Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 12.1.djvu/394

Cette page n’a pas encore été corrigée
773
774
PÉNITENCE. LE III® SIÈCLE, LA PRATIQUE


l’Église. L’idée, pourtant, est exprimée que la présence d’un pécheur risque de souiller la communauté. « Par-dessus tout, l’impiété de l’adultère est haie par Dieu, car elle ne fait pas seulement périr le pécheur lui-même, mais encore ceux qui vivent et conversent avec lui ; elle ressemble à la rage qui se transmet. » Hom., III, lxviii, P. G., t. ii, col. 153. Aussi bien l’adultère est-il, après l’infidélité, le plus grave des péchés. Episl. Clem., vii, 7, P. G., t. ii, col. 41. Mais, comme l’évêque est investi du droit de lier et de délier, où Se S^aeiç a Ssï SeGîjvai xal Xûceiç & Set Xuôrjvoa, ibid., 6, col. 41, cꝟ. 2, col. 35, comme il doit faire figure de médecin, aù-rov Bel tov 7rpoxa0£^6[i.evov îaxpoù TG7rov cTilxeiv, ibid., il faut bien conclure qu’il a quelque pouvoir sur la réconciliation des pécheurs. C’est donc exagérer la portée des textes que de dire, comme Cari Schmidt, que l’auteur de l’Epistola Clemenlis, tout comme celui des Homélies III, lxviii) (c’est le même personnage) ne connaît pas de rémission des péchés mortels par le pouvoir des clefs de l’évêque.

II. la pratique.

C’est de l’ensemble de ces documents qu’il faut essayer de dégager la pratique pénitentielle du iiie siècle. Leur simple revue a déjà fait entrevoir que cette pratique n’est uniforme ni dans le temps, ni dans l’espace. Nous essaierons de décrire les choses telles qu’elles se passaient à Carthage, vers 250, en signalant à l’occasion les divergences que nous avons pu noter. Mais, auparavant, nous devons attirer l’attention sur quelques événements qui ont eu une répercussion sensible sur la vie morale des communautés et, dès lors, sur l’usage de la pénitence. 1. La vie religieuse et morale à l’époque considérée. — 2. La pratique de la pénitence à Carthage vers le milieu du m » siècle.

La vie religieuse et morale à l’époque considérée.


1. Circonstances extérieures.

Inévitablement la vie des communautés chrétiennes dépend jusqu’à un certain point de la situation légale qui est faite au christianisme ; celle-ci influe tant sur le recrutement que sur les manifestations de la vie religieuse. Or, vue d’ensemble, la période considérée est, pour la nouvelle religion, une période de tolérance relative, coupée au milieu par les deux paroxysmes persécuteurs de 250 et de 258 et clôturée par la grande persécution du début du iv » siècle. Four ce qui est de la seconde moitié du ni » siècle, tous les témoignages s’accordent à en faire une période de tranquillité presque absolue, pendant laquelle le christianisme a recruté un très grand nombre d’adhérents, achevé la conversion des régions orientales de l’empire, entamé résolument celle de l’Occident. A une moindre échelle, les mêmes résultats axaient commencé à être obtenus dans la première moitié, et même un peu auparavant. Malgré des oppositions lentes encore à désarmer, le christianisme se faisait sa place au soleil. S’il ne faut pas prendre à la lettre le fameux mot de Tertullien : t Nous ne sommes que d’hier, et déjà nous remplissons tout, on doit en retenir que, vers l’année 200, la propagande chrétienne s’est intensifiée et a commencé à atteindre une traction appréciable de la population de l’empire.

2. Conséquence* Cet afflux de prosélytes n’a pas toujours été favorable au sérieux de la vie chrétienne, surtout dans Ici villes importantes. Ne tenons pas compte, plus qu’il ne convient, des déclamations de Tertullien, même avant son passage au montanlsme ; un homme de leni aussi mssis que Mdnl (vprien nous a témoin de la situation moral* de Carthage en f. De lapsis, (. v, i : elle n’eal rien molni qu’édifiante. A plus fort » raison, le* quelque* renseignement*

que nous avons sur la fin du siècle, dans les canons d’Elvire, par exemple, témoignent-ils que la monda nité gagne de plus en plus et que les compromissions avec la vie païenne ne sont pas rares ? Il a dû y avoir la même différence entre les grandes et riches Églises de la fin du iiie siècle et les petites communautés du milieu du iie, qu’entre le groupement formé autour de saint François d’Assise et les ordres religieux de la Renaissance.

