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IMITAT ! (DENYS). OPINIONS PARTICULIÈRES

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échappe. C. iv, 3 ; c. iii, 2-1 : c. vii, 11-14. L’attribution en propre à la seule personne du Saint-Esprit de celle union substantielle » demeure également pour Petau une opinion de second ordre. Au cours de sa démonstration principale, il a parlé, comme on fait d’ordinaire, d’union avec le Saint-Esprit ; mais ce n’était encore que par appropriation. Cette manière de s’exprimer, classique en la matière, réservait la question ultérieure du sens plus précis à donner aux textes invoqués : permettent-ils, commandent-ils d’aller plus loin et de parler d’une union spéciale avec la troisième personne ? Petau le croit et c’est à quoi, bien à tort, on ramène trop souvent sa doctrine sur notre sanctification par le Saint-Esprit. En réalité, il n’aborde cette question qu’au n. 5 du c. vi, et la réponse qu’il y fait, n. 5-9, peut être discutée ou rejetée sans que soit mis en cause l’essentiel de la doctrine præclara et ad jructum animorum jucundissima, c. iv, 5, qu’il a d’abord si longuement et si solidement établie.

De même pour l’extension de cette doctrine aux justes de l’ancienne Loi. Petau consacre à cette question la plus grande partie du c. vu de ce livre VIII (n. 1-11). Ici encore, les Pères grecs lui paraissent exclure que le bienfait de l’adoption divine par l’union à la substance des personnes ait été accordé avant le Christ. Toutefois, il reconnaît que, sur ce point, ses auteurs sont moins fermes et moins unanimes ; lui-même, d’ailleurs, renvoie au traité de la justification une étude et une discussion plus approfondie de ce sujet (n. 11).

Ces précisions ultérieures, Petau n’a pas eu le temps de les donner et ses diverses conclusions sur la sanctification des âmes par le Saint-Esprit n’ont pas toutes été également appréciées.

Sans contester, sur ce point, son interprétation des Pères grecs, on n’a communément pas accepté que le bienfait de l’adoption divine ait été restreint aux justes de la Loi nouvelle. Par contre, sa conception propre d’une union spéciale avec le Saint-Esprit a provoqué d’assez nombreuses sympathies. On ne l’a guère admise telle quelle ; même ceux qui s’y sont montrés le plus favorables ont regretté que le mode n’en fût pas mieux défini : l’expression d’ « union substantielle » a fait craindre des confusions avec l’union hypostatique. A cela près, et parce qu’ils considéraient comme acquise son interprétation des Pères grecs, plusieurs se sont complu à modifier sa conception de manière, pensaient-ils, à la rendre acceptable. Ainsi ont fait, entre autres, Scheeben, Die Mysterien des Christentums, § 30 ; Th. de Régnon, Études de théologie positive sur la sainte Trinité, t. iv, p. 524-561 ; Mgr Wafïelært, Disquisitio dogmalica de unione juslorum eum Deo, dans les Collaliones Brugenses, t. xv, p. 442-453, 625-627, 673-687 ; t. xvi, p. 6-61 ; L’union de l’âme aimante avec Dieu (1916), passim ; La colombe spirituelle prenant son essor vers Dieu, IIIe partie (1919), p. 85-159. L’ensemble des théologiens, toutefois, a refusé d’entrer dans cette voie. Cette union ou cette présence propre à une seule personne leur a paru inconciliable avec la doctrine si fermement établie de l’indistinction des trois personnes pour tout ce qui n’est pas leur trait strictement personnel. De par ailleurs, une révision attentive de la doctrine attribuée par Petau aux Pères grecs a paru établir qu’il s’était mépris sur la portée exacte des affirmations qui lui avaient paru imposer sa conception. La « vertu sanctificatrice » présentée par eux comme propre au Saint-Esprit, loin de le distinguer à leurs yeux des deux autres personnes, leur apparaît, au contraire, comme un trait de sa communauté de nature avec elles. S’ils le relèvent et y insistent, c’est parce qu’ils y trouvent un moyen facile et assuré de le distinguer des êtres créés et d’établir sa divinité ou sa communauté de nature

avec le l’ère et le fils. Il n’y a donc pas à chercher, dans leurs affirmations sur ce point, un argument en faveur d’une intervention spéciale de sa part dans L’œuvre de notre sanctification ou en faveur d’une union qui établirait entre lui et les âmes justes une relation d’ordre strictement personnel. Voir (laitier, L’habitation en nom des trois personnes, Ve partie, p. 3-150.

