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PETAU (DENYS). OPINIONS PARTICULIÈRES


comment, dans ses Dogmes, il a abandonné aux ariens les Pères des trois premiers siècles, et comment il les a tous rendus fauteurs de l’arianisme… Il est vrai qu’il crut réparer sa faute en quelque manière par une préface que les Docteurs de Sorbonne l’obligèrent de faire ; mais c’était mettre le remède auprès du mal et non pas le guérir. Il fallait brûler cet ouvrage infortuné et il se serait ainsi épargné beaucoup de honte. » Dictionnaire historique et critique, t. ii, 1790, p. 2268, note C. Le P. Godet a repris cette explication : il parle de la Préface que la Sorbonne avait, par prudence, exigée de Petau. Origines françaises de l’hist. du dogme, dans Rev. du clergé français, 1 er février 1002, p- 458. Mais J. Tunnel, invoquant le précédent « que le P. Morin de l’Oratoire fut obligé par l’autorité supérieure de supprimer [un chapitre] dans son traité de la Pénitence », a préféré faire intervenir les supérieurs mêmes du P. Petau. Il est probable que le De Trinitate de Petau était déjà imprimé quand les supérieurs en prirent connaissance. Du moins, on ne voit guère d’autre explication au fait « que les appréciations sévères du premier livre… ne soient l’objet d’aucun adoucissement, d’aucune atténuation » dans l’ouvrage lui-même et que la Préface produise donc l’impression d’une « rétractation, composée à un moment où la rédaction du De Trinitate ne pouvait plus être corrigée, c’est-à-dire in extremis ». Quelques hommes éminenls de l’Église de France, dans Rev. du clergé franc., 15 janvier 1902, p. 379-381. J. Turmel, revenant là-dessus en 1932 (Hist. des dogmes, t. ii, p. 8), n’ajoute que fiel et venin. Le perinde ac cadaver explique tout. Les supérieurs n’auraient-ils pas ajouté la Préface à l’insu de Petau ? Moins méchamment, mais sans y regarder de plus près, l’abbé.1. Martin imagine de tout simplifier en retardant la publication de la Préface. « Petau, écrit-il. publia sa Préface au bout de six ans, en 1650, avec le traité de [’Incarnation. Les grands théologiens : Petau, Paris (1910), p. 13.

Non, tout cela est également arbitraire et l’on ne saurait se mettre plus à l’aise avec les faits. La Préface parut en télé du t. ii, dès 1644, et, recherches faites aux meilleures sources, il n’y a pas trace, dans la correspondance des supérieurs de Petau, d’une difficulté quelconque au sujet de son ouvrage. Aucune trace non plus d’une intervention des docteurs de la Sorbonne. Petau n’avait pas à leur demander approbation. Son livre De la pénitence publique et de lu préparation à la communion, paru la même année que sis Dogmes théologiques, n’en porte aucune ; Arnauld, La tradition de l’Église, sur le sujet de la pénitence (1644), p. 5, et Hermant. Mémoires, t. i. p. 233, le relèvent et s’en font une arme contre ce qu’ils appellent sa prétention de régenter ses Ici leurs. Petau reste floue bien le vrai et le seul responsable de ses conclusions sur la doctrine des Pères anténicéens ; pour les apprécier, il s’impose de les considérer telles que lui-même les présente dans son ouvrage.

Or, s’il esi vrai que sa Préface, comme il arrive d’ordinaire, suppose le livre déjà fini, il est néanmoins facile de constater qu’elle ne se présente nullement comme un appendice destiné à le corriger. Les explications générales qu’il y donne sur l’interprétation des inexact il iules relevées chez les écrivains anciens sont si peu Imaginées par lui après coup qu’il en avait posé le principe des son inl roduclion générale a tout

l’ouvrage, parmi les précautions à prendre dans l’utilisation des rires, il avait d’abord signalé la vigilance à ne pas les noter trop vite d’erreur pour quelques affirmations ambiguës : Ne temere (//os, « < ntti magno etun judicio, nolemu » erroris ; sed, si qua in connu librtt leguntur ambiguë dicta excusartque pouvait, teneamu » hoc pollue quant Mi* falsæ aliquld opinionù adscrtbamus. t. i, prolegom., <. ii, 8, Vives, t. i, p. 13 a.

