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    1. PÉNITENCE##


PÉNITENCE. LA RÉFORME CAROLINGIENNE, LA PRATIQUE 878

communication dont est frappé, eu égard aux diverses circonstances, le crime de sodomie ou de bestialité, ce chiffre permet de conclure la durée de pénitence qu’il faut imposer à celui qui s’est rendu coupable de fornication simple. Voir les canons 53 et 54 de la D tcheriana ; le can. 32 du premier pénitentiel de Raban .Maur, P. L., t. ex, col. 492. Il y a là une contamination assez curieuse des disciplines orientale et occidentale.

3° Impossibilité de faire disparaître ta pénitence privée. Coexistence des deux disciplines. — L’anonyme auteur de la Dacheriana ne raisonnait que dans l’abstrait ; mais ceux qui vivaient davantage dans la réalité ne pouvaient manquer de voir que le rétablissement intégral et pour toutes les fautes, quel que fût leur degré de publicité, de l’ancienne discipline était en fait une impossibilité.

C’était plus qu’une impossibilité ; c’eût été une monstruosité au point de vue moral. Pour criticables (lue lussent certains points de la pénitence secrète, il était évident que cette pratique n’avait pas laissé d’amener de très heureux résultats. La confession, évidemment secrète, dont l’Anglo-Saxon Alcuin vantait les bienfaits, dont il s’efforçait de promouvoir la pratique, qu’il recommandait aux jeunes gens comme le plus sûr moyen de triompher du péché, ne pouvait pas être condamnée sans plus. On pouvait regretter qu’elle donnât à certains pécheurs, par suite surtout des rédemptions trop aisées, de trop grandes facilités, qu’une prime parût également accordée aux récidivistes el aux habit udinaires. Mais certaines précautions pouvaient parer à ces dangers. Par ailleurs, les réformateurs étaient trop férus de l’antiquité ecclésiastique, pour qu’il leur vînt à la pensée de donner à la pénitence publique un congé définitif.

Sans que l’on puisse dire comment la chose se lit, mi seul que se forme, dans les premières années du iv siècle, une jurisprudence, qui finit assez rapidement par s’ériger en principe et par prendre force de loi : « A faute publique, pénitence publique ; à faute secrète, pénitence secrète. » C’est bien le sens, si ce ne Boni pas tout à fait les termes, du canon 2b’d’Arles (813), du can 31 de Reims (813), du can. 25 de Chalon (813). De ce principe nous rencontrerons d’autres expressions.

Si naturelle que la chose nous paraisse, elle ne laissait pas de constituer, par rapport à la discipline canonique du passé, une considérable innovation. La discipline ancienne, nous l’avons dit, ignorait cette distinction entre fautes occultes et fautes publiques : elle appliquait à tous les péchés graves le même traitement, dont l’essentiel était l’excommunication au sens étymologique du mot, quoi qu’il en fût de la publicité plus ou moins grande de l’expiation. Surtout, elle constituait le pécheur, même réconcilié, dans une catégorie spéciale de chrétiens. La coutume insulaire, de son côté, ne taisait non plus aucune distinction entre les failles d’après le degré (le leur publicité Pour bien des péchés qui avaient pu scandaliser la communauté, elle connaissait une rémission dont les principaux actes se passaient exclusivement entre le prêtre et le pécheur. Sans doute, elle ne se mettait

I’i I h peine de savoir si telles ou telles pénitences imposées pouvaient désigner la personne coupable de

fautes secrètes à l’attention de ses contemporains ; mais, par compensation, elle n’imposait pas d’ordinaire aux pécheurs publics de sat isfacl ions d’un genre

CUlier, et il ania d’assez bonne heure que la réconciliation suivit de fort près, sinon immédiate ment. la « onfession.

