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PÉNITENCE, SOLUTIONS DÉFINITIVES, LA PRATIQUE


des simples prêtres l’est encore bien davantage par rapport aux fautes qui sont avouées par les fidèles. Ce n’est point ici le lieu d’examiner l’origine, le développement et l’extension de la réserve ecclésiastique (voir l’article spécial, et déjà les textes de droit mentionnés ci-dessus, col. 896). Disons seulement qu’à la fin du xii 8 siècle les grandes lignes du système sont définitivement arrêtées. Certaines fautes sont exclusivement réservées au pape, d’autres aux évêques, et ces réserves fonctionnent régulièrement. Le nombre est considérable de ceux qui sont obligés, pour se faire absoudre de leurs fautes, d’entreprendre le pèlerinage de Rome et de se présenter au pape lui-même ou au grand pénitencier. On lira, dans les Constitutions d’Odon de Sully, la liste des cas dont les simples prêtres ne sauraient absoudre et qui sont réservés soit à l’évêque, soit au p^pe. C. vi, n. 4-7. Bien entendu, ces listes ont dû subir des variations dans le temps et dans l’espace. La réserve n’empêche pas seulement de donner l’absolution ; elle soustrait, la faute visée à l’appréciation du confesseur, qui ne peut même pas imposer de pénitence ; le rôle du prêtre se borne, les aveux du pénitent entendus, à enseigner à celui-ci l’instance à laquelle il doit s’adresser et les voies et moyens à prendre. L’imposition d’une pénitence pourrait donner au coupable l’idée qu’il est déjà en règle avec l’Église ; d’après les Constitutions d’Odon de Sully, le confesseur, s’il ne peut absoudre pour une raison ou pour l’autre, ne doit pas imposer de pénitence. D’autres textes, à la vérité, donnent une impression un peu différente. Dès qu’il y a chez le pénitent bonne volonté, même imparfaite, il est bon de lui imposer quelque pénitence, même si l’absolution ne lui peut être donnée. Voir le texte de Robert de Flamesbury, cité col. 926. C’est dans l’esprit de la décrétale d’Alexandre III, mentionnée col. 896. Sur la cessation de toute réserve in articulo morlis, voir l’article Réserve. Il convient cependant de relever le fait qu’il a fallu un certain temps pour que se généralisât la pratique d’accorder les sacrements in extremis aux condamnés à mort.

2. Le rite de la pénitence privée.

L’essentiel a été dit col. 906. On a décrit l’ensemble d’après un ms. de la première moitié du xie siècle. Il serait intéressant de pouvoir reconstituer des séries de textes qui feraient ressortir les simplifications qui vont s’opérer. Mais les matériaux pour une telle étude sont encore loin d’être Inventoriés, publiés, critiqués. Des quelques textes, très incomplètement publiés, soit dans Morin, soit dans Jacques l’élit, on a l’impression que les cérémonie vont se simplifiant. Encore ne faudrait-il pas croire que les formulaires donnés par les livres liturgiques aient été toujours observés à la lettre. Le départ a dû se faire, vers cette époque, entre ce qui était cérémonie accessoire et parties plus ou moins essentielles. Mais on ne se trompera guère, pensons-nous, en imaginant qu’une confession individuelle devait prendre alors beaucoup pi us de temps qu’aujourd’hui. On ne perdra pas de vue, d’ailleurs, que les paroisses de l’époque, soit dans les campagnes, soit dans les villes, étaient beaucoup moins populeuses qu’aujourd’hui : la besogne des confesseurs en était certainement facilitée.

