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PÉNITENCE. LES IV’e ET Ve SIÈCLES, LA DOCTRINE


Quant aux transformations qui se passaient alors dans la discipline orientale, il nous est impossible d’en juger. L’histoire du prêtre pénitencier de Constantinople, racontée par Socrates et Sozomène, ci-dessus, col. 798 sq., ouvre elle aussi quelque aperçu sur le fonctionnement d’une pénitence de caractère moins voyant que la pénitence publique. Mais tout ceci reste environné pour nous d’une ombre à peu près impénétrable. La façon dont parle Sozomène, comparant la discipline pénitentielle des Romains avec ce qui se passe à Constantinople (et, semble-t-il, dans son ressort), n’autorise-t-elle pas à penser que la pratique orientale n’avait rien de très apparent ?

/II. LES théories. — Les auteurs latins que nous avons consultés sur la pratique pénitentielle du ive siècle nous fournissent aussi quelques renseignements sur les idées que l’on se fait alors tant de la nécessité que de l’efficacité de cette pratique. En les lisant, on se rend compte que la controverse novatienne a clarifié un certain nombre de données et mis en meilleure lumière le parallélisme qui existe entre ce qui se passe sur terre, relativement au pécheur, et ce qui se passe dans le ciel. L’on prend en définitive une conscience plus nette de ce pouvoir des clefs que les novatiens entendaient mettre en question. C’est autour de cette idée du pouvoir des clefs que nous allons grouper les principales données rencontrées dans nos textes.

Existence du pouvoir des clefs.

C’est à Pacien

surtout et à saint Ambroise qu’il faut demander ce qu’ils en pensent.

Rappelons-nous ce que prétendent les novatiens. Si l’on va au fond de leurs théories, qui, à la vérité, ne s’expriment pas toujours d’une manière fort claire, la discipline pénitentielle demeure une affaire purement extérieure et, si l’on veut, terrestre. Tout se discute entre le pécheur et l’Église, sans qu’il y ait de contrepartie céleste. L’autorité ecclésiastique lie le pénitent (elle l’empêche de prendre part à la table eucharistique ) ; celui-ci doit, désormais, par ses œuvres satisfactoires, obtenir de Dieu son pardon ; cette expiation terminée. l’Église novatienne. tout au moins quand il ne s’agit pas de fautes qui sont directement contre Dieu, réadmet le coupable dans la communauté, mais il n’y a là qu’un geste extérieur qui n’agit en aucune manière sur la situation interne du pénitent. Positis ponendis, on pourrait dire que, comme dans les censures ecclésiastiques d’aujourd’hui, suspense, interdit. excommunication, tout se passe au for externe. Des relations entre le pécheur et Dieu. l’Église novatienne ne juge pas. (.’est ce qui explique sa sévérité (héritée d’ailleurs de la tradition) à l’égard de certaines fautes. Qui lésa commises restera indéfiniment séparé de la communauté, sans que l’autorité ecclésiastique entende par la condamner le coupable à la mort éternelle ;  ; » lui de prendre ses mesures pour rencontrer outre-tombe un juge miséricordieux

C’est en face de ces idées quc se trouvent l’acien et Ambroise. Reconnaissons d’ailleurs que la doctrine novatienne ne s’est jamais exprimée avec le schématisme que nous venons d’y mettre. Et C’est ce qui explique pourquoi la réfutation des catholiques manque parfois un peu de rigueur et de clarté. Ce que visent avanl toul nos docteurs, c’est la pratique novatienne ;

ils chen lient à lui enlever les prétextes qu’elle pensait trouver dans l’Écriture, ils distillent point par point les textes allégués ; ils montrent que l’attitude bien Veillante de lesus à I égard fies pécheurs autorise

l’Église a agir de semblable manière ; ils appuient sur la mlsi m. ordi qu’< x< iie saint Paul envers l’incestueux orinthe. Toutes choses qui prouvent que II lurail être blâmée pOUl accorder son pardon a elle au pécheur repentant.

