Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 12.1.djvu/345

Cette page n’a pas encore été corrigée

675

PELAGE II

PÉLAGIANISMK

676

prenait, dans sa titulaturc, le qualificatif d’œcuménique, Pelage II cassa les décisions prises sur les rives du Bosphore, et enjoignit à son apocrisiaire de ne plus se montrer aux messes solennelles du patriarche. Sur cet incident, qui devait se renouveler huit ans plus tard, à l’époque de Grégoire, voir les très judicieuses remarques de P. Uatilïol, Saint Grégoire le Grand, Paris, 1928, p. 205 sq., et surtout la note de la p. 205.

D’autres mesures, soit de portée générale, soit d’intérêt particulier, qui furent prises par le pape Pelage II, ne nous sont connues que par les allusions qui y sont faites dans le registre de saint Grégoire. Si la correspondance de Pelage s’était conservée, comme l’a été celle de son glorieux successeur, il n’est pas douteux que son pontificat nous apparaîtrait de tous points comparable à celui de Grégoire le Grand. Ni la guerre, ni les calamités naturelles n’avaient été épargnées sous son règne à la malheureuse Italie. En novembre 589, une inondation plus terrible que jamais ravagea la campagne romaine ; elle dut amener à sa suite une épidémie de peste bubonique dont le pape fut une des premières victimes, à la mi-janvier 590.

Le Liber pontiftealis, édit. Duchesne, t. i, p. 309-311, ne mentionne guère que les divers travaux entrepris par Pelage à Rome ; retenir ceux qui furent exécutés à Saint-Laurent-hors-les-Murs. Renseignements sur les lettres dans Jafïé, Regesta pontif. rom., 2e édit., t. i, p. 137-140 ; texte des lettres dans P. L., t. lxxii, col. 703-760, q îi reproduit Mansi, t. ix ; tenir compte des notes de Labbe pour la distinction entre pièces fausses et pièces authentiques. Sur l’origine des trois lettres aux évêques d’Istrie, voir Ed. Schwartz, Acta conciliorum œcumenicorum, t. iv, Concil. univers. Constanlinopolit. V, vol. 2, Strasbourg, 1914, p. xxii sq. Ces trois pièces proviennent du Paris, lai. 1682, où elles voisinent avec d’autres pièces relatives au schisme d’Aquilée. Baronius, à qui avait été envoyé une copie de ce ms., les a publiées le premier, Annales, an. 586, n. 29 sq., c’est de là qu’elles sont passées dans les collections conciliaires ; L. Hartmann les a publiées d’après le ms. dans Mon. Germ. hisl., Episl., t. ii, p. 442 sq.

F. Gregorovius, Geschichte der Stadl Rom im M. A., 5e édit., t. ii, p. 20-30 ; H. Grisar, Histoire de Rome et des papes au M. A., trad. Ledos, t. i b, p. 237 sq., 241 sq. ; Th. Hodgkin, Italy and her invaders, t. v, p. 239 sq., 462469 ; L. Duchesne, L’Église au VIe siècle, Paris, 1925, surtout p. 244 sq.

É. Amann.

PÉLAG 1ANISME, grande hérésie qui vit le jour en Occident au début du ve siècle et qui, partant d’une exagération des forces du libre arbitre, aboutissait à nier la nécessité de la grâce divine, la transmission du péché originel, la distinction entre l’ordre naturel et l’ordre surnaturel. Pendant vingt ans, l’Église semble oublier les périls causés par les invasions barbares pour concentrer son activité à la défense des droits de la vérité menacée. Pelage, Célestius et Julien d’Éclane rencontreront des adeptes dans toutes les provinces de l’empire et même à la cour romaine, mais ils se briseront contre la polémique incessante et victorieuse de saint Augustin. Grâce au vaillant champion de la tradition catholique, la lutte sera brève et la victoire définitive, mais elle est des plus suggestives par le nombre des traités qu’elle suscite, des conciles dont elle amène la réunion, des problèmes si difficiles qu’elle essaie de résoudre. L’histoire de ce mouvement se divise naturellement en quatre périodes : I. Début de l’hérésie. II. Extension de l’hérésie jusqu’à sa condamnation par le pape Innocent I er (col. 685). III. Reprise de la controverse sous le pape Zosime (col. 696). IV. Intervention de Julien d’Éclane et disparition progressive de l’erreur (col. 702).

