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PERSÉVÉRANCE. LA CONTROVERSE PÉLAGIENNE
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nous avoir confiance : Je récit de la tempête apaisée nous y invite. In Matth. commentarii, xi, G, P. G., t. xiii, col. ()2(i s(j. Sur ces textes d’Origène et la suite des idées, voir G. Hardy, Origène (coll. Les moralistes chrétiens). Paris, 1932, p. 44-77. Une phrase typique résume bien la pensée d’Origène : « Le vouloir et le courir de l’homme ne sufïisent pas pour remporter le prix. C’est Dieu qui achève la victoire par son secours. Notre perfection n’a pas son couronnement de nousmêmes : c’est Dieu qui en est le principal artisan. » De principiis, t. III, c. i, n. 18, P. G., t. xi, col. 289.

5° Les Pères grecs du IVe siècle. — Bien qu’ils s’attachent surtout à venger la liberté humaine des attaques manichéennes et gnostiques, les Pères grecs du ive siècle ont cependant reconnu l’impossibilité pour l’homme, sans la grâce de Dieu, de se maintenir ferme dans l’accomplissement du devoir. « Chaque jour, écrit saint Athanase, le Christ nous entraîne à la piété, nous incite à la vertu, nous enflamme du désir des choses célestes, nous révèle la connaissance du Père, nous inspire la force contre la mort. » Orat. de incarnatione, xxxi, P. G., t. xxv, col. 139. Saint Basile est plus précis : « Ceux qui auparavant étaient stériles et destinés aux flammes (de l’enfer), dès qu’ils ont revêtu le Christ, ont recouvert la stérilité de leur vie par la grâce du Christ. » Homil. in ps. XXVIII, n. 5, P. G. t. xxix, col. 296. « Personne ne peut combattre le démon, à moins de recourir à la protection de la puissance du souverain Maître, pour frapper l’ennemi par la foi. » In ps. xxxi i, n. 3, col. 328. Et, dans les tentations, c’est dans la grâce de Dieu qu’il faut placer notre espérance. Cf. Epist., cxl, n. 1 ; clxxiv, in fine ; ccxix, n. 1 ; ccxx, P. G., t. xxxii. col. 585 sq., 652, 812, 813 sq. Cf. E. Scholl, Die Lehre des hl. Basilius von der Gnade, Fribourg-en-B., 1881, p. 113 sq. « Pour vouloir le bien, dit saint Grégoire de Nazianze, se référant à Rom., ix, 10 (plus exactement, pour vouloir bien, PoùXecrOat xa>toç), l’homme a besoin du secours de Dieu ; le choix du bien est un don de la divine miséricorde. » Orat.. xxxvii, 13, P. G., t. xxxvi, col. 297. Saint Grégoire de Nysse, d’une part, affirme l’insuffisance de notre nature, De prop. sec. Deum, P. G., t. xlvi, col. 289 sq. ; d’autre part, la possibilité avec la grâce d’accomplir intégralement le devoir, car la loi divine n’oblige pas l’homme à ce qui dépasse la nature : « Il ne nous demande pas de devenir oiseau, ne nous ayant pas donné des ailes. » De beatitudinibus, orat. vi, P. G., t. xliv, col. 1265. Cf. J.-B. Aufhauser, Die Heilslehre des hl. Gregorius von Nissct, Munich, 1910, p. 164 sq.

Même note chez saint Jean Chrysostome : « Dix mille efforts ne peuvent nous faire produire le bien, si nous n’avons pas le secours d’en-haut. » In Gen., homil. lviii, 5, P. G., t. liv, col. 513. Impossibilité de vaincre les tentations. In I Cor., homil. xxiv, 1, P. G., t. lxi, col. 198 ; Homil. in paralytic, 2, P. G., t. li, col. 51. Mais, par contre, avec la grâce, possibilité de surmonter les tentations, loc. cit., et de parvenir à la persévérance finale. In Gen., homil. xxv, 8, P. G., t. lui, col. 228. Cf. In Act., homil. xxiii, 3, P. G., t. lx, col. 182 ; In Heb., homil. xvi, 4, P. G., t. lxiii, col. 126 ; In Matth., homil. lxxvi (lxxvii), 4, et In I Cor., homil. ix, 2, P. G., t. lviii, col. 699 ; lxi, col. 77.

Sur la doctrine de saint Cyrille d’Alexandrie, voir Weigl, Die Heilslehre des hl. Cyrillus von Alexandria, dans Forschungen zur christl. Lit. und Dogmengeschichte d’Ehrhard-Kirsch, t. v, fasc. 2-3 (1905), p. 251 sq.

