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PÉNITENCE. LE NOUVEAU TESTAMENT


la perfection des primitives communautés. Sans parler de cas comme ceux d’Ananie et Saphire à Jérusalem, Act., v, 1-11, de Simon à Samarie, Act., viii, 18-24, il était immanquable que des scandales ne se produisissent de la part de chrétiens baptisés. A défaut de défaillances éclatantes, des fautes demeurées secrètes pouvaient troubler certaines consciences. Ce que saint Paul nous laisse entrevoir de la situation morale de la chrétienté de Corinthe, I Cor., v-vi, n’est pas très rassurant. Ces luttes, ces divisions ardentes dont il est question dans l’épître étaient bien regrettables ; et la façon dont l’Apôtre parle de la fornication et de l’impudicité, v, 12-20, paraît bien indiquer que ce vice, courant dans la ville de Corinthe, n’avait pas entièrement disparu, même chez les baptisés. Il n’était pas inutile de rappeler à ceux-ci les dispositions de pureté nécessaires pour prendre part au « repas du Seigneur ». Ibid., xi, 27-32. Des exemples récents avaient montré que ce n’était pas impunément que certains avaient, sans la pureté requise, mangé le corps du Christ et consommé son sang.

Pour un cas plus particulièrement grave et contre lequel l’Église locale n’avait pas osé ou pu sévir, Paul avait dû prendre une attitude très rigoureuse. I Cor., v, 1-13. Le chrétien coupable d’inceste avec la femme de son père avait été, par lui, « livré à Satan pour la mort de la chair », f 5. Cf. I Tim., i, 18-20. Si le sens de l’expression « livrer à Satan » n’est pas clair, une chose reste certaine, c’est que Paul entend exclure ce pécheur public de la communauté chrétienne. Faisant allusion à une lettre précédente (qui ne s’est pas conservée ) et où il recommandait à ses fidèles de ne point avoir de relations avec les impudiques, il leur fait remarquer que c’était le cas ou jamais, dans la conjoncture présente, d’appliquer cette monition. « J’ai simplement voulu vous dire de n’avoir point de relations avec un homme qui, portant le nom de frère, est impudique, ou cupide, 71Xeov£XTr, < ; (qui cherche à s’enrichir par des moyens illicites), ou idolâtre, ou injurieux (Xotôopoç), ou ivrogne, ou rapace (àpTraÇ, voleur, pillard), de ne pas même manger avec un tel homme… lietranchez le méchant du milieu de vous », f ꝟ. 9-18. Il faut rapprocher le trait final de Deut., xiii, 5 (Sept, « t Vulg. : içavieïç tOV 7rov7]pov èZ, ôu.wv ocôxciv : aufrrrs malum de medio lui) ; xvii, 7 ; XXII, 24. Ainsi, l’Apôtre prononce lui même la sentence que la communauté aurait dû rendre spontanément. L’incestueux sera écarté de l’assemblée chrétienne, sans doute, mais privé même des rapports ordinaires avec ses frères. C’était la peine de mort que le Deutéronomc prévoyait, aux passages ci-dessus, contre les coupables : c’est d’une sorte de mort civile que Paul entend frapper le Corinthien scandaleux. On remarquera la portée générale du verdict de l’Apôtre, il est destiné à faire en quelque sorte jurisprudence. La sentence portée contre l’incestueux pourrait et devrait l’être également, par les autorités responsables, contre les personnes coupables des autres fautes signalées concurremment avec ce crime. (Comparer avec cette énumération de fautes ce qui est dit, ibid., vi, 9-11.) Quoi qu’il en soit, nous avons ici une application tout à fait explicite du pouvoir de lierque l’Évangile avait confié aux apôtres, à l’Église.

Dans le cai présent, Paul a-t-il fait usage du pouvoir corrélatif de délier ? On devrait l’accepter s’il fil lait reconnaître, tic tout* évidence, dans l’homme ; < qui l’Apôtre recommande de pardonner, dans II Cor., it, 5-ll, le même qu’il avait condamné dans la lettre précédente. Tertullien montaniste contestait déjà dans le De pudieitla cette Identification que li i i atholiqui i

acceptaient. Les polémiques qui se sont élevées, .m

cours dis Ages, autour de la question du pouvoir des

clefs, ont rcssii--..- I. mêmes arguments pour et nuit le

l’identification sans apporter, nous semble-t-il, de clartés décisives. Restons-en sur un non liquet.

