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PÉNITENCE. LA DOCTRINE AVANT SAINT THOMAS


tels, être faite à un prêtre, à qui seul a été donné par Dieu le pouvoir de lier et de délier. Il rapporte l’opinion de Bède, concédant qu’on puisse confesser les péchés véniels à de simples fidèles, à condition que ce soit sans mépris du pouvoir sacerdotal. Pour lui, il trouve plus prudent et plus sûr de confesser tous les péchés, mortels et véniels, au prêtre, parce qu’il a le pouvoir de lier et de délier. Summa, p. 448, 454. Dans sa Summa confessorum, maître Paul déclare qu’il n’est pas nécessaire de confesser les péchés véniels à un prêtre. Car il existe plusieurs autres moyens de rémission : en particulier, pour les religieux, la confession générale faite en commun et le chapitre des coulpes, ces deux derniers moyens consacrés non par le droit, mais par la pratique de l’Église. Bibl. Casin., t. iv, p. 196 ; cf. Duellius, op. cit., p. 69.

2° Diacres ou laïques, minisires extraordinaires de la confession. — La doctrine et la pratique déjà signalées antérieurement au IVe concile du Latran se poursuivent quelque temps encore après le concile. La plupart des auteurs admettent qu’en cas de nécessité on peut, certains même disent qu’on doit, accuser ses péchés même mortels à des personnages non revêtus du caractère sacerdotal.

Si Guillaume d’Auxerre semble muet sur ce point, nous trouvons, au sujet de la confession des péchés mortels aux laïques, des allusions très nettes chez le dominicain Jean de Trévise, spécialement à propos du secret de la confession. Cod. vatic. lat. 118 7, fol. 6 v°. Sans attacher d’importance aux historiettes dont Césaire d’Heisterbach agrémente sa doctrine, on doit reconnaître que cet auteur est partisan de la confession des péchés mortels, en cas de nécessité, à de simples laïques ; bien plus, en cas de danger de mort, à des infidèles, comme l’avait déjà enseigné avant lui Pierre le Chantre ; bien plus, sans aucun danger de mort, ni même de réelle nécessité, il admet la confession des péchés mortels à de simples laïques, rapportant le fait d’un moine laïque ayant reçu de son abbé l’autorisation de confesser une femme qui ne voulait pas se confesser à un prêtre. Homilia, ii, n. 3, dans J. A. Coppenstein, Venerabilis Cœsarii Heistcrbacensis sermones morales, Cologne, 1615, p. 73. Au point de vue scripturairc, il appuie sa thèse sur la parabole du Samaritain, Luc, x, 30 sq. : le prêtre qui passe symbolise le confesseur, qui, en vertu de son office, peut porter remède ; le lévite représente tout autre homme à qui, en cas de nécessité, on peut confesser ses fautes. Homil., iii, n. 18, dans Coppenstcin, op. cit., p. 88. Pour les récits légendaires, voir Dialog., dist. III, de eonfessione, c. ii, iii, xxi, xxviii, éd. cit., p. 112, 11311 1, 136-137, 145. Cf. A. Meister, Die Fragmente der Libri VIII miracutorum des Câsarius von Heisterbach, t. II, c. xxxiii, dans Rômische Quarlalsclirift, t. XIII, supplément 14, Rome, 1901, p. 111-113.

Si Jacques de Vitry admet qu’on puisse, en cas de nécessité, confesser ses péchés mortels à un compagnon non prêtre, il n’en fait jamais, pas même à l’article de la mort, une obligation réelle. Serm., p. 232. Il en est de même, semble I il. de Luc de Tuy, qui indique, sans l’imposer, la confession au prochain en cas de nécessité : m nécessitas cmerqil, ut non possit quis hnbrrr presbyterum, cum tordis contritione saluai confestto ml proxlmum vel « </ Deum (donc, pas nécessairement ml proxlmum). Op. rit., p. 211. En sens contraire, voir l’Interprétation de G. Gromer, Die Laicnbeich.tr Un ttittelalter, Munich, 1909, p. 37. note 1.

