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PE N Iï ENC K-R EPE NT I R. L’EC R IT U R E


les livres de l’Ancienne Alliance, et qui risqueraient de paralyser les âmes repentantes ?

2° Nouveau Testament. - - Or, cet optimisme éclate bien davantage encore dans les pages du Nouveau Testament.

1. Non, certes, que les menaces en soient absentes, qui ont pour but d’exciter dans les consciences pécheresses la crainte des châtiments divins. Jean-Baptiste commence sa mission de précurseur par la prédication de la pénitence. Voir surtout IMalth., iii, 7-12 ; Luc, iii, 7-14. La menace semble jouer un rôle considérable dans ses exhortations : un jugement de Dieu est imminent qui doit séparer en Israël les éléments sains de ceux qui sont contaminés. Il n’est, pour s’assurer, lors de cette discrimination, un sort rassurant, qu’un seul moyen : la repentance. Et ce sentiment, qu’extériorise le baptême dans le Jourdain accompagné d’un aveu de culpabilité, ne vaut pas seulement pour le passé : il faut faire de dignes fruits de repentir ; un changement radical, sinon dans les conditions extérieures de la vie, du moins dans la façon dont on s’y comporte, est le gage du changement intérieur opéré au fond des âmes.

Et le mot de Jean-Baptiste est repris par Jésus, comme le thème de ses premières prédications : « Le temps est accompli, le royaume de Dieu est proche ; repentez-vous et croyez à l’Évangile. » Marc, i, 15. A ne pas se repentir, on risque de partager le sort de tels ou tels, qui viennent d’éprouver les effets de la colère divine. Luc, xiii, 1-6 : « Si vous ne vous repentez, vous périrez tous semblablement. » Ce sont les expressions mêmes des prophètes. Bapprocher Matth., xi, 20 ; Luc, xi, 32. Et si, de prime abord, ces derniers textes font songer davantage aux sanctions collectives (et donc temporelles) qu’aux sanctions individuelles, Jésus ne laisse pas de faire appel, avant tout, à l’idée du salut personnel que seul peut assurer le repentir ; et la crainte doit ici jouer un rôle. Voir Matth., x, 28 ; Luc, xii, 5. A mépriser les avances du Christ, on s’expose d’ailleurs à s’incruster dans son péché. Joa., viii, 24.

Une des dernières recommandations du Sauveur aux apôtres, c’est qu’ils doivent prêcher « la pénitence et la rémission des péchés ». Luc, xxiv, 47. Fidèles à l’exemple du Maître, ceux-ci cherchent à exciter le repentir dans l’âme de leurs auditeurs, en faisant usage autant de la crainte que de l’espérance. C’est toute l’économie du premier discours de Pierre rapporté dans les Actes, ii, 14-36. Pour s’être rendu compte que le Jésus crucifié par eux est le Messie chargé d’opérer le grand jugement, les Hiérosolymitains se sentent tout remplis de componction et de crainte et demandent anxieusement à Pierre : « Que devons-nous faire ? — Faites pénitence, leur dit l’Apôtre, que chacun de vous soit baptisé au nom de Jésus pour la rémission de ses péchés », ꝟ. 37-39 ; c’est le seul moyen de ne pas partager le sort funeste de la génération incrédule, ꝟ. 40. Nous avons ici le schème général d’un discours qui a dû être répété bien des fois. Les petites épîtres qui se lisent en tête de l’Apocalypse contiennent presque toutes des invitations, aux destinataires, à faire d’urgence une véritable pénitence ; des menaces plus ou moins graves les appuient. Apoc, ii, 5, 16, 21 ; ni, 3, 15-19, etc.

