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PÉNITENCE. SAINT THOMAS, EFFETS DU SACREMENT

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ment comme dans les autres sacrements. III a, q. i.xxxi, a..5. ad 3 UI ». Cf. ad 5 un déjà cite, col. 975. On peut d’ailleurs appliquer au sacrement de pénitence l’efficacité que saint Thomas attribue en général à

tout sacrement par rapport à la grâce. Cf. III a, q. i.xii, a. 1, 4 ; De veritate, q. xxvii, a. 4.

D’une manière générale, saint Thomas parle de même dans ses œuvres de jeunesse. « La contrition…, en tant que partie du sacrement, opère la rémission des péchés, par manière de cause instrumentale », et il souligne que la disposition de l’agent à l’action se ramène à la cause efficiente. Suppl., q. v, a. 1. Ayant ainsi distingué la cause matérielle drspositive qu’est la vertu de pénitence et, d’aulre part, la cause efficiente sacramentelle, il ajoute : « Dieu seul est cause efficiente principale de la rémission du péché ; mais, de notre part, il peut y avoir une cause dispositive. Et, de même, une cause sacramentelle, car les formes des sacrements sont les paroles par nous prononcées, qui ont la vertu instrumentale d’introduire la grâce, par laquelle sont remis les péchés. » Ibid., ad lum. Voir, pour la confession, partie du sacrement, q. ix, a. 1 et 3 ; mais surtout q. x, a. 1 et 5 : « la confession générale sacramentelle opère, en vertu du pouvoir des clefs, pour la rémission des péchés. »

Dans d’autres textes, saint Thomas semble dire que l’efficacité du sacrement n’atteint pas directement la grâce, mais une disposition préalable à la grâce et exigitive de la grâce, lorsqu’il n’y a pas, de la part du sujet, un obstacle. Pour les sacrements en général, In 7Vum Sent., dist. I, a. 4, qu. 1 ; pour le sacrement de pénitence en particulier, Suppl., q. xviii, a. 1 : « Le pouvoir des clefs a, d’une certaine façon, pour objet la rémission de la faute non pas en la causant, mais en y disposant », voir aussi ad lum et ad 2um, et cf. a. 3.

Les commentateurs sont embarrassés devant ces divergences. La plupart des thomistes pensent que saint Thomas a parlé, dans le commentaire, avec trop d’indulgence pour les idées en cours et, pour les ménager, a enseigné, sur la causalité des sacrements, une opinion que plus tard il a rétractée. Quelques auteurs soutiennent cependant que saint Thomas est resté fidèle à l’enseignement d’une causalité simplement dispositive. Pour le sacrement de pénitence, voir tout particulièrement De Nooght, O. S. B., La justification dans le sacrement de pénitence d’après saint Thomas d’Aquin, dans les Ephem. theol. Lovan., . v, 1928, p. 226256 ; A propos de la causalité du sacrement de pénitence, M., t. vii, 1930, p. 663-675 ; Gottler, op. cit. Toutefois, il faut observer ici que la plupart des partisans de la causalité perfective affirment l’impossibilité de maintenir, dans cette opinion, l’hypothèse de la confession valide et informe. Il semble cependant difficile d’admettre que saint Thomas ait rétracté Suppl., q. ix, a. 1, par Suppl., q. xxix, a. 8, comme l’insinue Hugon, Tractatus dogmatici, t. iii, Paris, 1931, p. 525.

Effets du sacrement de pénitence.

1. Effet principal,

rémission du péché mortel par l’infusion de la grâce habituelle, et rémission de la peine éternelle. — La vertu du pouvoir des clefs opère ici instrumentalement ex opère operato le même effet que Dieu produit directement dans la justification ex opère operanlis. C’est donc en réalité la grâce opérante habituelle qui accompagne l’application valide et fructueuse du sacrement. On retrouvera ici les distinctions déjà marquées à propos de l’aboutissement de la contrition parfaite : infusion de la grâce et rémission de la faute, mais aussi mouvement du libre arbitre, acte de foi et acte de pénitence intérieure informés par la charité. Ce n’est pas une transformation d’attrition en contrition, cf. Suppl., q. i, a. 3 ; c’est la substitution à un acte passager, émis sous l’influence de la grâce actuelle, d’un