La théorie de Guillaume d’Auvergne est plus nuancée. Cel auteur distingue deux absolutions, celle pii est donnée par le prêtre, en vertu du pouvoir des clefs, et celle qui est donnée par de simples fidèles 011 liai des clercs non prêtres. L’absolution, non sacramentelle, des clercs non prêtres et des laïques, est

suffisante, d’après certains auteurs, pour remettre les péchés véniels. Sur la confession faite aux diacres, voir Confession, t. iii, col. 898-899. En ce qui concerne la confession des péchés mortels aux laïques, l’évêque de Paris ne l’autorise qu’en un cas, quand le laïque plus instruit et d’une vie plus exemplaire serait plus apte que le prêtre à corriger et à instruire le pénitent. La confession, en effet, a un double but, remettre les péchés, corriger le pécheur : ce dernier but peut être atteint plus parfaitement dans la confession à un simple laïque. De plus, Guillaume accorde au diacre le pouvoir, non de donner l’absolution, mais d’imposer une pénitence ; le laïque ne peut que donner des conseils salutaires. De sacramentis, édit. citée, p. 472-473.

C’est en distinguant la confession sacramentelle et la confession, acte de la vertu de pénitence, qu’Alexandre de Halès enseigne que, sous ce dernier aspect, la confession peut être faite à un laïque. Mais il ne l’impose jamais, pas même dans le cas de nécessité : en ce cas, la volonté de se confesser suffit au salut. Sum. theol., part. IV, q. xix, membr. 1, a. 1, p. 596. Néanmoins, une telle confession est fort utile. De toutes façons, la confession faite à un laïque ne réalise pas la fin principale pour laquelle a été institué l’aveu sacramentel, c’est-à-dire la réconciliation du pécheur avec l’Église. Seul, le prêtre possède ce pouvoir réconciliateur. Sans qu’Alexandre ait précisé sa pensée, il semble clair que la confession aux laïques comporte l’aveu des péchés même mortels. Cf. Teetært, op. cit., p. 299 ; P. Amédée de Zedelghem (= Teetært), Doctrine du maître franciscain, Alexandre de Halès…, dans Études franciscaines, t. xxxvii (1925).

La doctrine de saint Bonaventure reprend les mêmes idées. Elle distingue confession-sacrement et confession-acte de vertu. La confession-acte de vertu a pour but de faire paraître le pécheur tel qu’il est, de lui enlever toute l’hypocrisie et par là de lui obtenir la guérison morale. Elle peut donc être faite à tous ceux qui peuvent secourir le pénitent, l’aider de leurs conseils, prier pour lui, à tous ceux devant qui le pécheur peut s’humilier, qu’ils soient clercs ou simples laïques, à la seule condition, qu’ils ne soient pas excommuniés ou retranchés de l’Église. In IVum Sent., dist. XVII, part. III, a. 1, q. 1 et ii, p. 451-453. Toutefois, en aucun cas, la confession aux laïques n’est nécessaire à la justification : il suffit d’avoir la volonté de se confesser. Id., q. 1, ad 6um, p. 451. La confession faite aux laïques n’est d’ailleurs jamais un sacrement ; parce que la partie formelle, le pouvoir des clefs, manifesté dans la formule indicative de l’absolution, fait ici défaut. Id., dub. 1, p. 463 ; q. 1, ad 6 ura ; q. ii, p. 451, 453. Dans la confession aux laïques, l’absolution ne peut être que déprécative, d’une valeur purement subjective.

Hugues de Saint-Cher est peu explicite sur la question de la confession aux laïques ; il semble cependant l’admettre en cas de nécessité. Bruxelles, bibl. royale, cod. Il 422-11 423, fol. 96 r°.

Au contraire, Albert le Grand a nettement exprimé sa pensée. Il traite de la confession aux laïques dans la dist. XVII, a. 39 et 58-59. Dans l’a. 39, il enseigne que la confession privée des péchés mortels doit être faite au prêtre, mais qu’en cas de nécessité on peut, sans toutefois y être obligé, la faire à un laïque. La confession faite au laïque diminuera les peines en vertu de la confusion qu’elle excite. Mais le pécheur doit ensuite refaire son aveu au prêtre, le prêtre seul pouvant changer les peines purgatives en peines expiatrices, remet (re une partie des peines temporelles et réconcilier le pécheur avec l’Église. Ht ces effets ne sauraient élu produits par la confession aux laïques, parce que cette confession n’est pas sacramentelle, Dans l’a U 59, la théorie semble quelque peu différente. Albert y enseigne que, dans le cas de nécessité, la confession