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PERSÉVÉRANCE. LE CONCILE DE TRENTE


Pères : » Dieu impose à l’homme justifié des préceptes dont l’accomplissement est impossible. » Il s’agit ici de la défense portée par les Pères du IIe concile d’Orange, voir ci-dessus, col. 1270 ; Denz.-Bannw., n. 200 ; Cavallera, n. 855. Déjà, on rappelait la célèbre formule augustinienne : Deus impossibilia non jubet. sed jubendo monet, etc. Cf. ci-dessus, col. 1266. Le chapitre se continuait par l’exposé de la doctrine catholique sur l’incertitude de la prédestination et de la persévérance finale, et sur la nécessité, pour celui qui est régénéré dans l’espérance de la gloire qu’il ne possède pas encore, de lutter contre les tentations et les difficultés. Bien qu’il ne puisse éviter tous les péchés véniels, il peut être certain, avec la grâce de Dieu, de remporter la victoire. Conc. Trid., p. 424425. Dans ce projet, les canons étaient disjoints des chapitres. Répondaient au c. viii, les can. 10-14, p. 427.

Le c. ix continuait l’exposé du c. vin. Les justes doivent se considérer comme obligés à l’observance des divins préceptes et ils ne peuvent se flatter d’obtenir l’héritage céleste, s’ils ne s’associent pas au Christ souffrant pour mériter d’en partager la gloire. On y trouve déjà les textes : Rom., viii, 17 ; Heb., v, 8-9 ; I Cor., ix, 24, 26-27 ; II Pet., i, 10. La finale reproduisait, à peu de choses près, la finale de notre texte définitif et condamnait ceux qui accusent les justes de pécher en chacune de leurs œuvres et leur interdisent, même s’ils ont en vue la gloire de Dieu, de penser aussi à la récompense. Conc. Trid., p. 425. Les canons correspondants étaient catalogués sous les n. 15 et 20, p. 427.

Tenant compte des remarques faites par les évêques, Seripandi (qui fut, on le sait, le grand artisan de ce décret sur la justification) rédigea entre temps (31 octobre 1546) un projet distinct de la deuxième rédaction, dans lequel l’exposé doctrinal se présente sous une forme nette et concise, viii-ix, avec les canons correspondants, 12, 14, 15, 17, 18. 19, 21, 24, 30. Conc. Trid., p. 513-514, 516. Cet essai doit être signalé à cause de l’influence visible des canons de Seripandi sur les canons de la troisième rédaction conciliaire.

Cette troisième rédaction est, quant aux chapitres doctrinaux, presque définitive. Conc. Trid., p. 634641. Elle ne se distingue du texte officiel, promulgué dans la vie session, que par des détails insignifiants et l’absence du texte Ileb., xi, 26, sur Moïse, dans la finale. Les canons, au nombre de 31, reproduisent, avec quelques interversions et de légères modifications de forme, les 32 canons du projet de Seripandi (dont le 29° est omis).

Au cours de ces rédactions successives, la pensée du concile s’est faite de plus en plus claire et précise.

Le concile affirme que la justification doit être complétée par l’accomplissement des préceptes divins, pour que le juste puisse espérer la gloire ; que les préceptes divins ne sont impraticables pour personne ; que, si l’observance des préceptes dépasse les forces de la nature déchue, Dieu est là qui accorde les secours nécessaires pour l’accomplissement du devoir, toujours possible de cette manière aux enfants de Dieu. Par là, si le juste ne peut se fiai ter d’éviter tous fl’s péchés véniels, du moins il peut et doit, avec le secours divin, éviter tons les péchél mortels et persévérer ainsi dans la justice, (.’est la un article de. foi

défini par le concile. Saint lugustin ; i : iii écrll : Deus Impossibilia non jubet, srd jubendo monet, ci facere quod possis ri petere quod non possis, Le concile ajoute.

pour mieux marquer sa pensée : ri iidjtirnl ni possis.

Cet article de foi s’oppose à [’hérésie protestante, qui

ptétend que la foi seule rend l’homme digne de l’héritage ((’leste. Prétention inadmissible quc condamnent lainl Paul, marquant par l’exemple de Jésus christ

D1CT, Dl rHBOl ( 1 1IOL.

lui-même la nécessité des œuvres, principalement des œuvres de pénitence, et saint Pierre, recommandant d’assurer, par de bonnes œuvres, notre vocation et notre élection.

