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PÉNITENCE, SOLUTIONS DÉFINITIVES, LA THÉOLOGIE


tance qu’elle avait eue dans l’ancienne discipline canonique, importance que le régime des pénitentiels n’était pas fait, du moins à première vue, pour atténuer. Et, pourtant, ce sont les pénitentiels eux-mêmes qui ont contribué pour une bonne part à changer la signification de cet élément dans la rémission du péché. Du jour où il a été possible d’être réconcilié avant d’avoir accompli toute la pénitence, pénétrait dans la théorie une idée toute nouvelle. A en juger par la pratique de l’ancienne Église, on agissait autrefois comme si les expiations entreprises par le coupable élaient la condition sine qua non (ne disons pas la cause) de la remise du péché (par l’Église et) par Dieu. Un saint Augustin n’avait pas une confiance illimitée dans la pénitence in extremis, qui ne laissait point, à son gré, au coupable le temps nécessaire pour accomplir les œuvres satisfactoires. Ci-dessus, col. 806. Mais les âges suivants avaient vu se multiplier, au contraire, ces cas de pénitence imposée à la dernière minute.

Se conjuguant avec cette influence de la pratique continentale, l’action des pénitentiels insulaires devait conduire peu à peu à l’idée que l’efficacité de la satisfaction n’est pas du même ordre que celle des autres éléments de la pénitence. Un jour viendra où certains ordines pœnitenliæ mettront l’imposition, même de la pénitence après l’absolution, témoignant ainsi que la satisfaction n’est plus qu’accessoire. Cette donnée est définitivement acquise à la fin du xiie siècle, à telles enseignes que certains auteurs prétendent qu’il n’est pas indispensable qu’une satisfaction soit imposée par le prêtre. Ils font valoir l’exemple de la Madeleine à qui Jésus remet ses péchés sans lui imposer de pénitence : la contrition de la pécheresse était assez forte pour suppléer toute satisfaction. Tout le monde ne va pas à ce laxisme. Alain de Lille exprime au mieux ce qu’était la pratique des gens sages et il explique consument que trois éléments concourent à la vraie pénitence : la contrition (avec le ferme propos), la confession et la satisfaction. P. L., t. ccx, col. 302 B.Et.si le prêtre n’imposait pus <le pénitence au pécheur, soit par manque « le discernement (quia indiscretus), soit par honte naturelle, soit parce qu’il suppose dans celui qui onfesse une contrition surabondante, le pénitent n’en devrai ! pas moins racheter ses péchés par l’aumône, le jeune, les veilles, les oraisons. Que si le paroissien s’aperçoit que son curé manque de discernement, qu’il s’en aille ensuite consulter quelque confesseur plus savant. Ibid., col. 301 B. Il y avait donc, à l’époque, chez certains confesseurs, une tendance à Me partie de la pénitence. Alain de Lille , coup sûr. d’avis que la rémission des péchés ne

laisse pas d’être acquise en ces conditions ; mais, si elle

pas absolument indispensable, la satisfaction n’en

pas moins, à ses yeux, une très grande impor tance. En quoi consiste donc son efficacité, d’après

les théologiens de l’époque

b) Son efficacité Cette question est touchée par Pierre Lombard, IV Sent., dist. XX el XXI, où se mêlent d’ailleurs quelques questions accessoires ; le

Maître des Sentences est ici, comme bien souvent.

l’écho de la doctrine et de la pratique courante. C’est beaucoup plus dans ces deux distinctions qu’A faut chercher son Idée personnelle que dans la dist. XVI, ’ir. m. s. OÙ il ne fait guère qu’aligner les textes patrUtlques sur la nécessité de satisfaire pour le

péché Encore, dans les deux distinctions XX et XXI, la qu istlon n’est elle résolue que par rapport 6 des cas d’espèce. Il s’agit, en définitive, de personnes qui,

pour une raison ou pour l’autre, n’ont pi] accomplir la prévue par les textes Ides mourants par

exemple), ou qui, avant eu affaire ave » un confesseur discernement (indiscretus), n’ont pas reçu une proportionnée a leur faute. Cette sali t n

