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PEINES ECCLÉSIASTIQUES. LÉGITIMITÉ


légitime, pour la correction du coupable et la punition du délit. » Can. 2215.

1. Nature.

De cet énoncé, il semble ressortir que le législateur ecclésiastique ait voulu exclure désormais, de son droit, les peines corporelles proprement dites. Mais, en limitant l’extension de la pénalité, le nouveau Code n’en a pas changé la nature ; la peine reste une privation, donc essentiellement un mal. Elle n’est donc pas directement, ainsi que certains l’ont prétendu, un bienfait ménagé en faveur du coupable afin qu’il s’amende, ni même, avant tout, une garantie prise par la société pour prévenir de nouveaux méfaits. De par sa nature, la peine est, en soi, un mal infligé à cause d’un autre mal, en l’espèce l’acte délictueux fmalum passionis ob malum aetionis). Mais comme le mal ne peut être voulu pour lui-même, il doit être légitimé par une fin juste et honnête.

La fin première et intrinsèque de toute peine est la restauration de l’ordre social lésé. Donc, de par sa nature et sa raison d’être, la peine revêt un caractère vindicatif : avant tout, elle est expiatoire. Mais le législateur peut aussi se proposer d’autres fins extrinsèques, et accommoder son système pénal aux exigences de ces fins. Ainsi, la peine peut avoir pour buts : la correction du délinquant, une crainte salutaire inspirée aux autres, une satisfaction donnée à l’opinion publique ou ta défense de la société. Parmi ces diverses fins, dépendantes de la volonté du législateur, celui-ci peut en rechercher une de préférence et la faire prévaloir, dans le droit pénal, parce qu’elle sera plus en rapport avec le caractère propre et le but de la société. Or, dans l’Église, il semble bien que ta Un médicinale, ou amendement du coupable, doive obtenir une place de choix, car l’Esprit-Saint qui l’anime « ne veut pas la mort du pécheur, mais plutôt qu’il se convertisse et qu’il vive >. Ez., xxxrn, 11. (l’est pourquoi, sans faire abstraction du caractère vindicatif de la peine. l’Église attribue une importance spéciale à la correction du coupable, en raison même de sa mission, qui est de procurer à chacun de ses fils la conversion et le salut.

C’est dire que la législation ecclésiastique adopte un système pénal mixte qui s’efforce de ménager et d’unir le bien de la société avec celui de l’individu. Cette double tendance apparaît dans la définition même de la peine, qui vise, dit le Code, à l’amendement du coupable aussi bien qu’à la punition du délit.

2. Division. De la provient la division des peines ecclésiastiques en peines médicinale » (ou censures) et peines vindicatives, can. 2216, selon que le législateur met l’accent sur la recherche d’un but, de préférence a l’autre : il est à noter pourtant que les peines médicinales elles mêmes ne perdent jamais tout caractère vindicatif et servent toujours le bien commun : cela est si vrai que, dans le i.urpus juris, elles reçurent parfois le nom de vindicte, (irai., caus. XII, q. il. c. 22 ; et caus. XXIII, q. IV, c. 51. Le système pénal actuel est complété par les remèdes pénaux, qui ont plutôt un caractère préventil que curatif ou vindicatif, et les pénitences, qui sont dans le genre sal isfac luire, (.es uns et les autres s’écartent quelque peu de la stricte ludion de pénalité. Quant aux pénitences, il s’agit Ici de pénitences canoniques, c’est adiré relevant aussi bien du supérieur du for externe, que du confesseur au for interne : elles ne sont donc pas nécessairement sarrament elles.

Mien que l’Eglise ne mentionne plus, dans son droit

actuel, aucune peine qui s’exerce par contrainte orporelle, elle a maintenu cert aines peines temporelles, telles que : privation des revenus d’un bénéfice,

amendes pécuniaires ; mais ce sont surtout les peines

spirituelles qui ont ses préférences, parce que mieux en rapport avec sa fin.