I. DÉBUT DE L’HÉRÉSIE JUSQU’A SA CONDAMNA-TION par le pape innocent I er. — 1° Préliminaires. 2° Pelage. 3° Célestius. 4° Le système pélagien.

I. préliminaires.

1° Notion* générales. — Voici comment saint Augustin décrit l’hérésie pélagienne dans son Liber de hieresibus ad Quodvulldeum, xxxviii. P. L., t. xlii, col. 47-48 : « L’hérésie des pélagiens, la plus récente de celles qui ont paru dans ces temps, a eu pour auteur le moine Pelage ; Célestius, s’étant attaché à lui comme disciple, ceux qui suivirent leur doctrine portèrent aussi le nom de célestiens. « Ces novateurs, rejetant la grâce de Dieu, par laquelle nous sommes prédestinés par Jésus-Christ pour être enfants de Dieu (Eph., i, 5) et délivrés de la puissance des ténèbres, afin que nous croyions en lui et que nous soyons transférés dans son royaume (Col., i, 23), car il a dit : « Personne ne vient à moi, s’il ne lui a été donné par mon Père » (Joa., vi, 66), ces novateurs, dis-je, rejetant cette grâce par laquelle la charité est répandue dans nos cœurs, afin que la foi opère par la charité, en sont venus à ce point de croire que l’homme peut, sans son secours, accomplir tous les préceptes diuins. Si cela était vrai, ce serait en vain que le Seigneur aurait dit : Sans moi vous ne pouvez rien faire » (Joa., xx, 5). « Pelage, ayant été repris par ses frères de ce qu’il rejetait le secours de la grâce divine pour l’accomplissement des commandements, céda à leurs observations, mais en partie seulement, car, au lieu de mettre la grâce avant le libre arbitre, par un artifice coupable, il ne lui assignait que le second rang et disait que la grâce était donnée aux hommes, afin qu’ils accomplissent plus facilement, par son moyen, ce qu’ils devaient faire par le libre arbitre. En disant plus facilement, il voulait que l’on crût que l’homme pouvait, sans la grâce, quoique plus difficilement, remplir les préceptes divins. « Il disait encore que cette grâce, sans laquelle nous ne pouvons faire aucun bien, n’est pas autre que le libre arbitre que notre nature a reçu de Dieu, sans aucun mérite précédent, et que Dieu l’aide par sa loi et par la doctrine, afin que nous apprenions ce que nous devons faire et espérer, et non afin que, par le don du Saint-Esprit, nous fassions ce que nous avons appris qu’il fallait faire. Ainsi, ils confessent que nous recevons de Dieu la science qui chasse l’ignorance, et ils nient que Dieu nous donne la charité qui nous fait vivre dans la piété ; selon eux, la science qui enfle (I Cor., viii, 1), si elle n’est accompagnée de la charité, est un don de Dieu, et la charité qui édifie, afin que la science n’enfle pas, ne vient pas de Dieu. « Les pélagiens réprouvent encore les prières que fait l’Église pour la conversion des pécheurs et des infidèles, et pour l’augmentation de la foi et la persévérance de ceux qui vivent dans la piété ; car ils soutiennent que l’homme tient de lui-même et non de Dieu ces biens, affirmant que la grâce qui nous délivre de l’impiété nous est donnée selon nos mérites. « Pelage, à la vérité, craignant d’être condamné par le concile de Palestine, réprouva cette doctrine et l’anathématisa, mais il n’en continua pas moins à l’enseigner dans des écrits postérieurs. « Ils vont même jusqu’à dire que la vie des justes, en ce monde, est exempte de tout péché, et que l’Église du Christ qui les renferme sur la terre est sans tache ni ride (Eph., v, 27), comme si ce n’était pas l’Église du Christ qui, de tous les points du monde, crie vers Dieu : « Pardonnez-nous nos offenses » (Matth., vi, 12). « Ils nient aussi que les petits enfants, nés d’Adam selon la chair, contractent la souillure de la tache originelle, car ils assurent qu’à leur naissance ils en sont tellement exempts qu’ils n’ont rien en eux qui ait besoin d’être effacé en renaissant de nouveau et qu’on ne les baptise qu’afin que, adoptés par la régénéra-