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PETIT (JEAN)


gogne, avec neuf propositions extraites de cette thèse, y était réprouvée, supprimée et condamnée au feu. Le dimanche suivant (25 février), l’écrit de Petit fut brûlé publiquement sur le parvis Notre-Dame. L’évêque de Paris et le roi promulguèrent aussitôt cette condamnation. Un décret royal du 16 mars 1414 en ordonna la publication dans tout le royaume et interdit toutes les attaques violentes, dont elle était déjà l’objet.

Comme, à cette date, Jean Petit était déjà mort, on ne pouvait plus l’atteindre personnellement. Sa doctrine sans doute était visée, mais plus encore le duc de Bourgogne, partisan avoué de Jean XXIII (successeur d’Alexandre V, l’élu de Pisc). Le frapper, c’était mettre le duc de Bourgogne au ban de la chrétienté et Charles VI en fâcheuse posture. Mais Jean sans Peur n’était pas de ceux qu’on peut braver impunément. Sans attendre la promulgation de la sentence de condamnation de la thèse de Jean Petit, le duc de Bourgogne en appela au souverain pontife, qui confia l’examen de cette affaire à une commission composée des trois cardinaux Orsini, Zabarella de Florence et Panciera d’Aquilée. A cause du refus de l’évêque de Paris et de l’inquisiteur pontifical de paraître devant le cardinal Orsini, où ils avaient été cités à diverses reprises, le procès traîna en longueur et aucune sentence n’avait été portée lorsque s’ouvrit le concile de Constance (5 nov. 1414).

Aussi, le procès commencé à Rome devant les trois cardinaux fut-il transféré en cette ville. Le gouvernement français prit ses précautions pour triompher. Des lettres furent adressées à l’université de Paris pour lui enjoindre de n’envoyer au concile que des hommes imbus de saines doctrines, particulièrement en matière de tyrannicide : tout délégué qui ne remplirait pas cette condition se verrait refuser le saufconduit du roi.

Gerson, à Paris, ne se lassait pas de revenir sur les accusations portées contre Jean Petit. Le 4 décembre 1414, il protesta avec force, devant le roi et les princes, à l’hôtel Saint-Paul, contre la doctrine condamnée : quiconque empêcherait le duc de Bourgogne de reconnaître son erreur devenait un fauteur d’hérésie. Un mois plus tard, le 15 janvier 1415, à l’occasion d’un service célébré, devant le roi et les princes, pour le repos de l’Ame de Louis d’Orléans. Gerson s’éleva de nouveau contre la thèse de.Jean Petit et en déclara la condamnation insuffisante ; le pape, les cardinaux et les Pères du concile étaient tous hérétiques s’ils lui donnaient gain de cause. Aussi Gerson fut-il envoyé au Concile et par le roi et par l’université et chargé de soutenir la sentence de l’évêque de Paris et de l’inquisiteur.

Mais, au moment où la bataille allait s’engager à Constance, la paix d’Arias, conclue le’.) octobre 1111 entre le duc de Bourgogne et le roi. paix qui longtemps était demeurée lettre morte, venait d’être publiée et jurée par les ambassadeurs du duc (2.’{ février 1415), Aussi les deux pari is. d’un commun accord, convinrent de suspendre les hostilités et Imposèrent silence à leurs ambassadeurs au concile dans le procès de Jean l’cl it. aussi long ! emps que la qucsl ion ne serait pas soulevée

par l’un ou l’autre parti. Par qui ce pacte lui il rompu ? D’après. Valois. Lu France ri le Grand Schisme d’Occident, t. iv, p. 315 319, il y a tout lieu de croire que Gerson profita d’un moment où les esprits étaient surexcités contre le duc de Bourgogne, soupçonné d’avoir favorisé la fuite de.Jean XXIII. Dans uniréunion nombreuse, tenue le Il avril 1415 dans la demeure du cardinal Pierre d’Aillv. Gerson aurait sou tenu (d’après une relal ion bourguignonne) 1rs trois pro

positions suivantes i l’écril de.Iran Petit, Justement condamne, contient de nombreuses erreurs sur la foi