Une peine est dite déterminée, lorsqu’elle est précisée dans le droit, de telle sorte qu’on ne puisse la remplacer par d’autres ; elle est indéterminée, lorsqu’elle est laissée au libre jugement du supérieur, tant pour le choix que pour l’opportunité. Can. 2217.

Une division importante des peines est celle qui les distingue en latw ou ferendee sententiee. Elles sont lalee sententiie. quand elles sont encourues immédiatement, et par le fait même que le délit est commis, can. 2217, § 1, 2 : on les reconnaît aux expressions latee sententiie, ipso facto, ipso jure, ou autres semblables ; par exemple : sciât se esse suspensum, maneal excommunient us. inlerdicimus, etc., contenues dans l’énoncé de la loi pénale. A noter que ce genre de peines ne se trouve que dans le droit ecclésiastique, lequel saisit l’homme tout entier, non seulement au for externe, mais aussi au for de la conscience. Les peines sont ferendee sententise, lorsque le juge ou le supérieur est obligé de les infliger pour qu’elles existent. Elles sont, en un sens, moins dangereuses que les autres, car elles ne saisissent le coupable qu’après la sentence, mais, d’autre part, leur remise est plus difficile. Néanmoins, parce que, à tout prendre, elles restent moins odieuses, le législateur a posé en principe qu’une peine est toujours ferendee sententise, à moins que les termes du droit n’indiquent expressément qu’elle est lulee sententiee. Can. 2217, § 2.

Une dernière division des peines mérite d’être signalée, c’est celle qui les distingue en peines a jure ou ab homine. Une peine est dite a jure lorsqu’elle est déterminée dans la loi elle-même, peu importe que ce soit comme ferendee ou comme lalir sententiee. Si. au contraire, elle est infligée par mode de précepte particulier, ou par sentence condamnatoirc. alors même que la peine serait déterminée flans la loi. elle est dite ub homine. D’où il suit qu’une peine ferender sententiee, déterminée par une loi, est seulement a jure jusqu’à ce qu’intervienne la sentence condamnatoirc : après cette sentence, elle est à la fois a jure et ab homine, mais elle est considérée comme ab homine. avec les elïets qui s’ensuivent. Can. 2217. Quant aux peines laite sententia, elles seront toujours considérées comme a jure, sauf le cas où elles seraient annexées à un précepte particulier. L’importance de cette division des peines apparaîtra, lorsqu’il sera question de leur rémission.

II. LÉGITIMITÉ. Le POUVOIR c.ŒKC.ITIF DE i.’Kci.isk : DOCTRINE et HISTOIRE. En punissant de justes peines les transgresseurs de. ses lois. l’Église ne fait qu’user de son pouvoir eoe.rcitif, lequel appartient de droit naturel à toute société parfaite, qu’elle soit religieuse ou civile. Ce droit, l’Église le revendique hautement et de façon très explicite, comme une attribution native, propre et indépendante de tout

pouvoir humain : Xativum et proprium lùclesiie jus est, (ndependens a quolibet humana auctoritale, coercendi delinquentes sibi subditos pœnis lum spirituatibus, lum rliiim tempomlibas, dit le canon 2214.

Ce pouvoir découle de la constitution même de l’Église ; elle ne l’a pas acquis, il ne lui a pas non plus été dévolu par quelque autorité séculière : elle l’a de par sa naissance, et elle l’exerce de façon autonome. sans sujet ion d’aucune sorte.

vrai dire, ce pouvoir coercitif n’est lui même qu’une partie de la puissance dite executive, laquelle englobe dans sa notion le pouvoir de gouvernement, d’administration et, enlin, de coaction.

I de ce dernier Uniquement qu’il sera qm s tion Ici, a propos des peine*. Il faut noter toutefois que l’expression pouvoir coætif <>u eoercilif a fréquemment, rlans le langage du droit, aussi bien que