Aussi bien, et ceci n’est pas vrai seulement du cas particulier, nous sommes très loin d’être au clair, tant sur la possibilité qui restait aux pécheurs que les communautés primitives excluaient de leur sein, de rentrer en grâce avec elles et avec Dieu, que sur les moyens mis en œuvre pour accomplir cette réintégration, si elle avait lieu, et sur les effets produits par cette rentrée dans la communauté. On a dit à l’art. Confession, col. 833, ce qu’il fallait penser du texte Act., xix, 18, relatif aux gens d’Éphèse, qui, se repentant d’avoir cru à la magie, viennent s’accuser de leur faute et font un autodafé des livres incriminés ; des textes de Jac, v, 16, et de I Joa., i, 9. A leur défaut, certains critiques ont pensé que l’imposition des mains dont il est question I Tim., v, 22, n’était rien d’autre que le geste de réconciliation des pénitents. Voir l’art. Imposition des mains, t. vii, col. 1306-1313, où l’hypothèse est défendue avec beaucoup de pénétration. Mais la preuve de cette assertion nous semble très loin d’être faite, cf. art. Ordre, col. 1214 ; et il vaut mieux, dans l’état actuel du problème, ne pas trop urger ce texte. Il y a toutes chances, pensons-nous, que l’Église apostolique ait eu l’occasion d’exercer le pouvoir de lier et de délier qui lui avait été remis par le Sauveur, de faire usage du droit de remettre les péchés postérieurs au baptême ; mais les documents ne nous permettent guère de dire quelles ont été, dans ce passé très éloigné, les conditions de l’exercice de ce pouvoir. C’est en vertu surtout du principe de continuité que nous concluons que les choses se sont passées de la sorte ; nous ne le constatons pas.

3° A la vérité, il conviendrait d’être plus réservé encore en ces affirmations si l’on devait prendre à la lettre certains développements néo-testamentaires sur la quasi-impossibilité, pour une âme d’abord convertie et qui retombe en ses anciens errements, de revenir parfaitement à résipiscence. « Il est impossible, dit l’auteur de l’épître aux Hébreux, pour ceux qui ont été une fois éclairés, qui ont goûté le don céleste, qui ont eu part au Saint-Esprit, qui ont goûté la douceur de la parole de Dieu et les merveilles du monde à venir, et qui, pourtant, sont tombés, de les renouveler (ou d’être renouvelés) une seconde fois en les amenant à la pénitence, eux qui, pour leur part, crucifient de nouveau le Fils de Dieu et le livrent à l’ignominie. » Heb., vi, 4-7. Plus catégorique encore le passage suivant : » Si nous péchons volontairement après avoir reçu la connaissance de la vérité, il ne reste plus de sacrifice pour les péchés ; il n’y a plus qu’à attendre un jugement terrible et le feu jaloux qui dévorera les rebelles. Celui qui a violé la loi de Moïse meurt sans miséricorde, sur la déposition de deux ou trois témoins ; de quel châtiment plus sévère pensez-vous que sera jugé digne celui qui aura foulé aux pieds le Fils de Dieu, qui aura tenu pour profane le sang de l’alliance par lequel il avait été sanctifié et qui aura outragé l’Esprit de la grâce ? Car nous le connaissons, celui qui a dit : « A moi la vengeance I c’est moi qui la tirerai ! » Et encore : « Le Seigneur jugera son peuple. Il est terrible de tomber entre les mains du Dieu vivant. » Ibid. x, 26-31. De quoi l’on rapprochera, encore que la pensée s’y exprime avec moins de netteté, le texte relatif à la situation critique où s’est mis Ésafl : « Veillez à ce que personne ne manque à la grâce de Dieu ; à ce qu’aucune racine d’amertume ! venant à pousser des rejetons, ne cause du trouble et que la masse n’en soit Infectée. Qu’il n’ait parmi vous ni Impudique, ni profanateur, rcôpvoç *j (3£6t ; }.oc ;, comme Ésaii, qui pour un seul mets vendit son droit d’aînesse. Vous savezquc plus tard, oulant obtenir la bénédiction, il fut repousse, quoiqu’il la