.Mais, si les conclusions secondaires de Petau ont trouvé peu de crédit, sa conclusion fondamentale, au contraire, s’est, peut-on dire, universellement imposée. On l’a approuvé de s’être plaint que, dans leurs théories de la sanctification des âmes, les théologiens lissent si peu de place à la présence substantielle des personnes divines. Certains, pour ne pas paraître accuser le coup, se sont appliqués à lui retourner le reproche : se méprenant sur sa pensée exacte, on s’est complu, parfois, à lui reprocher de ne faire aucune place dans la justification à la grâce créée. Mais lui-même, nous l’avons vii, s’est défendu de cet exclusivisme, et, peu à peu, sa doctrine, dans ce qu’elle a d’essentiel, s’est imposée à l’assentiment général. Parmi ceux qui l’ont nettement acceptée, on peut citer, en dehors de Scheeben, de Régnon et de Mgr’Waffelært que nous avons déjà signalés, Thomassin, De incarnatione, t. VI, c. xi ; Franzelin, 13e Deo uno, p. 341342, et surtout De Deo trino, th. xliii-xlvii ; Hurter, Theol. compend., t. iii, n. 190, 194, § 4 ; Terrien, La grâce et la gloire, t. IV, t. i, c. iii, 3 ; Mercier, La vie intérieure, l’entretien, p. 374-396 ; Tanqueray, L’habitation du Saint-Esprit en nous et la vie intérieure, dans Rev. d’ascét. et de mijst., 1922, p. 4-15 ; Pesch, Prselect. dogm., t. ii, n. 681-684 ; Beraza, De gratia Christi, n. 777 et 883 sq. ; Lange, De gratia, th. xiv-xvi ; Galtier, L’habitation en nous des trois personnes, p. 117139, 209-225. De plus en plus cette doctrine, que Petau estimait prxclara et ad fruclum animorum jucundissima, c. iv, 5, s’impose à l’attention des théologiens et des auteurs spirituels ; comme lui, toutes les âmes chrétiennes la goûtent et y sont attirées : Jucundissima voluptate piorum demulcel animos ac Dei in nos bonilalem et munificentiam summopere commendal. C. iv, 9. On aime à se nourrir de la pensée que l’on possède en soi la substance même des personnes divines : Rapil enim nos ad sese, ac sine satietate délectai tanlæ rei aclam suavis jucundœque recordatio. C. v, 8. La réaction qu’avait souhaitée Petau s’est donc produite et continue à se développer ; ce qu’il avait eu tant à cœur de démontrer demeure pleinement acquis : sans la présence substantielle de la sainte Trinité dans les âmes, il n’y a pas d’explication de l’état de grâce qui soit adéquate et qui fasse droit aux exigences de la tradition. Dans toute l’œuvre du grand théologien, c’est ici la partie dont l’influence s’est montrée et reste le plus efficace.

I. Biographie.

La source commune et à peu près unique est la notice que lui a consacrée le P. Fr. Oudin dans la collection de Niceron, Mémoires pour seruir à l’histoire des hommes illustres dans la république des lettres, t. xxxvii (1737), p. 81-234. La vie la plus complète est celle de J.-C. Vital Châtelain, Le P. Denis Petau d’Orléans, jésuite : sa oie et ses œuvres, 1884. Voir aussi Fouqueray, Histoire de la Compagnie de Jésus en France, t. m-v, passim. Le P. Zaccaria a mis aussi en tête de son édition des Dogmata theol. (Venise, 1757) une notice, reproduite dans l’édition Vives, t. i, p. vi-xviii.

IL Œuvres. — Énumération dans Niceron, /oc. cit., et dans Sommervogel, Bibliothèque de la Compagnie de Jésus, t. vi. A partir de 1700, les œuvres proprement théologiques se trouvent groupées dans les éditions des Dogmata theologica, Amsterdam, 1700 ; Venise, 1719, 1721-1724 ; Florence, 1722 ; Venise, 1745 et 1757 (cette dernière édition, en 6 vol., par le P. Zaccaria, est accrue de diverses dissertatiors qui ne sont pas de Petau) ; Rome, 1857 entreprise par les PP. Passaglia et Schrader, cette édition n’a pas abouti ; le 1 er volume seul a paru ; Bar-le-Duc, 1864 (8 vol.) ; Paris