6° Les Pères latins antérieurs à la controverse péla gienne exaltent encore, eux aussi, le libre arbitre, sans

négliger toutefois la nécessité du secours divin pour

agir conformément aux exigences de la vertu.

Tertullièn enseigne non seulement la nécessité et

l’efficacité de la grâce par rapport a nos libres décisions, De anima, c. xi.i, P.L. (1805 ;. t. ii, col. 764, mais encore la possibilité de persévérer pour celui qui a reçu le baptême avec une vraie pénitence, be pœnitenlia,

c. vi, P. L.. t. i, col. 1349-1350, S’adressant aux mai tyrs, il insiste sur le dur combat qu’ils sont obligés de livrer pour garder toujours l’Esprit saint en eux, et sur la nécessité de fortifier leur esprit contre les trahisons de la chair. Ad martyres, c. i, /'. L., t. i, col. 691 sq. Cf. A. d’Alès, L'/ théologie de Tertullièn. Paris. 1905, p. 270-272.

Avec saint Cyprien. nous avons une doctrine plus complète et plus précise. Commentant les paroles de l’oraison dominicale : « Pour que la volonté divine soit faite en nous, écrit-il, il est besoin de son secours et de sa protection, parce que personne n’est fort par ses propres forces. » De dominica orutione, c. xiv, P. L. (édit. 1865), t. iv, col. 545. La grâce baptismale lui a fait comprendre à lui-même que tout ce que nous pouvons vient de Dieu ». Epist. ad Donalum, 4, édit. Hartel, t. i, p. 6 ; cf. Testimoniorum, t. III, c. iv, id., p. 116. Le baptême, en effet, donne, par la grâce, le pouvoir de faire ce qui, avant le baptême, était impossible. Ad Donalum, loc. cit. On sait d’ailleurs que saint Augustin, dans la controverse pélagienne, cite fréquemment saint Cyprien, tout particulièrement la lettre Ad Donalum, 5, 14, 15. Ces textes, dit à juste titre A. d’Alès, « manifestent la continuité de la tradition chrétienne depuis saint Paul ». La théologie de saint Cyprien, Paris, 1922, p. 23. On consultera également le De dominica oralione, c. xii-xxvii ; cf. d’Alès, op. cit., p. 25-28.

La pensée de saint Hilaire est également très nette : « Il faut que nous soyons aidés et dirigés par la grâce, pour réaliser en nous l’ordre des justifications prescrites. » In ps. cxrin, lit. i, n. 12, P. L., t. ix, col. 509. « La miséricorde nous est donnée pour que nous demeurions fidèles au service de Dieu. » Id., lit. xvi, n. 10, col. 610.

Saint Ambroise : « Voyez, partout et toujours la force divine coopère aux efforts humains ; personne ne peut édifier sans le Seigneur, personne ne peut se préserver sans le Seigneur, personne ne peut commencer quelque chose sans le Seigneur. » In Luc, t. II, n. 84, P. L., t. xv, col. 1583. Cf. pour la résistance aux tentations, In ps. XLIII, 71, t. xiv, col. 1123.

Voir d’autres autorités citées par Lange, De gratia, n. 49, 179-180.

En résumé, jusqu'à Pelage, les formules sont encore générales ; elles affirment cependant, d’une manière explicite, la nécessité de la grâce pour faire son salut, pour demeurer fidèle à Dieu au cours de la vie, spécialement par la victoire sur les tentations. Sans Dieu, cette fidélité — disons cette persévérance — est impossible.

/II. LES PÈRES PENDANT LA COXTimrERSE PÉLAGIENNE. — 1° Saint Jérôme. — Dès le début de la controverse pélagienne, saint Jérôme prit position d’une façon très nette. Voir Pélagianisme, col. 689. Sa théologie n’est pas toujours précise ; dans certains passages du Dialogus adversus pelagianos, il ne distingue pas assez le secours spécial de la grâce du concours général requis pour tout acte de la créature. Cꝟ. t. I, n. 3, P. L., t. XXIII, col. 575. Mais, en ce qui concerne la nécessité de la grâce pour la persévérance dans le bien, il est très explicite : » D’après les pélagiens. dit-il ironiquement, le Christ n’aurait pas dû dire : veillez et priez, mais levez-vous et résistez, car vous avez votre libre arbitre et… vous n’avez pas besoin d’autre secours. » Id., t. II, n. 16, col. 552. Au t. III, n. 2. il affirme que l’impeccance absolue ne peut être attribuée qu'à Dieu et au Verbe incarné. Son raisonnement vaut pour la persévérance dans le bien : « Ce que je