Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 12.1.djvu/346

Cette page n’a pas encore été corrigée
677
678
PÉLAGIANISME. ORIGINES


tion, ils soient admis au royaume de Dieu, passant du bien au mieux, mais cette régénération ne les délivrant d’aucun bien ni d’aucun mal. Quand les enfants ne seraient pas baptisés, ils leur promettent néanmoins une vie éternelle et bienheureuse, en dehors, il est vrai, du royaume de Dieu. « Ils disent encore que, quand bien même Adam n’aurait pas péché, il aurait subi la mort et qu’il est mort non pas à cause de sa faute, mais par la condition de sa nature. « On leur reproche encore d’autres erreurs : mais celles-ci sont les principales, et les autres ne sont que les conséquences de celles que je viens d’exposer ».

Il a paru opportun de citer les paroles de saint Augustin, car le docteur de la grâce était manifestement prédestiné à lutter contre l’hérésie pélagienne. « Nul, mieux que l’évêque d’Hippone n’était capable de sentir le caractère areligieux de ce moralisme stoïcien. » É. Amann, L’Église des premiers siècles, p. 143. Venu à la vertu en passant par le vice et ayant senti très fortement la main de Dieu qui l’avait arraché à ses désordres, saint Augustin devait à sa propre expérience un profond sentiment de l’infirmité humaine et du secours divin. Il proclamera qu’on est vertueux, qu’on fait le bien parce que Dieu nous en donne le vouloir et le pouvoir, autrement dit, nous secourt de sa grâce ; de nous-mêmes, nous ne pouvons tirer que le péché. Et pourquoi sommes-nous ainsi faits ? Par la faute d’Adam, de laquelle procèdent toutes nos faiblesses, toutes nos infirmités physiques et morales, les maladies, la mort et ce détraquement intérieur qui met chez nous en lutte perpétuelle le sentiment de la loi et les poussées de la concupiscense. Adam a péché, toute sa postérité a péché en lui, car ce n’est pas seulement d’une déchéance quelconque qu’il s’agit ici, mais d’une déchéance coupable, qui autorise Dieu à venger sur chacun de nous la faute commise par notre premier père. Devant Dieu, le genre humain est un bloc pécheur, massa peccati, massa perdilionis, duquel l’auteurde toute justice ne saurait tirer d’autre bien que celui qu’il y met lui-même. L. Duchesne, Hist. anc. de l’Église, t. iii, p. 203. Si saint Augustin eut un rôle de premier plan dans la controverse pélagienne, ce serait une erreur historique que de réduire celle-ci à une lutte entre deux hommes. La tradition catholique trouva d’autres défenseurs et notamment saint Jérôme qui indiqua fort justement la doctrine stoïcienne comme la source des erreurs pélagienncs, Epist. adCtesiphontem, P. L., t. xxii, col. 1 147. Cicéron n’avait-il pas dit : Judicium hoc omnium mortalium est fortunam a deo petendam, a seipso sumendam esse sapientiam ? De natura deorum, iii, 63 ; et Sénèque commence ainsi son épître xc : Quis dubilare poteat, quin deorum immortalium munus sit quod vivi-RilU, philosophiæ quod bene vivimus ? Ilaque lanto plus nos debere huic, quam diis, quanto majus bene/ir.ium est bona vila quam vita ?

Origine orientale de l’erreur.

 D’après Marins

Mercator, l’erreur serait venue de Gilicie et il faudrait en attribuer la paternité à Théodore de Mopsueste. Voici ce qu’en dit cet auteur, dont ni l’information, ni l’impartialité ne sont toujours rassurantes : L’opinion <|ui a été avancée il y a longtemps contre la foi catholique parmi quelques Syriens, surtout en Gilicie pu rbéodore, autrefois évêque de Mopsueste, n’a été jusqu’à présent enseignée qu’à peu de personnes et fort secrètement. On ne la débite pas en publie, mais i’pu on l’enseigne à l’oreille, en tenant ces sen timents, demeurent dans le sein de l’Église, comme s’ils étaient catholiques, Ces erreurs sont que nos

premiers parents ont été créés mortels par le Seigneur ; que, par leur transgression, ils n’ont porté dommage .i aucun de leurs descendants ; qu’ils n’ont fait tort

qu’à eux-mêmes ; qu’en violant ce précepte de Dieu ils se sont rendus coupables et n’ont rendu coupable aucun autre. »

