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    1. PERFECTION CHRETIENNE##


PERFECTION CHRETIENNE. DEGRÉS

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tance spéciale, dans les commandements, au précepte de l’amour de Dieu et de l’amour du prochain, en un mot à la charité ; il était donc tout naturel que l’on se demandât si la perfection de la vie chrétienne ne consisterait pas spécialement dans la perfection de la charité. La réponse ne pouvait être douteuse et saint Thomas la lisait en toutes lettres dans Col., ni, 14 : super omnia autem hœc, carilatem habele, quod est vinculum perfectionis ; ce que la Glose commentait ainsi : ctt’tera præcepta perfection faciunt, in quantum scilicet ad caritatem ordinantur, caritas autem omnia ligat, cf. C.ont. retrah., c. vi ; quia scilicet omnes alias virtutes quodammodo ligat in unilalem perfectam, dit saint Thomas, au Sed contra de la q. clxxxiv, a. 1. Mais bien d’autres textes de l’Écriture se présentaient encore à l’appui de la thèse ; notamment I Tim., i, 5 : finis præcepli caritas est ; où la Glose déclarait expressément : caritas est finis, ici est perfeclio ; præcepti, id est prseceptorum omnium, quorum impletio est dilectio Dei et proximi ; cf. (’.ont. retrah, c. vi.

La raison, par laquelle saint Thomas justifie cette prédominance accordée à la charité dans la perfection, est tirée du principe philosophique quod unumquodque dicitur esse perjecium in quantum altingit proprium fmem, qui est ultima rei perfectio ; or, c’est la charité qui nous unit à Dieu, qui est ultimus finis humanie mentis ; donc scciindum carilatem specialiler atlenditur perfeclio christianse vit se. Voilà toute la preuve de la q. clxxxiv, a. 1. D’autres preuves pourraient être tirées du rôle que joue la charité parmi les vertus, selon saint Thomas : toutes les autres vertus dépendent d’elles aliqualitcr, q. xxiii. a. 1, ad l l, m ; elle en est motor, mater et radix. De carit., a. 3.

L’ad 2 nm de l’a. 1 de la q. clxxxiv soulève une question de vocabulaire, qui a divisé les théologiens, cf. Garrigou-Lagrange, Perfection chrétienne et contemplation, t. i, p. 170-171. Dans le titre et dans le corps de l’article, saint Thomas employait le terme specialiler pour caractériser la part de la perfection de la charité dans la perfection tout court ; comme spécialement « s’oppose à généralement », on peu ! dire que, selon saint Thomas, la perfection de la vie chrétienne consisterait généralement dans la perfection de toutes les vertus, dans l’accomplissement parfait de tous les commandements, et spécialement dans la perfection de la charité, dans l’accomplissement parfait du commandement de l’amour de Dieu et du prochain. Mais voici que l’ad -’"" paraît faire de la perfection de la charité l’essence même de la perfection chrétienne, la perfection des autres vertus n’en étant plus qu’un élément accidentel, comme la couleur de la peau par rapport à la perfection du corps humain : specialiler devient simpliciter : et ideo secundum caritatem aitenditur simpliciter perfeclio christianse vitse, sed secundum alias virtutes secundum quid ; et quia quod est simpliciter est principalissimum ri maximum respectu alioTum, inde est quod perfeclio nirilalis est principalissima respectu perfectionis quæ attenditur secundum alias virtutes. Comme on le voit, la terminologie de saint Thomas est un peu flottante : principal et secondaire ne sont pas tout à fait synonymes d’essentiel et d’accidentel. Sur ces questions de vocabulaire, consulter Suarez, De statu perfectionis, c iii, qui fait justement remarquer qu’il pourrait bien n’y avoir la qu’une question de mots, Cf. n. 5 et n 22. I.a perfection de In vie chrétienne consiste plus spécialement encore dans l’amour de Dieu (II’il’, ’i < i wi. a..{ ; Cont, gent., l. lll. c. cxxx, cxxxi, cxxxrv ; be carttale, a. ii, ad 6 Bn| j (’.ont. retrahentes, c. vi : l >< perfeclione vitse tptrtlualis, c. n et vi). si la perfection chrétienne consiste spécialement dans la charité, il est bien évident qu’elle consistera dans la peib i hou de l’amour de Dieu d’abord ri seulement en second lieu dans la perfection de l’amour du prochain : car les deux préceptes de la charité ordinem quemdum ad invicem habent secundum ordinem carilatis ; nam id quod principaliter caritale diligendum est, est summum bonum, quod nos beatos effleit, scilice Deus ; secundario vero diligendus ex caritale est proximus. .. primo igiiur et PRiNCiPALii er consistit spiritualis vitse perfeclio in dilectione Dei… ; secundario vero consista spirilualis vitse perfeclio in proximi dilectione. De perf. vitse spir., c. n ; cf. Cont. retrah., c. vi : patel igiiur quod pr^cipue in affecta caritatis ail Dcum perfeclio christianse vitse consistit.

