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    1. PEINES ECCLÉSIASTIQUES##


PEINES ECCLÉSIASTIQUES. LÉGITIMITÉ

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c) Les paroles de l’Apôtre ne furent pas de vaines menaces, car il usa elïectivement de la verge et n’épargna pas les coupables. Non content de juger (condamner), comme s’il était présent, l’incestueux de Corinthe, il le livre à Satan : trad.di hujusmodi Satanæ in interitum carnis, ut spiritus salvus sit. I Cor., v, 5. Le sens de ces mots est difficile à préciser ; on l’a compris parfois en ce sens que l’Apôtre menace le coupable de quelque affliction corporelle, dont Satan devrait se faire l’exécuteur, cela en punition du crime, et pour l’amendement et le salut du coupable. L’explication vaut ce qu’elle vaut. En tout cas, Paul inflige la même peine à deux apostats : Hyménée et Alexandre, quos trad.di Satanæ, ut discant non blasphemare. I Tim., i, 20. Saint Paul prononce, en outre, une sorte d’excommunication ( ?) contre un autre Alexandre, fondeur, qui avait osé résister à son autorité : quem et tu devita, valde enim restilit verbis nostris, II Tim., iv, 15 ; et il recommande à Tite de traiter de même tout hérétique, après l’avoir repris deux fois. Tit., iii, 10.

Après toutes ces citations, nul ne doutera que saint Paul ne se soit attribué et n’ait usé du pouvoir coercitif ; et ce pouvoir découle en droite ligne de l’autorité apostolique qu’il tient de Notre-Seigneur lui-même, secundum potestatem quam Dominus dédit inihi. II Cor., xiii, 10.

On a parfois allégué, en faveur du pouvoir coercitif de l’Église, certains faits tirés des Actes des apôtres, par exemple : la mort tragique d’Ananie et de Saphire, vi. 1-11, la cécité soudaine dont fut frappé Élymas, le magicien, xiii, 11 ; on a même essayé de tirer du premier événement un argument en faveur d’un prétendu droit qu’aurait l’Église de prononcer la peine de mort. Il semble plus juste d’y voir seulement un châtiment infligé directement par Dieu, plutôt que par l’autorité de l’Église ; car Pierre ne prononce pas proprement de sentence contre Ananie. il se contente de lui reprocher d’avoir menti à l’Esprit-Saint ; et c’est en entendant ces paroles qu’Ananie tombe frappé de mort. De même pour Saphire, Pierre ne fait que lui annoncer le châtiment imminent qui va fondre sur elle. Quant à la cécité d’Élymas, il faut y voir également une prophétie de Paul, dont la réalisation suivit immédiatement.

.’{. La tradition et la pratique de l’Église.— a) Durant les trois premiers siècles. — Dès l’origine, l’Église usa de son pouvoir coercitif en réprimant les hérésies, en appliquant des peines. Parmi ces dernières, la plus grave de toute, comme encore aujourd’hui, est l’excommunication. Tertullien l’appelle aussi censura divina… Exhortationes, castigationes et censura divina (est)… si quis ila deliquertt ut a communicatione orationis et convenluset omnis sancti commerça relegetur. Apol., xxxix. Au n n siècle, le pape Ilygin sévit contre les gnostiques Valentin et Cerdon, au dire d’Irénée, Conf. lucres., iii, iv, 2 ; cf. I, x.xvii. I. — Au IIP siècle, le pape Victor condamne d’autres hérétiques, tels que Théodotc, Artémon, etc. Il suffit de lire l’histoire de ces premiers siècles pour se rendre compte des nombreux hérétiqoei que l’Église rejeta de son sein, comme Marcion, Montan, Novat, Novatien.

Contre les clercs indignes, il y avait la suspense pour les fautes moindres, la déposition pour lis fautes plus

es et scandaleuses, qui laissaient peu « l’espoir d’amendement Origène, quoi qu’il en soit de sa eulpa bilité, fut destitué de sa charge et déposé du sacerdoce) au s mule d’Alexandrie de 231, par son évêque l tétai

Irius ; de mëine, l’aul île Samosate fut déposé de son

Siège d’AntiOChe, par Un concile tenu dans cette ville.

