande partie de sa vie, c’est-à-dire jusqu’à la réforme théologique opérée par le procureur Protasov à partir de 1837, Philarète a été, en théologie, un fidèle disciple de Théophane Procopovitch. Et comment en aurait-il été autrement, puisque, à cette époque, et depuis la Seconde moitié du xviiie siècle. l’Église russe, dans son ensemble, avait fait siennes les doctrines contenues dans la Theologta christiana du favori de Pierre le Grand, telle qu’elle était sortie des presses de Leipzig en 1782-1781. par les soins du métropolite de Kiev, Samuel Mislasvskii ? Celui-ci avait complété la Somme de Théophane, restée Inachevée, par de longs extraits des théologiens luthériens du xviie siècle. J. Gerhardt, .1. A. Quenstedt, Pfeifler, Hollasius, etc. G’esl à cette

source que puisèrent les auteurs de manuels à l’usage fies séminaires et des académies ecclésiastiques. Ils ne faisaient que résumer la doctrine du maître. Or, l’on

sait que, sur un grand nombre de questions capitales,

PrOCOpOVitch et MislaVSkii avaient.adopte les thèses

de i, . théologie luthérienne d’Allemagne des xvii* et

KVIir siècles, notamment sur la règle de foi. le canon SCriptUraire, l’étal primitif, la nature et les effets du

péché originel, la justification par la foi seule, la négation du caractère sacramentel et de la peine temporelle, etc. C’est cette théologie que le jeune Philarète apprit aux séminaires de Kolomna et de Moscou. C’est celle qu’il enseigna lui-même à ses élèves durant les années de son professorat à l’académie de Pétersbourg, celle que l’on retrouve, ou que l’on devine, dans les deux premières éditions de son catéchisme.

Dans l’Exposé des différences entre l’Église orientale et l’Église occidentale, composé en 1811, nous lisons toutes les thèses maîtresses de Procopovitch présentées comme la doctrine officielle de l’Église orientale. Le jeune théologien met en regard de chacune d’elles la contradictoire enseignée par l’Église catholique. Donnons quelques exemples significatifs.

1° Sur la source de l’enseignement de la foi.— « L’unique, pure et suffisante source de l’enseignement de la foi est la parole de Dieu contenue dans la sainte Écriture. » Suit le texte II Tim., iii, 16, 17, puis la remarque suivante : « La supposition que la sainte Écriture est incomplète tend visiblement à accorder une plus grande importance aux traditions humaines. Mais, de même qu’il n’existe aucun article de foi qu’on ne puisse découvrir dans la sainte Écriture, « elle qui peut donner la sagesse pour le salut » (II Tim., iii, 15), de même, le fait qu’elle ne fait mention d’aucune tradition démontre seulement que cette tradition n’est pas un article de foi. »

Philarète exclut ensuite du canon les livres deutérocanoniques de l’Ancien Testament, qu’il traite d’apocryphes. Tout en reconnaissant leur utilité, il déclare que leur inspiration est au moins douteuse.

Tout ce qui est nécessaire au salut, ajoute-t-il, est exposé dans la sainte Écriture avec une clarté telle que tout lecteur animé du désir sincère d’être éclairé peut la comprendre. Sans doute, les interprètes instruits de la sainte Écriture sont utiles pour les chrétiens moins éclairés. Mais, poser en principe que, pour en extraire les articles de foi, un interprète despotique (sic) est nécessaire, rabaisse la dignité de la parole de Dieu et assujettit la foi à une parole humaine.

Le texte authentique de l’Écriture sainte se trouve principalement dans les langues hébraïque et grecque, car les traductions tirent leur autorité de l’original.

Chaque fidèle a non seulement le droit, mais aussi l’obligation de lire, pour son instruction, autant que faire se peut, la sainte Écriture dans une langue qui soit Intelligible pour lui.

La sainte Écriture, étant la parole de Dieu même, est l’unique juge suprême des controverses et dirime les doutes en matière de foi. C’est elle qui est la pierre de touchedesdécisions conciliaires, de telle sorte qu’aucun concile ne peut établir un article de foi qui ne pourrait pas être prouvé par la sainte Écriture. C’est là une règle que l’ancienne Église a toujours observée. Jésus-Christ seul, qui voit le fond des cœurs, connaît les assemblées qui sont réunies véritablement en son nom. Pour nous, nous ne pouvons les juger que sur le fondement de la parole de Dieu, qui nous est déjà connue. Sans cet le précaution, il pourrait nous arriver d’accepter les définitions de conciles que l’erreur ou l’ambition peuvent convoquer au nom de la chrétienté.

Les traditions sont soumises à la sainte Écriture et contrôlées par elle. I.es traditions sur des articles de foi qu’on ne pourrait trouver en elle en aucune manière ne devraient pas être acceptées, car. en beaucoup de passages, la sainte Écriture défend d’ajouter quoi que ce suit ; i l’enseignement qu’elle donne. La doctrine

chrétienne fut répandue simultanément par la tradition et l’Écriture, et le nombre « les livres du Nouveau

Testament lut complète graduellement. Mais, après

que l’Église eut reçu, dans ces livres, la règle générale