Il ajoute : « C’est un certain Rufin, Syrien de nation qui a, le premier, introduit à Rome, sous le pontificat d’Anastase, une doctrine si absurde et si contraire à la foi. Et, comme il était adroit.il n’osa pas la répandre de lui-même, de peur de se rendre odieux. Il séduisit le moine Pelage, Breton de nation. » Liber subnot., 1 et 2, P. L., t. xlviii, col. 109-111 ; cf. Collectio Palatina, édit. de Schwartz, dans Concil. Ephesinum, vol. v, p. 5 : dans le ms. la pièce s’appelle Commonitorium adv. hæresim Pelagii et Cœlestii vel etiam scripta Juliani ; le titre Liber subnotationum est de l’invention de Garnier, il est d’ailleurs commode, parce qu’il évite la confusion de cette pièce avec une autre du même recueil le Commonitorium super nomine Cœlestii, éd. citée, p. 65.

Qui est ce Rufin signalé par Mercator comme étant natione Syrus ? Il n’est certainement pas identique à Rufin d’Aquilée, le grand rival de saint Jérôme. Quels renseignements avons-nous sur lui ? Un d’abord qui est soustrait à la mêlée des partis, et qui confirme, jusqu’à un certain point, les renseignements de Mercator sur les accointances de ce Rufin avec Pelage ou Célestius à Rome. Au concile de Carthage en 411, Célestius déclare qu’il a des doutes sur la transmission du péché par la naissance (de traduce peccati), parce que, sur ce point, il y a divergence entre les prêtres catholiques. Sommé de citer des noms, Célestius répond : « Le saint prêtre Rufin, qui est demeuré à Rome avec le vénéré Pammachius. Je lui ai entendu dire qu’il n’y a pas de transmission du péché, quia tradux peccati non erat. » Cité par saint Augustin, De pecc. orig., 3, 4, P. L., t. xliv, col. 387.

Ce Rufin était membre du couvent de Bethléem, dirigé par saint Jérôme. En 397, il fut envoyé par celui-ci à Rome et à Milan pour diverses affaires et, chose intéressante, ce détail nous est signalé dans deux écrits adressés à Rufin d’Aquilée, l’ApoIogia ad libros Rufini, III, 24, P. L., t. xxiii, col. 475 C, et la lettre lxxxi, à Rufin, t. xxii, col. 735. Rufin d’Aquilée considérait ce personnage comme l’un des chiens lancés à ses trousses par Jérôme ; n’était-il pas hospitalisé à Rome chez l’ami de Jérôme, Pammachius, du temps qu’il poursuivait, auprès du pape Anastase, la condamnation de l’origénisme (lisez de Rufin d’Aquilée).

Le plus curieux de toute cette histoire, c’est que, en 415, dans sa lettre à Ctésiphon, saint Jérôme, t oubliant, comme dit F. Cavallera, la responsabilité de l’autre Rufin, moine chez lui à Bethléem, et hôte, à Rome, de Pammachius, dans les origines du pélagianisme, y implique Rufin d’Aquilée ». Saint Jérôme, t. i, p. 285 ; cf. t. H, p. 96-97, et la très sage remarque sur l’état d’esprit des historiens qui ont créé la confusion entre ces deux Rufin.

Mais saint Jérôme ne les confondait certainement pas. Quand, en 415, il commence à charger à fond contre l’idée pélagienne de Vimpcccantia, il trouve que cette hérésie a des attaches avec l’origénisme et Rufin d’Aquilée qui l’incarne : rattachement assez artificiel, sans doute, mais qui est bien dans la manière de Jérôme et de son époque. Voir Cavallera, op. cit.. t. ii, p. 125-127.

II. PÊLAQB. 1° Sa personne. — Pelage, moine originaire des Iles Britanniques, de son vrai nom Morgan (en cette : homme de la mer), latinisé en Pelage, est communément appelé le Breton pour le distinguer d’un contemporain du même nom qui habitait Tarante. S. Augustin, Epist. m.wwi. 1.

on « lit communément qu’il avait voyagé eu orient

et qu’il savait le grée, mus, , s deUl.isserlions