Il avait, en outre, signalé, ibid., n. 10, p. 14, comme il le fera dans sa Préface, c. iii, n. 3-7, les outrances de pensée auxquelles entraîne la polémique ; on ne saurait, par contre, attendre des auteurs d’une époque qu’ils se soient expliqués sur des questions qu’ont fait surgir des hérésies postérieures. Il n’y a donc pas à s’étonner que, sur ces points-là, ils aient moins surveillé leur langage ou se soient exprimés avec moins de clarté et de précision qu’on n’a fait plus tard ; prendre prétexte de ces inexactitudes pour les accuser d’erreurs, condamnées après coup, serait faire preuve de sottise et de malignité. Incuriosos illos ac minus accuralos securitas ipsa reddit, quæ stulte ac maligne ad præjudicium trahatur deprehensi damnât ique poslmodum erroris. Or, avait-il ajouté dès lors, cette remarque, qui vaut pour l’histoire de tous les mystères, a particulièrement sa place dans celle du dogme de la Trinité. Id in plerisque catholicse religionis mysteriis evenisse norunt, qui vel mediocrem usum habent in his litteris. ut in Trinitatis negotio. T. i, prolegom., c. iii, 10. Vives, t. i, p. 15 a.

Ce sont des principes analogues qu’il avait rappelés au t. IX, c. iv, de son De Deo. Le lecteur, y avait-il dit, doit avoir ces règles d’interprétation devant les yeux pour ne pas se méprendre sur le sens et la portée d’affirmations, qui, à première vue, peuvent paraître contradictoires ou en opposition avec la foi catholique : Ese velut générales erunt régulée, in quas indiens et inlendens oculos… theologus complura, quee apud eos absona et interdum quoque pugnantia secum ac fidei contraria catholicse specie prima videntur, explicabil facile ac lam se ab errore quam illos ab fœdissimæ labis suspicione vindicabit. Vives, t. ii, p. 19 b.

Or, ces principes fondamentaux, Petau les avait si peu perdus de vue en écrivant d’abord son De Trinitate qu’il les rappelle lui-même expressément au début des chapitres consacrés aux passages des anténicéens qui font difficulté. Certaines de leurs paroles, écrit-il en toutes lettres, s’expliquent par le manque de précision qui, de leur temps, régnait encore dans l’énoncé de ce mystère : Ut eranl tempora, nondum mysterio illo salis liquido cognito, nonnulla periculose dicta jecerunl, C. iii, 1, Vives, t. ii, p. 291-292. Kl il cite, à ce propos, les paroles de saint Jérôme et de saint Augustin, constatant, eux aussi, les imprécisions ou Inexact itudes de pensée et de langage qui caractérisent les époques antérieures aux discussions que font naître les hérésies. Ibid. En même temps, comme il le fera dans la Préface, il distingue, pour ceux des anténicéens qui furent vraiment catholiques au moins quelque temps. deux catégories de passages répréhensibles : les uns trahissent quelque réelle erreur, les autres ne pèchent que contre la rectitude du langage : Plerosque constat de sanctissima Trinitate platonico more sensisse, vel loquendi génère ipso nonnihil ad eum impltcatos videri posse, C’esl dans celle dernière catégorie que lui semblent devoir se ranger les saints ou les Pères proprement dits. Aussi, se gardcra-t-il de les accuser d’hérésie ; mais la vérité, d’autre part, lui Interdit de ilissi muler ce qu’ils ont dil de moins exact ou île moins

conforme a la règle catholique : Quod posterius ad sanctos poUssimum atque omni (lignas oenerfltione

Patres altincl. guos neque culparc debeo, ant in heeresis ne/aria’crimen adducere, ncijiir. et quid minus ab ils

accurate dictum exsiat atque ab catholtca norma di*si dens. possum prælermiltere. Ibid., Vives, p. 292. On

n’Minait très exactement la distinction des deux groupes qui. dans fi Préface (ci, 12). résume sa pensée sur les Pères anténicéens. A lui seul, le rapprochement

de ces deux passages Interdit de parler de tel racl ; il ion

ou de correction. D’autant plus que, lui même, résu

Riant une fois encore, au cours du livre. I. III, C XI, 12. cl a l’adresse îles sociniens qui prél endaient se cou rude leur autorité, ce qu’il avail dit des anténicéens au