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PÉLAGIANISME. JULIEN D’ÉCLANE


malheureusement perdue et on ne peut en reconstituer aisément la physionomie. Voir les fragments rassemblés par dom Coustant dans P. L., t. xx, col. 690 sq. D’après les indications fournies par M. Mercator figuraient, dans ce document considérable, les propositions de Célestius condamnées à Carthage dès 411. Pour ce qui est de Pelage, il y était également question de lui, et saint Augustin nous est garant que des propositions de l’hérésiarque étaient contenues dans le document pontifical. De peccato originali, xxi, 24, P. L., t. xliv, col. 396. Augustin nous permet de restituer le passage de la lettre de Zosime sur les effets du baptême. Epist., cxc, n. 23, t. xxxiii, col. 865 ; il y a là une douzaine de lignes qui se terminent par ces mots : Jesu Christi morte mortis ab Adam omnibus nobis introductos atque transmisse universse animée illud propagine contractum chirographum rumpitur, in quo nullus omnino natorum antequam per baptismum liberetur non tenetur obnoxius. Par ailleurs, le célèbre document produit dans la controverse semipélagienne et intitulé : Præteritorum Sedis apostolicæ auctoritates de gratia, rapporte deux, sinon trois phrases empruntées à la lettre de Zosime. Voir P. L., t. l, col. 533-534 ; il s’agit des n. 9, 10 et peut-être 11, reproduits dans Denzinger, n. 134-136. Le n. 10 est particulièrement explicite sur la nécessité de la grâce : Quod ergo tempus inlervenit quo ejus non egeamus auxilio ? In omnibus igitur actibus, causis, cogitationibus, motibus adjutor et protector orandus est. Superbum est enim ut quidquam sibi humana natura présumât. Il ne nous paraît pas aussi certain que le n. 11, soit une citation de la Tractoria.

Ces fragments permettent de voir que la Tractoria, pour ce qui concerne les doctrines, était aussi explicite que de besoin sur les deux points capitaux du débat : l’existence du péché originel et la nécessité absolue de la grâce. Le Siège apostolique faisait sienne la doctrine de l’Église d’Afrique. Africanorum conciliorum decretis beatse recordationis papa Zosimus sententise suse robur adnexuit. Prosper, loc. cit., P. L., t. li, col. 271. Et quant à l’équivoque entretenue depuis le concile de Diospolis sur la question des personnes, elle était définitivement dissipée. Les deux auteurs de l’hérésie étaient condamnés s’ils ne venaient à résipiscence. Saint Augustin-est formel sur ce point dans la lettre à Optât déjà citée : a duobus venerabilibus antislibus apostolicæ Sedis, papa Innocentio et papa Zosimo, nisi correeti ctiam egerinl pœnitentiam, toto christiano orbe damnali sunt. P. L., t. xxxiii, col. 865.

Accueil reçu par la Tractoria.

On devine avec

quelle allégresse cette sentence fut reçue en Afrique ; c’était le couronnement de longues luttes continuées avec une intrépide persévérance. Voir un fragment de ta lettre de réponse adressée au pape Zosime par les Africains dans Prosper, Cont. coll., v, 3, P. L., t. li, COl. 228.

Mais, ce succès obtenu, il restait encore à convaincre les esprits. C’est pour y parvenir que saint Augustin va s’efforcer d’expliquer et de légitimer la sentence pontificale. Il compose le De gratia Christi et de peccato originali, P. L., t. xi.iv, col. 359- H0, pour satisfaire Pinien, Mélanie et Albine, nobles et pieux Romains, inllucncés par Pelage lequel proclamait toujours son orthodox te.

Saml Augustin leur dévoile l’équivoque de l’hérétique qui donne le nom de grâce à la liberté, a la loi, i la rémission des péchés (1, l) : il prouve l’existence et le caractère dogmatique du péché originel même chez

ifanls (I. II). Au e. iv, Q.."., P. /… |. XLIV, COl. M<2. il rappelle la distinct ion fameuse de Pelage des tTOU éléments de la le murale : le passe, le velle et Vrssr ; et

lui reproche d’ajouter : h’premier élément rient de Dieu qui l’accorde a sa créature ; 1rs deux autrtt ru ii>

pendent que de l’homme puisqu’ils procèdent du libre arbitre.

