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PAULICIENS


vérité. Celle-ci renferme une partie très ancienne, qui ne peut pas être attribuée à Smbat (xe siècle). Telle est du moins l’opinion de Conybeare.

Doctrine.

Le point essentiel de la doctrine des

pauliciens était la distinction entre le Dieu bon, seigneur du ciel, créateur des âmes, qui doit seul être adoré, et le Dieu mauvais, le démiurge, créateur et seigneur du monde sensible. Pour eux, toute matière était mauvaise. Ce dualisme est nettement marcionite, mais il se pourrait bien qu’il n’en fut pas ainsi à l’origine, malgré l’opinion de Dieseler, de Ter-Mkrttschian, de Conybeare et de Harnack. Il est possible, en effet, que le dualisme paulicien, d’origine manichéenne, ait évolué dans la suite sous des influences marcionites. C’est du moins la conclusion que l’on peut tirer des ouvrages grecs qui exposent la doctrine de la secte. Les pauliciens admettaient la chute originelle, mais ils lui attribuaient un heureux résultat, puisque, d’après eux, la situation lamentable de l’homme tombé dans le péché avait ému de compassion le Dieu bon. Ils niaient la rédemption. Suivant les uns, le Christ avait apporté son corps du ciel, parce qu’il ne pouvait le prendre sur la terre, qui est l’apanage du Dieu mauvais, et sa naissance de la Vierge n’avait été que le moyen de se manifester au monde. Pour d’autres, le Christ était un ange envoyé par le Dieu bon et sa vraie mère était la Jérusalem céleste. L’œuvre du Christ avait consisté essentiellement pour eux dans son enseignement ; aussi la croyance en lui sauve les hommes du jugement. Tout ce qu’il a dit des sacrements de baptême et d’eucharistie doit se prendre au sens figuré ; ils se basent sur ces deux paroles de lui : « Je suis l’eau vivante », « Je suis le pain de vie ». Le baptême et l’eucharistie consistent donc uniquement dans l’audition de sa parole. Cependant, des pauliciens faisaient baptiser leurs enfants par les prêtres catholiques, moins sans doute par conviction que pour éviter d’être inquiétés par les pouvoirs publics. Ils n’honoraient pas la croix, mais seulement le livre de l’Évangile. Ils proscrivaient le culte des saints de l’Église catholique, qui ne sont que les serviteurs du démiurge et qui seront rejetés au jour du jugement. Les pauliciens étaient iconoclastes et proscrivaient toute sorte d’image. Ils ne retenaient aucun livre de l’Ancien Testament qui était à leurs yeux l’œuvre du démiurge. Du Nouveau, ils avaient 1’ « évangile », sans doute celui de saint Luc, et les épîtres de saint Paul. Celles do s ; iinl Pierre étaient pour eux un objet d’exécration parce qu’il a renié.son maître. Toutefois, dans leurs controverses avec les catholiques, ils faisaient appel aux épîtres qui ne sont pas de saint Paul. Pierre de Sicile affirme même qu’un petit nombre d’entre eux admettaient les Actes des apôtres et les épîtres de saint Jacques, de saint Jean et de saint Jude. Mais on peut dire que d’une façon générale leurs livres sacrés étaient 1’Évangile » et 1’ « Apôtre ». Comparer l’attitude des marcionites.

A leurs yeux, toute la hiérarchie ecclésiastique était mauvaise, comme aussi les sacrements et le rituel, œuvre du démiurge et de ses serviteurs. Ils avaient une aversion particulière pour les moines. Leur propre organisation comprenait tout d’abord les chefs qui avaient établi la secte en divers lieux. C’étaient les « apôtres » et les « prophètes », qui se donnaient des noms nouveaux, empruntés aux disciples desiini Paul. On connaît Constantin-Sylvain, Syméon-Titc, Gégnéslus-Timothée, Joseph Épaphrodite.Sergius-Tychi’iuc De même leurs communautés étaient désignées par le nom des provinces qu’avaient évangélisées saint Paul. On eut ainsi la Macédoine (Kibossa), PAchaïe (Mananalis), Laodicée (Mopiueste), Colonel (Kynochorltes), etc. Au-dessous des < apôtres » et des « prophètes » il y avait les compagnons de voyage, ouvsx8>)|iOi, qui formaient le concile, et le* notaires, voTdpioi, qu] velllaienl