A la vérité, l’Église a senti le danger que fait courir à la ferveur primitive un trop large recrutement. A l’entrée trop rapide des nouveaux convertis, elle a opposé la barrière du catéchuménat dont la discipline s’organise, d’une manière qui sera durable, vers la fin du iie siècle : l’on ne devient pas du premier coup chrétien de plein exercice. Nous sommes malheureusement assez mal renseignés sur la proportion respective, dans les communautés, des baptisés et des simples catéchumènes. Toujours est-il qu’en revêtant le néophyte de la robe blanche, au sortir de la piscine baptismale, l’Église, qui avait apporté à la formation de celui-ci un soin jaloux, pouvait, avec quelque confiance, lui dire les paroles que la liturgie a gardées : « Reçois cette robe blanche et rapporte-la sans tache au tribunal du Christ. » Cf. ci-dessus, col. 772. Hélas ! ce souhait, ou plutôt cet ordre, a dû plus d’une fois ne pas être suivi d’effet. Que de chrétiens auraient été empêchés de rapporter cetterobe sans tache, s’il n’y avait pas eu quelque moyen d’en effacer les souillures 1 3. Les crises morales.

Toutefois, dès le dernier quart du iie siècle, une crise morale a débuté en Orient, auquel l’Occident a dû finir par s’intéresser, la crise montanisle. Quoi qu’il en soit de ses origines et de ses caractères premiers, il est incontestable qu’elle a été, de la part de certains éléments de l’Église, une protestation contre le relâchement qui déjà se constatait. De là vient la faveur avec laquelle elle a été accueillie dans les milieux surtout où l’on était mal renseigné sur son point de départ. Pour donner quelque idée de ce qu’elle fut et des résultats qu’elle a amenés, on la comparerait assez volontiers, toutes proportions gardées, au jansénisme à ses débuts. Que le montanisme ait produit quelque effet sur beaucoup de gens d’Église et qu’il ait amené, en bien des lieux, les autorités ecclésiastiques à renforcer les mesures disciplinaires contre les baptisés en faute, c’est ce qu’il semble permis de supposer ; ce dut être dans les dernières années du iie siècle. On comprendrait assez bien, admise cette hypothèse, comment une vague de rigorisme aurait passé à ce moment sur l’Église. Sur l’existence de ce rigorisme, voir ci-dessous, col. 779.

Violentum non durât. Les circonstances extérieures qui, sous les empereurs syriens, favorisèrent le recrutement intensif de l’Église devaient amener quelque relâchement. La persécution de Dècc fut la pierre de touche, qui, au dire même de Cypricn, fit la discrimination entre les éléments sains et ceux qui étaient contaminés. Elle montra, hélas I que les premiers n’étaient pas la majorité. Le De lapsis, et l’on en dirait autant des témoignages venus de Rome et d’Alexandrie, nous montre que, dans l’ensemble, la tenue de la niasse chrétienne fut lamentable. Les défaillances ne se comptèrent pas. Bon gré, mal gré, il fallut bien que l’Église se résignât à la rentrée en masse des lapsi. C’était là une concession nécessaire, où l’on s’clTorça de sauver au moins les principes.

Mais cette attitude, qui était d’ailleurs celle du bon sens et même du sens chrétien, ne pouvait manquer de susciter les protestations de certains membres de l’Église, Quoi qu’il en soit des origines de la crise novatienne, son succès ne s’expliquerait pas, si les principes défendus p ; ir les premiers schlsmatlques pondu aux idées d’un certain nombre

des meilleurs chrétiens. Voir ; irt. NOVATIBN, t. XI,

col. S’il sq. Pour éloignées qu’elles (oient du centre de