3. Fréquence de /</ confession. De même, est-il Impossible de donner une idée îles variations infinies qui te remarqueraient dans la question de la fréquentation de la pénitence. Il faut résister à la tentation

iliser les quelques textes que l’on peut recueil lir dans la période considérée. I.n voir quelques-uns à l’article Confession, col. 886 On peut penser, néanmoins, qu’à la fin du xiie siècle, l’obligation pour les fidèli s de se COnf< sser, au moins une fois pur an, était

chose courante, il faut rire, au contraire, beaucoup plus circonspect quand l’on parle de confession (et

DUT m. i ni m | r mol.

aussi de communion) obligatoire aux deux autres fêtes de l’année : Pentecôte et Noël. Les divers statuts synodaux, en prescrivant au moins la confession quadragésimale, n’ont pas conscience, d’ailleurs, d’innover et ne font, en somme, que consacrer l’usage qui régnait partout et, semble-t-il, depuis assez longtemps. Ceux d’Odon de Sully distinguent bien entre le conseil adressé aux fidèles de se confesser assez fréquemment et le précepte de se confesser en carême : Fréquenter presbijtcri moneant ad confessionem et prsecipue ab initio Quadragesimæ instanter pr^ecipiant venirc generaliter ad confessionem. C. vi, 13, P. L., t. ccxii, col. 61. Un passage d’Alain de Lille, presque contemporain de ces statuts, doit en être rapproché. Alain suppose le cas d’une personne qui, ayant bien examiné sa conscience, peut se rendre le témoignage qu’elle n’a point commis de fautes graves. Mais des fautes de cette nature ont pu lui échapper : ce sont là ces fautes cachées, occultes, dont le psalmiste dit : ab occultis meis munda me (Ps., xviii, 13). Ces fautes occultes (on voit en quel sens il faut ici prendre le mot) sont remises sans doute dans la confession générale (ce confiteor développé dont on trouve le texte et l’emploi dans Honorius d’Autun, ci-dessus, col. 913), et pourtant il faut conseiller à cette personne d’aller trouver le prêtre, pour qu’elle n’ait pas l’air de mépriser la règle ecclésiastique : tamen consilium est ut ad sacerdolem accédât, ne regulam ecclesiasticæ instilutionis prœlermiltere videalw. Il doit s’agir du temps du carême, quoi qu’il en soit de l’origine du titre qu’on lit en tête du développement : Nutlius peccali conscius ad con/essarium accedere débet in Paschate. P. L., t. ccx, col. 299.

Ainsi, en dehors de la confession quadragésimalc, qui semble être entrée définitivement dans les mœurs, il y a certainement des confessions que nous pourrions appeler de dévotion. Elles ont dû se multiplier vers la fin du xiie siècle ; certains monastères ont pu exercer, à ce point de vue, une influence bienfaisante, c’est le cas, très certainement, pour l’abbaye de Saint-Victor, aux portes de Paris. Mais il faut attendre, pensons-nous, l’apparition des deux grands ordres mendiants du début du xme siècle pour voir cette pratique se généraliser. Prêcheurs et mineurs ont joué, par rapport à la diffusion de la confession fréquente, le rôle que les moines cettes et anglo-saxons avaient joué dans la propagation de la pénitence privée.

4. Quelques singularités de la pratique.

a) La confession aux laïques. — Une des plus singulières conséquences de l’importance que l’on attache de plus en plus à l’aveu, à la confession, c’est la pratique de la confession aux laïques. Sur ce sujet, fort intéressant au double point de vue théorique et pratique, l’ouvrage capital est désormais A. Teetacrt, La confession aux laïques dans l’Église latine depuis le VIIIe jusqu’au xiv siècle, Paris-Bruges, 1926.

Les âges antérieurs n’avaient pas entièrement ignoré cette pratique, et un texte célèbre de Bède lui fournissait un appui. Ci-dessus, col. 869. Mais, en définitive, il ne s’agit guère, dans les textes de l’âge carolingien, que d’une coutume monastique, ne portant guère que sur les fautes légères. C’est seulement au xi siècle que l’on voit apparaître l’idée qu’en cas de nécessité et en l’absence d’un prêtre il faut s’adresser a un laïque pour lui confesser ses fautes graves, et mériter par là le pardon divin. I >e plus en plus, en etlel. la persuasion s’implantait qu’une faute ne peut être pardonnée si elle n’est confessée de bouche, tout comme le péché originel et les péchés personnels ne peuvent et n remis à l’infidèle que par le baptême. Sur ce (1er nier point, on était arrivé, depuis assez longtemps, à l’idée qu’en (as de nécessité Imite personne peut el doit baptiser ; parallèlement l’idée s’introduit au

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