tion pour le péché, si elle n’est pas fournie ici-bas, devra l’être dans l’au-delà, et cette considération amène le Maître à développer la doctrine du purgatoire. En somme, et bien qu’il ne le dise pas très explicitement, ses explications supposentles donnéessuivantes : le péché grave n’est pas seulement une privation de l’amitié divine ; il expose le coupable au châtiment divin et tout spécialement au châtiment éternel de l’enfer. Le péché remis (par quel moyen ? nous nous le demanderons plus loin), ce châtiment est commué en des peines temporelles ; ces peines temporelles, ou bien le pécheur les purge ici-bas, tout spécialement, mais pas exclusivement, par les satisfactions pénitentielles, ou bien il les purge dans l’au-delà, le purgatoire étant ordonné par Dieu à la rémission totale des peines dues au péché pardonné. Sauf le vocabulaire, qui n’est pas encore parfaitement établi (il l’est peut-être mieux dans VEpitome theologise christianæ attribué à Abélard, c. xxxvii), c’estla doctrine même qu’élaboreront les grands scolastiques et c’est peut-être le point où les docteurs du xiie siècle ont apporté le plus de clarté. Nous avons dit, ci-dessus, col. 926, comment les pénitentiels ou les Summa ; confessorum font usage de cette doctrine dans la pratique : au pécheur qui renâcle aux pénitences qu’il lui propose, le confesseur représentera vivement que ce qu’il n’expiera pas ici-bas. il devra, bon gré mal gré, l’expier en purgatoire. Cette conclusion, le pseudo-Augustin l’avait déjà très clairement exprimée : prius purgandus est igné purgationis qui in aliud sœculum distulit fruttum conversionis… Sludeat ergo sic quisque delicta corrigere ut post mortem non oporteat pœnam tolerare. De vera et falsa psenit., xvin, 34, P. L., t. xl, col. 1128. Or, c’est incontestablement à ce texte que se rattachent, par voie directe ou indirecte, tous les docteurs du xiie siècle.

2. La confession.

Et c’est encore à ce même texte qu’il faut faire remonter les précisions relatives au rôle de l’aveu dans la rémission du péché.

a) Sa nécessité. — Sur ce point, la pratique a devancé, dans ses précisions, toutes les théories, et c’est elle, finalement, qui a eu raison des opinions divergentes qui tendaient à se produire. Il y avait au moins deux siècles que les textes canoniques locaux urgeaient pour les fidèles l’obligation de la confession, quand parut le traité pseudo-augustinien. Loin donc qu’il ait engendré la pratique, il n’en est que le reflet, prenant seulement à tâche de défendre la nécessilé de la confession contre les difficultés que certains théoriciens y pouvaient faire. A la vérité, les textes canoniques, ordonnances synodales ou décrets conciliaires expriment, avant tout, un précepte ecclésiastique. Leurs injonctions ne lient pas d’ordinaire d’une manière expresse la nécessité de la confession avec l’accès au sacrement d’eucharistie. En d’autres ternies, elles ne font pas de la confession (entendue au sens de la partie pour le tout) le moyen indispensable pour remettre le pécheur dans l’amitié divine. Le fait, néan moins, que c’est surtout à l’époque du carême et aux approches de la communion de Pâques que l’Église urge l’obligation de recourir à la pénitence, dont la

confession est désormais l’une des parties liés en vue. ce fait était gros de signification. Ce serait presser les textes que de leur faire dire que, d’ores et déjà. l’Église

considérait l’aveu des taules comme le seul moyen normal d’en obtenir le pardon ; c’est seulement quand

cette discipline de la confession obligatoire aura été imposée a l’ensemble de la chrétienté (au moins latine)

par le décret du Latran qu’Usera loisible de tirer cette conclusion. Bonaventure et Thomas d’Aquin le feront ave< beaucoup de force. Mais ils reconnaissent, en même temps, que la décrétale du pape Innocent III

a fait, sur ce point, la lumière ; ils n’ignore mI pas les discussions qui oui eu lieu à l’âge précédent sur la