état habituel de charité, où tout acte de pénitence intérieure sera acte de la vertu de pénitence, parce qu’informé par la charité. Tel nous semble être le res et sacramenium envisagé par saint Thomas, III a, q. i.xxxiv, a. 1, ad 3um. Sans cette pénitence intérieure, devenue vertu habituelle par l’effet du sacrement, le pécheur ne pourrait faire sienne la grâce, res sacramenti, qui lui est infusée et qui expulse le péché. Mais, p : n elle, le pécheur qui, précédemment, était simplement allritus, est désormais contritus, parce que - - quel que soit le motif de sa contrition — la douleur et la haine qu’il voue au péché sont en lui sous l’influence de la charité.

Cet exposé de la pensée de saint Thomas appellerait un complément relatif à la production de la grâce dans l’âme. La grâce n’est pas créée, mais » concréée » : en tant que, par sa toute-puissance, Dieu élève l’âme, douée d’une potentialité obédientielle. à un état ou un acte supérieur. C’est ce qu’on pourrait appeler l’adaptation de l’âme à l’ordre surnaturel. Cf. De veritate, q. xxvii, a. 3, ad 9um ; Sum. theol., III », q. xi, a. 1.

Le res et sacramenium, pénitence intérieure, est donc cette adaptation de l’âme à un état supérkur à celui qu’elle avait auparavant, par rapport au péché : on comprend que l’effet du sacrement doive passer d’abord par la pénitence intérieure « formée >, avant de se manifester dans l’état de grâce récupérée. Et, comme l’affirme saint Thomas, cette pénitence intérieure tire toute sa valeur et son efficacité du sacrement extérieur reçu soit effectivement, soit en désir. 7n IVnm Sent., dist. XXII, q. ii, a. 1, ad 2um.

Serait-il permis de voir, dans l’adaptation de l’âme à la réception de la grâce, l’explication des mystérieuses « causalités dispositives », dont on a voulu - — bien à tort, semble-t-il — faire un système spécial de causalité sacramentelle chez saint Thomas ? Sur ce système, appliqué à la pénitence, on lira Billot, Le sacramentis, t. ii, th.iv ; Buchberger et Gottler, dans leurs ouvrages déjà cités ; Schultes, Reue und Busssakrament, Paderborn, 1907 : Hugueny, Z.ape71(7ence, t. i, note 3 ; t. ii, note 63, sans compter les disciples de Billot.

Par delà l’effet dénommé res et sacramenium, l’effet principal auquel s’arrête la vertu du sacrement est donc la rémission du péché mortel par l’infusion de la grâce habituelle et de la charité. C’est précisément parce que l’infusion dépend de la rémission, qu’il est nécessaire que tous les péchés mortels soient remis ensemble. III a, q. lxxxvi, a. 3 et ad 4um. De plus, « la faute étant remise, l’état d’aversion de l’âme à l’égard de Dieu disparaît, en tant que, par la grâce, l’âme est unie à Dieu et, par conséquent, la dette de peine éternelle disparaît en même temps ». A. 4 et ad lum. Mais la conversion désordonnée au bien créé n’est pas nécessairement détruite dans sa totalité ; aussi, même après la rémission de la peine éternelle, peut-il encore rester quelque dette de peine temporelle. Ibid., et Cent, gent., t. IV, c. lxxii ; cf. In 7Tum Sent., dist. XIV, q. ii, a. 1, sol. 2. De plus, le péché, même pardonné, laisse après lui des habitudes dangereuses, reliquiee peccati, dispositions mauvaises plutôt qu’habitudes, mais qui, tout affaiblies et diminuées que les laisse l’absolution, devront néanmoins être combattues et vaincues. Ibid., a. 5.

2. Effets secondaires.

a) Rémission des péchés véniels. — Le péché véniel peut être remis dans la pénitence-sacrement ; mais il peut être remis sans la pénitence-sacrement. Toutefois, il ne peut être pardonné sans une pénitence au moins virtuelle et, par conséquent, il ne peut l’être au pécheur en état de péché mortel. Tout ce qui est capable d’exciter en notre âme la ferveur de la charité ou d’y infuser la grâce sanctifiante, concourt à la rémission des péchés vé-