La doctrine des deux apôtres condamne pareillement l’impiété luthérienne affirmant que le juste, dans ses actes bons, pèche toujours, au moins véniellement, et même mérite les châtiments éternels, voir t. vin] col. 2150 ; elle condamne aussi le rigorisme des novateurs, d’après lequel l’espérance d’une récompense suffit à vicier l’acte bon accompli principalement à la gloire de Dieu, voir Espékange, t. v, col. 657 ; Mérite, t. x, col. 7Il sq., et surtout col. 760. A ce trait doctrinal (qui concerne plutôt l’honnêteté de la vertu d’espérance, et qu’on retrouve au c. vi. cf. Denz.-Bannw. , n. 809 ; Cavallera. n. 889) correspond, dans le décret De juslificatione. le can. 31, Denz.-Bannw. n. 841 ; Cavallera, n. 892.

Multiples sont les canons qui se réfèrent à ce chapitre. Ils n’intéressent pas tous au même degré la question de la persévérance.

Can. 20. — Si quis homiSi quelqu’un dit que

nem justificatum et quanl’homme justifié et aussi par tumlibet perfectum dixerit fait qu’on voudra n’est pas

non teneri ad observantiam tenu à l’observance des coni mandatorum Dei et Ecclemandements de Dieu et de

siæ sed tantum ad credenl’Église ; qu’il lui suffit de

dum, quasi vero Evangelium croire, comme si l’Évangile

sit nuda et absoluta promis- était la simple et absolue

sio vitæ alterna ; sine condipromesse de la vie éternelle

tione observationis mandasans condition de l’obser torum, A. S. Denz.-Bannw., vance des commandements,

n. 830 ; Cavallera, n. 892. qu’il soit anathème.

La foi ne suffit pas au juste pour assurer sa persévérance dans la justice : il faut encore les œuvres, c’est-à-dire l’accomplissement des préceptes de Dieu et de l’Église. La promesse évangélique de la vie éternelle est faite sous cette condition absolue. Soutenir le contraire serait une hérésie. Ce canon est d’ailleurs encadré des canons 19 et 21 qui affirment l’existence de préceptes s’imposant aux chrétiens. La même idée principale inspire ces deux canons : l’Évangile exige autre chose que la foi, les œuvres ne sont pas indifférentes pour le chrétien, et les dix com mandements le concernent. Jésus a été donné aux hommes aussi bien comme législateur que comme rédempteur. Pour se garder dans la justice, la foi ne suffit donc pas ; il faut la pratique des bonnes œuvres et l’obéissance aux préceptes.

Mais une objection se présente naturellement. Cette pratique est-elle possible ? Est-elle possible, même à l’homme déjà justifié ? Dans le c. m. le concile a déjà répondu à cette question. Le canon 18 anathématisera la réponse négative des réformateurs.

Can. 18. — Si quis dixerit, si quelqu’un dit qu’à Dei prsecepta homini etiam l’homme justifié et constitué Justiflcato < ! aub gniiia conen grâce, l’accomplissement

stituto esse ad observandimi des Commandements (le Dieu

impossibilia, A. s. Deux.- est impossible, qu’il soit ana-Bannw. , n. X2X-, Cavallera, thème, n. 892.

Les protestants avaient proclame a l’cnvi l’impossibilité de pratiquer la loi divine, même pour l’homme justifié ; et ils en concluaient qu’il n’j a en nous aucune justice actuelle et quc. de leur nature, toutes les œuvres des jusles sont des péchés mortels. Cf. Luther,

issert. ortie., 2, 31. 32..iti. édlt. de Welmar, i. vii, p. 103, 136 sq. ; Mélanchthon, Loct, ! nrtas. De peecato, dans Corp. reform., i xxi, p. 1 15 ; Apolog. confessionis aug., ! >< tmpleitont legis, ibid., i. jcxvi, p. i » 0 ; Calvin. Antidoium concilii Tridenttnl, sess. m. c m. ibid., i. xxxv. p. 158 sq. ; Institution chrétienne, I. il. c. mi. "> : i. in. i xi. 9 ; i xxxt, p, 101 sq : i kxxh

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