La Tractoria reçut dans l’univers entier une adhésion unanime. Per totum orbem missa, subscriptionibus sanctorum Patrum est roborata, dit Marius Mercator.

En Orient, un concile se réunit, présidé par Théodote d’Antioche, pour condamner Pelage qui fut expulsé de Palestine. Praïle lui-même s’associa à ces mesures. M. Mercator, Commonit., iii, 5, P. L., t. xlviii, col. 101 ; S. Jérôme, Epist., cxxxviii, P. L., t. xxii, col. 1164.

A partir de ce moment, l’hérétique disparaît de la scène de l’histoire, on croit qu’il mourut vers 422.

IV. Intervention de Julien d’Éclane et disparition progressive de l’erreur. — 1° Julien d’Éclane. 2° Le pélagianisme dans les Gaules. 3° Le pélagianisme en Orient.

I. julien d’Éclane. — 1° Le personnage. — La controverse semblait définitivement apaisée, elle va subitement rebondir grâce au talent et à la renommée de celui qui s’en fera le vigoureux champion.

Julien, évêque d’Éclane (Mirabella, au sud-est de Bénévent) était fils de Mémorius, évêque (de Capoue) de sainte et heureuse mémoire, au dire de M. Mercator, et de Julienne, femme du premier mérite, la plus honnête et la plus respectable des matrones. Il n’était pas un inconnu pour saint Augustin qui pourra lui écrire : « Je n’ai certes pas oublié votre père, Mémorius, d’heureuse mémoire ; nos relations littéraires nous avaient unis d’une forte amitié et vous recommandent à mon affection. » Contra Julian., i, iv, 12, P. L., t. xliv, col. 647.

Gennade attribue à Julien un esprit élevé, une profonde connaissance des saintes Écritures et une vaste érudition dans les lettres grecques et latines, si bien qu’avant de tomber dans l’hérésie pélagienne il s’était fait un grand nom parmi les docteurs de l’Église, mais on ne connaît aucun ouvrage de lui à cette époque. Il recherchait les subtilités de la logique et employait partout les catégories d’Aristote, d’une manière assez puérile. Sa vanité le rendait ridicule et saint Prosper, Chronique, an. 439, l’appelle « le plus fanfaron de tous les défenseurs de l’hérésie pélagienne ». Saint Augustin, toujours si modéré, s’échappe à lui décocher ces trois superlatifs : in disputatione loquacissimus, in contentione calumniosissimus, in professione mendacissimus. Op. imp., t. IV, 52, t. xiv, col. 1368. Mercator dit que, pour faire montre de sa rhétorique et de son savoir, il s’égare dans un flux de paroles propre à impressionner les ignorants. On croit que c’est à lui que saint Prosper attribue « toute l’enllure des animaux engraissés dans la Campanie », ce qui convient mieux à son style et à son génie qu’à celui de Célestius, plus sec et plus concis.

Gennade raconte que, dans un temps de famine, il avait distribué ses biens aux pauvres et, par cette charité, avait attiré beaucoup de monde à son hérésie. particulièrement des personnes de qualité, et qui faisaient profession de piété. De vir. ill., n. 45. D’autre part, voici que M. Mercator, reproche à Julien, qui, après la mort de ses parents, avait dû prendre soin de ses deux sieurs : i Nous savons ce que l’une d’entre elles vous répondit et les reproches qu’elle vous fit un jour, lorsque, avec une sévérité et une force qui ne vous convenait pas trop, vous la repreniez d’avoir trahi son honneur. Vous êtes demeuré aussitôt sans paroles et vous n’avez pas osé pousser plus loin la réprimande dont vous accabliez sa douleur. » Liber subnot. in vr.rbn.fulinni, [V, .">. P. L., t. XLVIII, col. 132.

Mais que valent ces insinuations de polémistes ?

on croit que saml Augustin l’avait attiré en Afrique et l’avait gardé quelque temps auprès de lui.

Sa famille était liée avec l’aulin de Noie qui adiessa