2. Il n’en reste pas moins que l’impression d’ensemble donnée par le Nouveau Testament et spécialement par l’Évangile, c’est celle de la confiance. La seule manière dont est décrite l’attitude de Jésus à l’égard des pécheurs de toute catégorie est bien faite pour développer ce sentiment. Matth., ix, 10 sq. ; Marc, ii, 15 sq. ; Luc, v, 30 sq. et vii, 34, 37 sq. ; xv, 1. Ce dernier passage de Luc introduit toute une péricope où l’évangéliste a bloqué les enseignements du Maître

sur l’accueil réservé aux coupables repentants, enseignements illustrés par les paraboles de la drachme perdue, de la brebis égarée et surtout de l’enfant prodigue. A entendre développer par la primitive catéchèse cette doctrine du doux Sauveur, quel cœur aurait pu s’endurcir ou se désespérer ? Au point de départ de la démarche du prodigue vers le père offensé, il y a sans doute le sentiment de la misère où ce malheureux est tombé par sa faute, mais il y a aussi, dans l’humble aveu du fils repentant, un regret inspiré par la reconnaissance et l’amour. Mais plus encore que les sentiments du coupable, ce sont les dispositions du père offensé qui sont mises en un admirable relief. « Quand le fils était encore loin, son père l’aperçut et il fut saisi de compassion ; il courut vers lui, se jeta à son cou et l’embrassa ! Sur cettepage de l’Évangile, il coulera toujours des larmes !

Ne doutons pas que la prédication des apôtres n’ait mis en valeur la portée de tels enseignements. On trouve comme un écho de l’accent joyeux avec lequel ils célébraient la douceur de la conversion dans les termes que saint Paul emploie pour magnifier l’œuvre de la justification. A l’humanité incrédule et impure qui ne sait pas accepter le message évangélique et s’obstine à chercher en des rites sans efficacité le sentiment de la justice, il oppose le groupe des croyants, justifié par sa foi aux divines assurances. Justifié par la foi, il est en paix avec Dieu par l’intermédiaire de Notre-Seigneur Jésus-Christ, Rom., v, 1 ; jadis asservi sous la loi de crainte, il est maintenant affranchi du péché, n’ayant plus qu’un seul maître. Dieu. Rom., vi, 18-22 : « Et maintenant délivrés du péché, devenus esclaves de Dieu, vous possédez comme fruit précieux la sainteté, vous avez une fin : la vie éternelle. » Or, au début de cette justification, dont l’épître aux Bomains décrit si magnifiquement les fruits, n’y a-t-il pas la pénitence, à laquelle la miséricorde divine excite le pécheur ? Rom., ii, 4.

Même confiance, encore que moins exultante, dans la I re épître de Jean. Que tout homme soit pécheur, c’est ce qu’il faut bien confesser et ceux-là se leurrent qui s’imaginent purs, i, 8. Les nouveaux convertis mêmes ne sont point tellement fixés dans le bien qu’il ne leur échappe des faiblesses. Il leur reste un moyen de s’en guérir, l’humble aveu de leur misère, accompagné, cela va sans dire, de regret et de ferme propos, i, 9.

Conclusion.

En définitive, il se dégage de

toute l’Écriture sainte un enseignement très ferme sur le repentir. Sur sa nature d’abord : il est essentiellement intérieur, quoi qu’il en soit des humiliations externes et des macérations corporelles qu’il est susceptible d’inspirer ; il se fonde en premier lieu sur la crainte de Dieu, mais des sentiments plus nobles s’y rencontrent aussi, et, finalement, il lui arrive de trouver dans la pensée de la bonté divine son plus puissant motif ; si le redressement de la conduite en est une manifestation, le repentir ne laisse pas d’être quelque chose de plus profond, où il entre, avant tout, l’idée de regret ; enfin, le repentir est une réponse à des prévenances d’en haut : le premier pas dans cette réconciliation de l’homme avec Dieu, c’est encore Dieu qui le fait. Les prophètes d’Israël avaient entrevu cette consolante idée, le Christ l’a clairement marqué et Paul, converti par une de ces avances imprévues de la Providence, en fait le fondement même de toute sa doctrine.

A peine est-il besoin de souligner que tous nos documents insistent sur la bonté morale du repentir. C’est un acte qui plaît à Dieu et qui est le seul moyen de détourner du coupable les châtiments auxquels sa faute l’a exposé.

C’est donc une démarche indispensable pour toute