A ces diverses peines, faut il ajouter les pénitence »

publiques, qui revétalent un véritable i arai 1ère pénal) attendu qu’elles avaient pour but. non seulement

l’amendement du coupable, mais aussi la punition de la faute et l’exemple donné aux autres ? C’est là une question difficile dont ce n’est pas le lieu de parler ici.

b) Du ive au XIIe siècle. — La paix ayant été rendue à l’Église, celle-ci développe ses institutions juridiques. Les canons édictés par les nombreux conciles, qui se tiennent un peu partout à cette époque, déterminent les grandes lignes du système pénal ecclésiastique.

L’excommunication se double de l’anathème (voir ce mot), nom de l’Ancien Testament, qui obtiendra un grand succès dans le droit postérieur. Il est usité au concile de Nicée (325), à la fin du Symbole : Eos qui dicunt… hos anathematizat catholica Ecclesia. Denz., n. 54.

A l’excommunication viennent s’ajouter d’autres peines moindres, telles que l’exclusion de la table eucharistique. L’interdit a des origines plus obscures ; il est assez difficile, à cette époque, de le discerner de l’excommunication ou de la pénitence. L’interdit local semble être connu dès la fin du vie siècle. Mais c’est seulement vers la fin du xe siècle qu’il devint d’un usage plus fréquent. Voir Interdit.

Les conciles édictent des règles sur les cas de déposition des clercs ; ainsi le canon 51 du concile d’Elvire (300-306), le 13e canon d’Arles (314), le canon 17 de Nicée (325), qui passa dans le Décret de Gratien, dist. XLVII, can. 1. Le concile de Chalcédoine (451) prive de leur dignité les évêques ou clercs simoniaques, can. 2.

En même temps se précise, dans le droit, l’usage de la suspense : IIP concile d’Orléans (538), can. 2 et 6 ; concile de Narbonne (589), can. 6 et 7.

L’infamie de fait, déjà connue aux premiers siècles, puisqu’elle était un obstacle à la réception des ordres, passa facilement dans le droit ecclésiastique, sous l’influence du droit romain. On commença par admettre au for de l’Église les cas d’infamie sanctionnés par la loi civile. A partir du vu siècle, l’infamie est inscrite au nombre des peines proprement canoniques, sanctionnant des délits purement ecclésiastiques.

L’introduction progressive des coutumes germaniques dans le droit de l’Église fit que, à partir des ve et vi° siècles, les peines temporelles obtinrent une place plus grande dans son système coercitif. La fustigation était connue dès l’époque patristique ; saint Augustin note que les évêques l’employaient en Afrique : E/>ist., cxxxiii, au tribun Marccllin : Virgarum verberibus, qui modus exercitationis et a magistris libcralium arlium et ab ipsis parentibus et sœpe etiam in judiciis ab episcopis solcl adkibcri. — Voici de même la réponse de Grégoire le Grand à Augustin de Cantorbéry qui l’avait consulté sur les peines à inlliger aux voleurs sacrilèges : Quidam damais, quidam verberibus, et quidam dislridius. quidam vrro levius corrigantur. Epist., XI, lxiv, 4, Les clercs et les moines ne sont pas à l’abri de cette peine : Clericum aut monachum sine commendatiliis vagum, si verborum increpalionc non emendetur. etiam verberibus staluimus CŒrcerl. Concile d’Agde (506), can. 3<S.

I.’emprisonnement, la relégation ou la réclusion dans un monastère furent en usage au plus tard dés le vr siècle ; témoin, la lettre du pape Silice S lliméiius.

Epist., i, dans laquelle le pontife ordonne d’enfermer

les moines ou moniales qui auraient viole lachasteté. Parmi les autres peines temporelles assez anciennes.

il faut relever : les amende » pécuniaires, déjà en usage

en Espagne au

e siècle. 2’canon du I concile

de Tolède (693). l’ans la suite, elles prirent mie grande

extension, au point de devenir un abus, contre lequel

protestent les papes ci le concile de Trente i a confis-