et les mœurs ; 2° il convient de s’occuper d’extirper ces erreurs : 3° quiconque s’élèverait contre cette condamnation serait fauteur d’hérésie. Le gant fut vite relevé. Dès le 15 mai, les envoyés bourguignons, Martin Porée, évêque d’Arras, et Pierre Cauchon, vidame de Reims, déposèrent des conclusions, tendant à ce que le concile ou le Saint-Siège fissent examiner ou annuler les sentences de l’évêque de Paris et à ce que Gerson fût invité à réparer le tort qu’il avait causé à l’honneur du duc et de Jean Petit. Le même jour, Jean sans Peur écrivit de Dijon pour se disculper auprès de la « nation française », qui lui avait demandé d’arrêter le pape fugitif Jean XXIII, si celui-ci venait à pénétrer en Bourgogne. Le duc répondait qu’il s’y prêterait volontiers, tout en protestant contre les soupçons dont son orthodoxie était l’objet. Il écrivait qu’il n’avait chargé Jean Petit que de plaider sur un fait particulier ; qu’il lui avait exposé les faits, mais que les principes par lesquels il les avait justifiés étaient son œuvre propre ; que les propositions condamnées à Paris n’étaient point celles de Jean Petit ; que si le discours de Jean Petit contenait des erreurs, elles dépassaient son intellect ; que ses ennemis n’avaient d’autre but que de rallumer la guerre en France. Cette lettre fut lue au concile, le 26 mai 1415. Cf. Mansi, Concil., t. xxviii, col. 740-744. Gerson s’empressa de protester contre les graves imputations dirigées manifestement contre lui, bien qu’il ne fût pas nommé. Là-dessus, il porta, le 7 juin, l’affaire formellement au concile, tandis que, de leur côté, les envoyés bourguignons demandaient une décision à l’assemblée.

Dans la xin 1 * session générale du 15 juin 1415, une commission fut chargée d’examiner toutes les accusalions d’hérésie ; elle était composée des cardinaux d’Aillv, Orsini, Zabarella et Panciera, auxquels on adjoignit plusieurs évoques et des docteurs de chaque nation. Le concile, ayant égard aux circonstances, ne voulait pas une condamnation nominative de Jean Petit, qu’il estimait préjudiciable aux intérêts de la politique et de l’Église. On prit donc un moyen terme et, à la xvie session (6 juillet 1415), aussitôt après la condamnation de Jean Hus, on censura, sans nommer Petit, la proposition suivante : Quilibel tyrannus potest et débet licite et merilorie occidi per quemeumque vasallum simm vel subdilum, etiam » rr clanculares insidias, et subtiles blanditias vel adulationes, non obslanle quoeumque prwstito juramento seu confaderatione faclis cum eo, non expectata sententia » el mandate judicis cujuscumque.

Cependant, les adversaires du duc de Bourgogne ne se contentèrent pas de la condamnation de la théo rie générale du tyrannicide, ils voulaient encore que l’on censurât les neuf propositions tirées de la Justification du duc de Jean Petit. Après la censure du (î juillet 1115, l’affaire de.Jean Petit ne fut cependant traitée que dans la commission de la foi, où elle fut l’objet de nombreuses et vives discussions. L’évêque d’Arras alla jusqu’à soutenir que l’évêque de Paris n’avait eu ni matériellement, ni Formellement le droit de censurer la doctrine de Petit, (ierson ci d’Allly, au contraire, en défendirent devant la commission la légitimité. L’évêque d’Arras répondit très vivement, tandis que le franciscain Jean Roques dénonçait

comme hérétiques. Il propositions extraites « Us

ouvrages de Gerson. Cet examen devant la commission de la foi fut pour ce dernier quelque peu embarrassanl.

car il avait laissé échapper îles propos f.u li< u

Quelques équivoques et une certaine présomption

dans sa défense accrurent encore le mécontentement.

Gerson n’abandonna cependant pas sa poursuite

Contre les erreurs de Petit. L’évêque d’Arras. au COU

traire, s’efforça de prouver l’orthodoxie des théories

de l’etil ai B établir que la sentence conciliaire « I il