i démonstration qu’a cet acte <<- l’Église cor respond un acte céleste ne laisse pas de présenter quelque faiblesse. Chose curieuse, Ambroise qui cite le texte : Tibi dabo claves ne songe pas à en tirer une preuve cogente. De pxii., i, vil, 33. Pacien est plus avisé dans sa première lettre à Sympronianus, n. t>, P. L., t. xiii, col. 1057, où il est très net : Les novatiens objectent : Dieu seul peut remettre le péché : Verum est, répond-il, sed et quod per sacerdotes suos jacit ipsius potestas est. Nam quid est illud quod apostolis dicit : (texte de Matth., xviii, 18) ? Cur hoc si ligare hominibus ac solvcrc non licebal ? An lantum hoc solis apostolis licel ? Ergo et baptizare solis licet et Spiritum sanctum dare solis et solis genlium peccaia purgare. Non, à coup sur ; les évêques ont hérité des pouxoirs des apôtres : Si ergo et hwacri et chrismatis potestas, majorum (et) longe charismatum ad episcopos inde descendit, et ligandi quoque jus ad/uit alque solvendi.

On voit que Pacien établit un parallélisme entre l’action des sacrements de baptême et de confirmation et l’action de la discipline pénitentielle. C’est sur ce point que va appuyer Ambroise qui aura des mots particulièrement heureux. De psen., i, viii, 34-3U : Le Seigneur a conféré à ses apôtres, dit-il, un certain nombre de pouvoirs : ses serviteurs feront en son nom ce qu’il faisait lui-même quand il était sur terre : Omnia ergo dédit, sed railla in lus hominis potestas est ubi divini muneris gralia vigel. Les novatiens prétendent faire usage de plusieurs de ces pouvoirs : ils imposent les mains aux malades, aux possédés ; ils baptisent et, dans ce baptême, ils entendent bien donner la rémission des péchés. Et Ambroise de les mettre en contradiction avec eux-mêmes : Cur baplizatis, si per hominem peccaia dimilti non licet ? In baptismo utique remissio peccatorum omnium est : quid inlerest, ulrum per pivniterdiam an per lavucrum hoc jus sibi dalum sacerdotes vindicent ? L’num in utroque mysterium esî ?Mais les novatiens nient cette comparaison entre la rémission des péchés dans le baptême et dans la pénitence : Sed dicis quia in lavacro operatur musleriorum gralia ? Que répond Ambroise ? Il affirme que nous avons ici deux manières identiques pour Dieu d’opérer : Quid in psenitentia ? Nonne Dei nomen operatur ? On regrette évidemment que l’évêque de Milan, tenant enfin cette idée d’action sacramentelle, ne la pousse pas davantage ; mais, si rapide qu’elle soit, l’indication est a retenir. Pour lui, comme pour l’acien, le baptême, la confirmation, la pénitence se présentent comme des rites mystérieux, n’hésitons pas à dire le mot : des rites sacramentels. A l’action extérieure de lier et de délier correspond une réalité intérieure qui ne peut être qu’en dépendance directe de Dieu. Ce que nous trouvons ici indiqué se rencontrerait également, mais avec moins de précision dans les autres documents de la controverse novatienne. il est remarquable, d’autre part, que

Pacien et Ambroise qui ne paraissent pas dépendre l’un de l’autre, rencontrent ainsi le même aigu ment exprimé presque dans les mêmes ternies. Cela tendrait à montrer que ce mode de raisonnement était assez répandu dans la discussion avec les sehisinatiques.

La Ici Ire i m de saint Léon, citée plus haut, résume, avec l’admirable précision que ce grand pape sait toujours donner a sa pensée, ce que nous venons d’entendre dire par ces orateurs : Sans les supplications

des prêtres, pas de rémission des péchés. Par la ré

libation ecclésiastique, au contraire, s’obtient la rentrée en grâce avec Dieu. En ce grand acte, en effet, le Christ intervient continuellement. P. L., t. liv, col. 1011.

2° i/</(/c d’action de ce pouvoir dis < lefa. l.a donnée précédente est une donnée essentielle et qui explicite, en dernière anal} se. des idées | radit tonnelles. Ci dessus col. 787 sq Comme tant d’au ! l’es idées du même genre.