>i proprement cette absence de sanctions parti cullèrea et cette rapidité de la réconciliation à l’endroit des auteurs de scandale, qui émeuvent la bile

de nos réformateurs. Perrari sunt liodie in Ecclesia, écrit Jonas d’Orléans, qui talem agant pœnitentiam, qualem antiquorum Patrum pœnilentium exempta el auctoritas canonica sancil. Quis namque criminis reus, qui utique pxiiilenlia publiai debuit mulclari, cingulum miliiise deponit, et a liminibus Ecclesia’. cozluque fidelium arcetur et a Christi corpore separatur ? Quis porro in cinere et cilicio more pœnilentium antiquorum lamenta pœnitudinis suscipil ? Ne voit-on pas, à cause de cette disparition de l’antique discipline, tel ou tel personnage, coupable d’homicide ou de quelque autre crime, se joindre tout aussitôt après à l’assemblée des fidèles : cras conventui fulelium irreuerenler se adjungere non veretur. El ideo Ecclesiam, cui pa-nilendo salisfacere debuit, scandalizare convincitur. Les fidèles murmurent contre une telle présence, contre ces gens qui, chargés de crimes connus, viennent participer avec eux à la table du Seigneur. Et Jonas conclut : Tout ceci dit non des crimes occultes, mais des publics : Hsec non de occultis, sed de manifestis criminibus dicta sunt, quæ dum publiée admittuntur, publica psenitentiu’salis/aclione diluantur necesse est. De instit. laie, I, x, P. L., t. evi, col. 138 sq.

Bien qu’il ne le dise pas expressément, Jonas laisse supposer, dans tout ce chapitre, que les pécheurs scandaleux dont il est question se sont mis en règle, tellement quellement, avec Dieu, par le recours au prêtre. Il y a très loin des abus qu’il signale ici à ceux dont se plaignait un C.ésaire d’Arles. Il reste, néanmoins, que les grands évêques de l’époque souhaitaient ardemment la reconnaissance du principe dont ce chapitre de Jonas est la très claire expression : « à faute publique, pénitence publique », ce qui importait la contre-partie : « à faute privée, pénitence privée >. Cette dernière idée, à défaut du terme, est clairement exprimée par le mot de Jonas que nous avons cité en dernier lieu.

Les réformateurs carolingiens eurent-ils conscience de l’innovation que leur principe constituait par rapport à l’ancienne discipline ? On pourrait le soupçonner à voir la manière dont certains ont modifié, pour les faire cadrer avec la pratique nouvelle, des textes palristiques, et tout spécialement le fameux texte de Gennade sur le succédané de la pénitence publique que constitue l’entrée en religion. Voir à ce sujet, Poschmann, op. cit., p. 98 sq. Rien de plus instructif que la mise en parallèle des deux textes suivants de Gennade et de Théodulfe.

Quem mortalia crimina

premunt, hortor prius publi ca pænitentia salisfacere, et

ita sacerdotis judicio récon cilia timi communioni socia ri… Sed et sécréta satisfac tione solvi mortalia crimina

non negamus, sed mulato

prias sœcidarl habita et con fessa religionis studio per vital correctionem et jugi imo

perpetuo tuctu ndserante

Deo veniam consequatur.

(icniiade. De reeles. dogm.,

n. 53, P. L., t. i.vin, col.

994.

Le rédacteur de la Dacheriana s’était contenté de reproduire tel quel le texte de Gennade : la modification quc Théodulfe fait subir à celui-ci est bien caractéristique. Pour le lecteur peu au conranf.il est bien difficile de trouver, dans la rédaction de l’évêque

d’Orléans, ment ion de la profession nionasl [que qu’exprimait si clairement l’auteur des Dogmes tccHstm tiques. Ce que’théodulfe demande pour la rémission des péchés occultes, ce n’est plus l’entrée en

religion, mais la confession secrète, et pourtanl son

Capitalia et mortalia cri mina dellenda sunt secun clum canoiuim et sanctorum

Patrum institutionem. Sed

et sécréta satisfactione solvi

mortalia crimina non nega mus, miitata tamen » rius oni ini intenlione et sirculari fac-Umtia siinal deposita, piss religionis confesso studio, pei

vita’correctionem et jugi

imo perpetuo luctu se sub mittente. Théodulfe, Ciipi lalare, P. L., t. CV, col. 271.