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    1. PÉNITENCE - KEPENTIR##


PÉNITENCE - KEPENTIR. DOCTRINE DE L’ÉGLISE

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différent. Posons que la justification est essentiellement produite par le mouvement de l’âme qui, se sentant radicalement pécheresse, n’a « plus d’autre ressource que de s’abandonner à la divine miséricorde, avec la ferme confiance que, malgré sa misère, les mérites du Christ lui sont appliqués », cf. ici, t. viii, col. 2142, et nous avons du même coup la notion luthérienne du repentir. Au point de départ : le sentiment du péché, et n’entendons pas seulement des fautes actuelles dépendant de la volonté, mais dupéché originel dont la concupiscence n’est que l’un des aspects ; au centre : l’acte de foi (foi signifiant surtout confiance) en l’application qui nous est faite, sans aucun mérite de notre part, des infinis mérites du Christ ; au point d’arrivée : le sentiment de certitude que, les mérites du Christ nous étant désormais imputés, ce manteau couvre notre misère et nous permet de paraître avec confiance devant Dieu. Voir les références à ces divers aspects dans l’art. Justification ; cf. aussi art. Contrition, t. iii, col. 1674.

Et, pour prendre les choses davantage du point de vue du repentir, distinguons dans la pénitence deux stades, sur l’existence desquels s’accordent luthériens et réformés : 1, D’abord ce que Luther appelle la mortificatio, et la confession d’Augsbourg la conlritio, sentiment de terreur assimilable à celui que produisent les menaces de l’Ancienne Loi. Constat pœnitentia proprie his duabus partibus, altéra est conlritio seu terrores incussi conscientiæ agnito peccato, dit la Concession, art. 12. Un théologien de la seconde génération, Mart. Chemnitz, la définit fort exactement, en lui attribuant le nom de contrition : nihil aliud est quam quod agnoscimus, sentimus et fatemur nos propler peccata irrelilos teneri, nexibus judicii, ad œternam damnationem. Et nisi ex illis pavoribus et doloribus animas agnitione et fiducia misericordiæ propler Christum mediatorem eluctetur, mit in desperationem et in wternum exitium. Examen décret, conc. Trid., II a pars, de contrit., édit. de Francfort, 1606, p. 335. Ce que Calvin, encore qu’il ne mette pas aussi fort l’accent sur la terreur, avait déjà exprimé dans sa langue si énergique : c’est, dit-il, la disposition « par laquelle le pécheur navré du cautère de son péché et comme brisé de terreur de l’ire de Dieu demeure lié en ceste perturbation, sans s’en pouvoir despestrer ». Inst. chrét., t. III, c. iii, n. 4, Corp. reform., t. iv, p. 71. — 2. En second lieu, Vimmutatio, qui est aussi une vivificatio et que procure la foi, au sens des novateurs : Altéra (pars) est ftdes qux concipitur ex evangelio seu absolutione et crédit propter Christum remitti peccata, dit la Confession, à l’art. 12. Ce que répète l’Apologie de la confession d’Augsbourg : Nos addimus alteram partem pœnitentise de fide in Christum, quod in his terroribus debeat conscientiis proponi evangelium de Christo, in quo promittitur gratis remissio peccatorum per Christum. Debent igitur credere quod propter Christum gratis remittuntur ipsis peccata. Art. 12, De pœnitentia, dans J. T. Millier, Die sijmbol. Bûcher der evang. luth. Kirchc, p. 172. C’est là cette pénitence évangélique « par laquelle, comme dit Calvin, le pécheur estant grièvement affligé en soy-mesme, s’eslève néantmoins plus haut, embrassant Jésus-Christ pour la médecine de sa playe, la consolation de sa frayeur, le port de sa misère ». Loc. cit. Nous n’avons pas à discuter ici la question des effets de cette immutatio, de cette conversio sur la conduite ultérieure du converti. Voir sur ce point Justification, col. 2150 sq. ; il est incontestable que les premiers textes symboliques parlent des bonnes actions comme étant la suite naturelle et comme spontanée de la pénitence, quoi qu’il en soit de la doctrine de la satisfaction, dont ce n’est pas le lieu de parler ici.

