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PÉLAGIANISME. ORIGINES


semblent controuvées. La première provient d’une confusion avec un autre Pelage dont parle saint Jean Chrysostome, la seconde est démentie par l’examen de s, m Commentaire sur les épîtres de saint Paul qui montre son ignorance de la langue grecque, cf. J. Chapman, Revue d’histoire ecclésiastique, 1922, p. 472. Il put répondre en grec au concile de Diospolis (415), mais à cette époque, il séjournait en Orient depuis trois années. Il ne savait même pas écrire le latin correctement, comme le lui reproche Orose, Apol., xxix, 1, 2, P. L., t. xxxi, col. 1198.

Il était fixé à Rome dès le temps du pape Anastase. Il n’était pas clerc, ce qui fait dire à saint Augustin : Invecta etiam modo hieresis est non ab episcopis, scu presbyleris, vel quibuscumque clericis, sed a quibusdam veluti monæhis. De gestis Pelagii, xxxv, (il, P. L., t. xliv, col. 355. Cela ne l’empêchait pas de donner des conseils d’ascétisme fort appréciés, mais il ne savait pas éviter l’exagération, puisqu’il enseignait « qu’on ne doit jamais faire de serments ; qu’un riche ne peut entrer dans le royaume des cieux, s’il ne vend tout son bien ; qu’il ne lui sert de rien d’observer les commandements, s’il conserve ses richesses ». Epist. Hilarii ad August., P. L., t. xxxiii, col. 674.

Saint Jérôme se moque de sa corpulence, « il a les épaules du lutteur Milon », Dial. adv. pelagian., I, 28, P. L., t. xxiii, col. 522 ; il l’appelle Albinum (d’Albion) canem, grandem et corpulentum, et qui calcibus magis possit ssevire quam dentibus. Prsef. in l. III Jeremiæ, P. L., t. xxiv, col. 758. Pelage entretenait des relations épistolaires avec saint Paulin de Noie. Saint Augustin déclare qu’il jouissait d’une bonne réputation. Retract., ii, 33, P. L., t. xxxii, col. 644.

Nature froide, raisonneuse, pratique, manquant de profondeur dans l’âme comme dans l’esprit, nourrissant une estime exagérée de son propre mérite, il s’imaginait que l’on méconnaissait le mérite de l’ascétisme en refusant d’y voir le fruit exclusif de la liberté humaine. Par contre, il considérait l’appel à la grâce divine comme un moyen peu propre à stimuler le zèle ; ce recours à la grâce, c’était l’excuse des hommes lâches et vicieux.

2° Ses œuvres littéraires. — On peut toujours consulter, à leur sujet, les Dissertationes, publiées par le jésuite J. Garnier (1612-1681) en appendice à son édition de Marius Mercator, reproduites dans P. L., t. xlviii, col. 255-698 ; sur Pelage et ses écrits, voir col. 266-277.

1. Ouvrages qui nous sont parvenus.

a) Expositionum in Epistolas Pauli libri XIV. — Ce commentaire complet des épîtres de saint Paul (l’épître aux Hébreux exceptée) a été écrit à Rome vers 410. Saint Augustin l’a eu entre les mains dès 412. De pecc. mer., III, i, P. L., t. xliv, col. 185. Marius Mercator en a conservé quelques passages. Common. super nom. Ceelestii, 2, P. L., t. xlviii, col. 85-89. Cassiodore l’avait trouvé dans un ms., à la suite des épîtres de saint Paul, sans nom d’auteur, mais la renommée l’attribuait au pape Gélase. De instit. divin, litt., 8, P. L., t. lxx, col. 1119-1120. Il y avait fait des corrections, y ayant découvert le venin du pélagianisme. Érasme, en 1516, le publia comme étant de saint Jérôme, éd. reproduite dans P. L., t. xxx, col. 645-902. On y reconnut bientôt non seulement l’hérésie pélagienne, mais des passages signalés par Augustin comme étant de Pelage même ; la publication du Commonitorium de Marius Mercator par Labbe en 1671, par Garnier en 1673, ne pouvait que confirmer cette impression : le commentaire soi-disant hiéronymien était bien celui de Pelage. A la vérité, on n’y retrouvait pas tous les passages cités par Mercator ; mais Garnier rendait compte de ce fait en supposant que le texte pseudo hiéronymien était proprement celui que Cassiodore avait expurgé.