sur les livres saints, les transcrivaient et maintenaient l’ordre dans les réunions. Les lieux où se tenaient leurs assemblées ne s’appelaient pas églises, mais maisons de prière, v : ç)0<3zx>yjxi. Les mœurs des pauliciens passaient pour être des plus fâcheuses. La distinction entre les deux principes bon et mauvais et la condamnation de la matière les entraînaient naturellement dans les plus grands désordres : ivrognerie, débauches, inceste, vices contre nature. Ne fallait-il pas punir cette matière corrompue, sous prétexte de libérer l’esprit ? Même si les auteurs grecs et arméniens ont quelque peu exagéré les couleurs du tableau par suite des préoccupations de la polémique, on ne peut laver les pauliciens de tout reproche, et Gieseler, l’écrivain qui leur est le plus favorable, est contraint de l’avouer.

4°Histoire. — l.Les pauliciens d’Asie. — Onestencore mal renseigné sur les origines des pauliciens. Leur nom apparaît pour la première fois dans les œuvres du catholicos arménien Jean d’Otzoun (vme s.). Le canon 32 de son synode de Dvin (719) interdit formellement de passer la nuit dans les lieux habités par les « méchants hérétiques Mzléouthioun qui s’appellent Polikian ». Ter-Mkrttschian, Die Paulikiannerim byzantinischen Kaiserrciche, p. 62-63. Dans son traité contre les pauliciens, il les appelle des « restes des anciens Mzléouthioun Pailakenouthioun », ibid., p. 49. Ter-Mkrttschian explique le mot de Polikian par « disciples du petit Paul » et croit que ce nom leur a été donné par leurs adversaires. Conybeare, The key of trulh, p. cv, fait un rapprochement entre les pauliciens et Paul de Samosate et considère le paulicianisme connue une forme de l’ancienne Église chrétienne. Kn fait, certains textes, comme le Chronicon de Georges le Moine, éd. de Boor, t. ii, p. 718, et celui de Grégoire Magistros, dans Ter-Mkrttschian, op. cit., p. 148, montrent les pauliciens comme les disciples de Paul de Samosate. Une femme de cette ville, nommée Calliniké, aurait envoyé ses deux fils, Paul et Jean, prêcher le manichéisme dans le thème dos Arinéniaqucs ; ils se seraient fixés à Phanaréa, dont le nom fut changé en celui d’Épisparis. Cette indication est sujette à caution et pourrait bien n’être qu’un mythe. Les pauliciens postérieurs répudiaient toute parenté avec les manichéens et anathématisaient Manès, mais cela ne prouve nullement qu’au début la secte ait été complètement indépendante de ces hérétiques. On s’accorde généralement à retrouver l’influence des marcionites et même des archontiques, Dôllinger, Beitrage zur Seklengeschichte des Mittclalters, t. i, p. 2, dans la doctrine des pauliciens, telle que nous la connaissons par les sources arméniennes et grecques. Cependant, comme le manichéisme était aussi répandu que le marcionisme dans les régions où apparaissent les pauliciens, il est probable qu’au début, il exerça quelque influence sur la secte.

Le principal personnage qui donna à celle-ci sa véritable forme et son existence particulière semble bien avoir été ce Constantin, qui se faisait appeler Sylvain. Au dire de Georges le Moine, il était originaire de Mananalis, village manichéen situé près de Samosate. Selon le pseudo-Photius, il reçut 1’ « Évangile » et 1’ « Apôtre » d’un diacre syrien prisonnier et épura les idées manichéennes de ses compatriotes en leur donnant une apparence plus chrétienne. Toutefois, le dua lisme resta a la base du système. Cet enseignement de Constantin fut surtout oral, car il est a peu près certain qu’il n’a rien écrit. Il se contentait de reconnu. m (1er a ses disciples la lectUTO « le I I vangile » il I apôtre et de leur prêcher sa doctrine. Il créa la

communauté do kiimss.i en Arménie. Ces faits se | isient smis l’empereur Constanl il (841 668) Coin tantui Pogonat (888-686) flnll par l’inquiéter des