Il s’ensuit que quanto plus fteri potest quod etiam aclu mens feratur in Dcum. tanto vita hominis perfectior eril, utpote fini intimior. Cont. gent., t. III, c. cxxx ; et que, par conséquent, la vie contemplative est la souveraine perfection : optimum hominis est ut mente Dco adhærcat et rébus divinis ; summa perfeclio humanæ vita’in hoc consistit quod mens hominis Deo vacel, ibid., c. cxxxi ; contemplativa vita etiam in hoc perfeelior est, quod paucioribus indiget ; ad quam quidem vilam perlinere videtur quod lotaliter homo divinis rébus vacet : quam quidem perfectionem doclrina Christi homini suadet, ibid., c cxxxiv. Cf. De perf. vitse spirit., c. vi : etsi comprehensorum perfeclio non sil nobis possibilis in hac vita, œmulari lamen debemus ut in similitudinem perfectionis illius, quantum possibile est, nos trahamus, et in hoc perfectio hujus vitse consistit ad quam per consilia invilamur… ; omnia igiiur consilia quibus ad perfectionem invitamur, ad hoc pertinent ut animas hominis ab affeclu rerum temporalium averlatur, ut sic liberius mens lendat in Dcum contemplando, amando et ejus voluntatem implendo.

Quelque parfaite que soit la vie contemplative, elle ne représente pas encore pourtant le sommet de la charité et, par conséquent, de la perfection : quidam in lantum deleclantur in vacatione divinse contemplationis, quod eam deserere nolunt, etiam ut divinis obsequiis mancipentur ad salulrm proximorum ; quidam vero ad lantum culmen caritatis ascendant, quod etiam divinam contemplationem, licet in ea maxime delectentur, prsetermittunt, ut Deo sentant in salulrm proximorum… ; et hœc perfeclio est proprie prselatorum et prsedicatorum et quorumeumque aliorum, qui procurandse saluti aliorum insislunl. De carit., a. 11. ad (ium.

II. Les degrés or les espèces de perfection.

A vrai dire, les degrés de perfection que saint Thomas distingue dans la charité. De perf. vitse spirit., c. m. en constituent plutôt de véritables espèces, dans plusieurs desquelles on peut encore reconnaître des degrés proprement dits.

1° t. a perfection suprême, absolue, ou perfection simpliciter (IIMI^, q. xxiv, a. S ; q. clxxxiv, a. 2 : De carit., :. Kl : De perf. vitse spirit., c. iii). En ce qui concerne l’amour de Dieu, en quoi consiste toul spé cialement la perfection, primus ci summus perfectionis gradua divinse dilectionis convenit soli Dco, soit que l’on considère cet amour ex parle dilecti ou ex parle diligrnlis. l’.x parle dilecti, le degré suprême de la perfection consiste /// aliqnid lantum diligatur quantum ililigibilr est ; ex parle diligentis, ni aliquid diligatur secundum totam facultatem diligrnlis. Or, Dieu est infiniment aimable, et. par conséquent, aucune créature ne peut l’aimer aillant qu’il mérite d’être aimé, parce qu’aucune créature ne peut aimer Infiniment.. De perf. vitse spirit., c. m. Les autres textes eilés n’ajoutent rien a cet expose : seulement ce qui est nommé ici primus ri summus perfectionis qradus est appelé perf ection a lise lue a l’art, 2 de la q, ci xxxiv ci perfection simpliciter dans le De caritale. 2° L" perfection des bienheureux, ou perfectio I’ii : ii. "U lie. rOTALIS ium>im. OU