Ce qu’il importe seulement de faire remarquer,

c’est que, tout au moins aux débuts de la Réforme, la pénitence s’identifie avec la conversion, apparaît dans la vie religieuse comme une crise, violente et passagère, qui a pour résultat de fixer le converti d’une manière qu’on pourrait croire définitive dans la bonne direction. Voir les textes signalés, art. Contrition, col. 1675. En insistant sur cette idée, le piétisme allemand et le méthodisme anglais n’ont fait que reprendre une vue que la scolastique protestante du xviie siècle avait quelque peu oblitérée. Mais piétisme et méthodisme ont surtout marqué, avec une force que les premiers réformateurs n’avaient pas connue, d’une part la nécessité, d’autre part le caractère quasi unique de cette crise qui doit inaugurer, pour ceux que la grâce a touchés, le début de la vie morale. Voir ces deux mots.

2° Doctrine de l’Église catholique. — Qu’il n’y ait, dans les critiques adressées par le protestantisme à certaines pratiques de l’époque, une part de vérité, nul ne songe à le contester, pas plus, d’ailleurs, que la justesse de certaines analyses psychologiques du sentiment de repentir. Mais ce contre quoi l’Église devait s’élever, c’était contre la conception systématique où venaient s’intégrer ces critiques et ces remarques.

1. La bulle « Exsurge » de Léon X (1520). — Dès les premiers moments, les théologiens catholiques relèvent, dans les paradoxes lancés par Luther, les propositions suivantes qui se rapportent plus spécialement à la pénitence-repentir (nous laissons de côté ce qui regarde le sacrement).

6. Contritio quæ paratur La contrition qui se préper discussionem, collatiopare par l’examen et la dénem et detestationern peccatestation du péché, travail torum, qua quis recogitat dans lequel (le pécheur) récaannos suos in amaritudine pitule sa vie passée dans animæ suæ ponderando pecl’amertume de son âme, en catorum gravitatem, multisoupesant la gravité de ses tudinem, fœditatem, amisfautes, leur multitude, leur sionem aeternæ beatitudinis, laideur, (en songeant) à la ac seternæ damnationis acbéatitude éternelle qu’il a quisitionem hæc contritio perdue, à la damnation éterfacit hypocritam, immo manelle qu’il a méritée, cette gis peccatorem. contrition ne fait que des

hypocrites et ne fait que ren dre davantage pécheur.

7. Verissimum est proverIl est bien vrai et plus bium et omnium doctrina de exact que tout ce qu’on nous contritionibus hucusque daa raconté jusqu’à présent sur ta prsestantius : « De cetero les (diverses sortes de) connon facere, summa pænitrition, le proverbe qui dit : tentia : optima pœnitentia « Ne pas recommencer c’est nova vita. » Denz.-Ban., le suprême repentir : la meiln. 746-747. leure pénitence, c’est une

nouvelle vie. »

Les autres articles relatifs à la pénitence, n. 8-14 (Denz.-Ban., n. 747-754), encore qu’ils visent plutôt le sacrement, permettent de dégager, eux aussi, la doctrine de Luther sur le repentir, que l’Église désapprouve.

2. Le. concile de Trente. — Il revient à deux endroits sur les notions connexes à celle de pénitence : d’abord dans la session vi sur la justification (se reporter pour le détail à l’art. Justification, col. 2164-2192), puis dans la session xiv, où il fut question ex professo du sacrement de pénitence. Voir ci-dessous : Le sacrement de pénitence au concile de Trente. Nous ne marquerons ici que ce qui se rapporte directement à notre question.

a) A la session ri. — Pour simplifier les questions et se débarrasser du problème que posent les rapports entre la seconde justification et la première, le concile, en décrivant le processus de celle-ci, choisit le cas d’un adulte qui entend pour la première fois parler du christianisme. Cf. c. iv, Denz.-Ban., n. 796. C’est la