H. Zimmer, en 1901, a renouvelé la question : Pelagius in Irland, lit-rlin. Il réussit à découvrir un certain nombre de témoins du texte, en des mss. irlandais des viiie et ixe siècles. D’après ses conclusions, l’œuvre de Pelage comprenait une introduction générale aux épîtres pauliniennes, un prologue à la plus importante de toutes celles aux Romains, ensuite, pour chacune d’elles, un court argument et un commentaire très sobre, ce qui correspond bien aux exposiliones brevissimas dont parle saint Augustin. Pelage indique souvent plusieurs sens du même passagi et l’ait de nombreux emprunts à ses prédécesseurs, en particulier à YAmbrosiaster.

Les travaux de Zimmer ont ouvert la voie à ceux de Al. Souter, qui a fourni du commentaire de Pelage une édition définitive. Voir de cet auteur : The commentnry of Pelagius. The problem of ils restauration, dans Proceedings of Brit. Acad., 12 déc. 1906, et The characler and hislory of Pelagius’s commentary, ibid., 15 mars 1916 ; mais surtout Pelagius’s exposition on thirteen epistles of St. Paul, dans Texts and siudies, t. ix, fasc. 1 (étude de la tradition manuscrite), fasc. 2 (texte), Cambridge, 1922 et 1926.

b) Epislola ad Demetriadem, seu liber de institutione virginis (412), faussement attribuée à saint Jérôme. P. L., t. xxx, col. 15-45, et aussi à saint Augustin, P. L., t. xxxiii, col. 1099-1120. La grande différence de style entre cette lettre et le commentaire de saint Paul a fait supposer à Garnier que Pelage recourait volontiers à la plume d’un de ses amis, Anianus ou Julien. C’est cette supériorité de style qui a fait attribuer cette lettre à Ambroise, Augustin ou Jérôme.

c) Libellus fîdei ad Innocentium papam (417), P. L., t. xlviii, col. 488-491, a été conservé, lui aussi, en entier parce qu’il a figuré sous le nom de saint Jérôme (éd. Vallarsi, t. xi, p. 146) et sous celui de saint Augustin, P. L., t. xxxix, col. 2181 sq.

2. Ouvrages perdus, sauf quelques fragments :

a) Teslimoniorum seu Eclogarum liber unus, attesté par Gennade, De vir. ill., n. 42, recueil de citations scripturaires composé à l’exemple de saint Cyprien ; essai de reconstitution par Garnier, P. L., t. xlviii, col. 593595 ; travail repris par Rruckner, Quellen zur Gesch. des pelag. Streiles, p. 59. Abrégé de morale, peu nuancé et sévère à l’excès, comme on peut en juger par ces titres qui nous restent : Qu’on ne peut être sans péché à moins qu’on n’ait la science de la Loi.- — Que les femmes doivent avoir aussi ta science de la Loi et qu’elles doivent aussi chanter les louanges de Dieu. — Qu’un chrétien doit être si patient qu’il doit savoir bon gré à qui lui enlève son bien. — Qu’il faut aimer ses ennemis comme ses plus proches parents. — Qu’il faut réprimander publiquement les pécheurs.

b) Liber de natura, composé en Sicile et remis par Jacques et Timase à saint Augustin qui répondra dans le De natura et gratia ; voir les fragments recueillis par Garnier, dans P. L., t. xlviii, col. 599-606.

c) Liber (unus vel alter) ad viduam consolatorius atque exhortatorius, P. L., t. xlviii, col. 598. Fragments dans saint Jérôme. Dial., t. III, saint Augustin. De gestis Pelagii, vi, 19, M. Mercator, Commonilor., c. iv. On tira de cette lettre des accusations contre Pelage au concile de Diospolis. Il se défendit en disant que ces assertions n’étaient pas dans ses écrits et en les anathématisant même comme des folies. Il avait coutume, même auparavant, de les désavouer aupri

ses disciples, aussi saint Augustin évite de le presser : au contraire, saint Jérôme soutient qu’elles étaient effectivement de lui, ainsi que le style le prouvait clairement.

d) Epislola ad Augustinum, ou, comme il l’appelle,