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PÉNITENCE-REPENTIR. LES SCOLASTIQUES


jugement porté par l’àme sur telle action du passé. Celle-ci, au moins passagèrement, lui avait plu ; elle lui déplaît maintenant ; autant qu’il est en elle, l’âme coupable voudrait que ce passé n’eût pas existé, elle est donc aussi résolue à faire en sorte que l’avenir ne ressemble pas au passé. Partant de sa théorie du péché qui est aversio a Deo, conuersio ad creaturam, Augustin verra dans le repentir le mouvement inverse : conuersio ad Deum, aversio a creatura. Ce changement dans l’appréciation d’un acte passé peut s’accompagner de manifestations affectives : douleur intérieure, larmes de regret. Ces phénomènes affectifs, pour précieux qu’ils soient, ne sont pas néanmoins ceux que l’on met davantage en relief : tous nos auteurs insistent bien plus sur le rôle de la volonté que sur le rôle du sentiment. Ils ne laissent pas, néanmoins, de recommander les œuvres extérieures qui sont la manifestation du repentir. Ces œuvres prennent ou bien la forme de punitions que s’inflige le coupable : humiliations, jeûnes, macérations diverses ; ou bien la forme d’une compensation : aumône, assistance au prochain. Sans que l’on spécule beaucoup sur la manière dont ces bonnes œuvres contribuent à la rémission du péché, on y insiste avec beaucoup de force. C’est à elles que l’on pense surtout quand l’on traite des pénitents.

2. Motifs du repentir.

Le repentir a son premier principe dans la crainte de Dieu. On ne peut citer aucun Père qui verrait dans ce motif quelque chose de moins recommandable. Un tel sentiment de crainte n’est-il pas un acte de déférence à l’endroit du souverain domaine de Dieu ? Il n’exclut pas, d’ailleurs, d’autres motifs et, en particulier, la considération de la bonté divine, considération qui amène dans l’âme pécheresse le sentiment de son ingratitude. Pour autant, néanmoins, que nous en ayons pu juger, cette idée se présente plutôt à l’état implicite dans nos textes. On y insiste plutôt, nous semble-t-il, sur l’espoir que doit inspirer au coupable la pensée de l’infinie miséricorde de Dieu, pensée bien propre à provoquer dans l’âme pécheresse un sentiment d’amour envers la toute-bonté du Père céleste. Ajoutons que le principe de ces sentiments doit être cherché en dernière analyse dans une grâce divine. Dans la conversion du pécheur, c’est Dieu, en somme, qui fait la première démarche. Explicite surtout chez Augustin, cette idée prend, chez saint Grégoire, une forme d’une naïveté bien touchante.

3. Nécessite du repentir.

Que le repentir soit

considéré comme indispensable pour obtenir la rémission de nos fautes, cela va de soi. Préparation nécessaire au baptême, la pénitence est encore le moyen exclusif de porter remède aux fautes qui auraient suivi cette première rémission des péchés.

aucune œuvre de miséricorde, aucune macération extérieure ne saurait la suppléer. Cette planche de alul île mot est de Tertullien), qui la laisse échapper fait définitivement naufrage : pas de salut sans la pénitence. Dès lors, quelle imprudence que de la renvoyer a un avenir incertain I A la remettre sans cesse, "ii risque de n’y pouvoir plus recourir que trop tard. i ouïes ces objurgations sur la nécessité de la péni tence ne préjugent d’ailleurs en rien des modalités

diverses suivant lesquelles la pénitence doit s’accompllr et sur lesquelles nous aurons a nous expliquer ultérieurement.

I Effets du repentir. Justin, DiaL, 17. a un mot -sif poui carat ti i Isi i ces effets : La bonté de Dieu tient poui non pécheur celui qui, ayant péché, fail pénitence Les développements ultérieurs n’ap

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grâce avec Dieu et la remise de la peine soit éternelle, soit temporelle. Plus explicites sont-ils sur ce que l’on pourrait appeler les conséquences psychologiques du repentir qui a amené cette rémission. Cyprien notait déjà que la pénitence rend aux lapsi une nouvelle force pour affronter le combat ; nous avons entendu saint Grégoire célébrer l’entrain joyeux que communique à l’âme pécheresse la certitude du pardon. Il suffira d’ajouter, pour être moins incomplet, que, d’une part, il n’est point de péché si grave qui ne puisse être remis par la vertu du repentir, que, d’autre part, la rechute dans le péché ne doit pas être pour le coupable un motif de désespérer. Suivant leur tempérament, certains auteurs ecclésiastiques appuieront davantage sur cet aspect consolant (Jean Chrysostome, sur ce sujet, insiste d’une façon étonnante), tandis que d’autres parleront en même temps du danger qu’il y a de lasser la patience divine. Les deux idées sont dans l’Évangile et il n’y a pas à s’étonner de voir les Pères développer soit l’un, soit l’autre de ces aspects complémentaires. Il reste que nul n’a enseigné l’impossibilité de revenir à résipiscence après des fautes répétées. Quelles que soient les circonstances où il se manifeste, le repentir sincère produit toujours son effet. Ceci dit sans rien préjuger des règles de la discipline pénitentielle, qui n’entre pas ici en ligne de compte.

IV. La pénitence chez les théologiens du Moyen Age. — Une partie des textes que nous venons de passer en revue a été remployée par les théologiens du Moyen Age. Conservés par les florilèges patristiques ou les traités de l’âge carolingien, utilisés de bonne heure par les premiers canonistes, ils vont finir par confluer dans les deux grands recueils classiques du xiie siècle, le Décret et les Sentences qui en assureront pour toujours la transmission dans l’Église latine.

En cours de route, d’ailleurs, ce bagage patristique s’est augmenté de quelques textes qui vont jouer dans la théologie ultérieure un rôle qu’il est impossible de sous-estimer. La plus connue de ces productions adventices est, à coup sûr, le traité De vera et falsa psenitentia, mis sous le nom de saint Augustin, et dont, par malheur, on n’a encore suffisamment étudié ni l’origine, ni les tendances. Texte dans P. L., t. xl, col. 1113-1150. Son authenticité augustinienne n’a fait de doute pour aucun des scolastiqucs ; Érasme, le premier, l’a rejetée et les mauristes ont confirmé ce verdict, qui est sans appel. Il est évident que ce traité a pris naissance dans un milieu et à une époque où la confession auriculaire se pratiquait dans des conditions qui se rapprochent beaucoup de celles de l’époque moderne. Ce n’est pas ici le lieu d’y insister et l’on y reviendra ci dessous. I.a seule chose que nous voulions faire remarquer, c’est que, désormais, les théologiens (nous ne disons pas les prédicateurs, ni les auteurs spirituels) ne traiteront plus guère du repentir qu’en fonction du sacrement de pénitence.

1° Les SententiaireS. - Le phénomène éclate des les premiers recueils de Sentences.

1. Abélard († 1112), qui, dans VEthlca, expose la nature du repentir, c. XVIII, P. I… t. CLXXVIII, col. 561 sq., ne peut S’empêcher de bloquer l’idée de pénitence avec celle de confession : même note dans

l’Épitomé, c. xxxv, col. 1756 (qui, s’il n’est pas de lui. résume bien sa doct rine). Le Sic et nui), c. CXI, col. I 599, commence par mettre en ligne la phrase désormais classique « In pseudo Augustin : non potest quisquam fustificari <i peccato nisi fuerit cuite peccalum confessus ; n est vrai quelemêmi i hapitre aligne les textes patris

tiques qui parlent de la douleur des fautes commises sans faire allusion, i la. onfeSSiOD « m même en excluant

celle ci.