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    1. PÉCHÉ ORIGINEL##


PÉCHÉ ORIGINEL. L’AUGUSTINISMIî DU XVIie SIÈCLI- ;

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faut mettre les insinuai ions persévérantes de Nicole, le calvinisme latent d’Arnauld n’est jamais arrivé à s’épanouir. » II. Bremond. op. cit., t. iv, La conquête mystique, l’école de PortRoyal, p. 149.

La doctrine de Nicole sur le péché origine] insiste sans doute sur la misère de l’homme, sur le peu que nous valons dans notre esprit et plus encore dans notre cœur. Mais son augustinisme est modéré et se rapproche de celui de saint Thomas. Voir H. Bremond, op. cit., p. 418-471, et É. Thouverez, Pierre Nicole, Paris, 1930, dans les Moralistes chrétiens.

II n’est point nécessaire de redire ici jusqu’à quel point l’apologétique de Pascal s’inspire de l’augustinisme pour expliquer les misères de l’homme déchu et son inquiétude religieuse. Voir art. Pascal.

Bossuet.

C’est sans doute encore un augustinisme

commun qui explique les secrètes affinités qui, salva fide, rapprochaient l’évêque de IMeaux des hommes de Port-Royal en dogmatique et en morale. Sur la plupart des points qui se discutaient librement dans l’Église, il est avec eux. Voir art. Bossuet, col. 1078.

Sa pensée sur le péché originel a l’occasion de s’affirmer dans son ouvrage de polémique contre Richard Simon : Défense de la tradition et des saints Pères, éd. Lâchât, t. iv, Paris, 1802, et aussi dans son Traité de la concupiscence.

Dans le premier ouvrage, il se fait surtout le champion de l’immutabilité absolue du dogme catholique ; il le fait en ce qui concerne le péché originel sans assez distinguer le fond substantiel du dogme et les opinions d’école, en surestimant l’autorité de saint Augustin, en qui il ne distingue point le témoin de la tradition qu’il faut suivre et le théologien initiateur dont il faut parfois corriger ou compléter les aperçus, sans avoir enfin suffisamment la notion de ce développement doctrinal que Newman nous a rendue familière.

Les remarques de portée générale qui sont faites à l’art. Bossuet, col. 1062, valent tout particulièrement en ce qui concerne les démêlés de Bossuet avec Richard Simon au sujet du péché originel : « L’évêque et l’oratorien n’étaient guère faits pour s’entendre. Disciple enthousiaste de cette tradition catholique qu’il expose avec une éloquence sans égale, mais avec laquelle il confond parfois des opinions d’école, Bossuet s’indigne des assertions hardies, des sous-entendus équivoques, de toutes les irrévérences d’un critique qui croit relever par le sarcasme son incontestable érudition. De là, chez l’évêque, des sévérités qui se sont à peine quelquefois adoucies. Il ne méconnaissait point le mérite de Simon… Cependant, il n’appréciait point ce mérite à sa juste mesure. Il ne savait pas assez, lui, le maître, qu’il se trouvait en présence d’un autre maître, moins grand sans doute, et moins sûr, » mais d’un maître en critique quand même. En face du critique qui voyait surtout les divergences et les originalités des écoles et des individus, Bossuet tendait, au contraire, à faire ressortir uniquement l’homogénéité du témoignage traditionnel en le ramenant particulièrement à celui de saint Augustin. Voir Défense, IIe part., 1. VIII : Méthode pour établir l’uniformité dans tous les Pères et preuve que saint Augustin n’a rien de singulier sur le péché originel, p. 281-320.

On comprend que, dans ces conditions, l’évêque de Meaux s’attache à l’interprétation augustinienne du péché originel et de ses suites. Il croit devoir maintenir, à la suite de saint Augustin, la traduction de ècp’co (Rom., v, 12) par in quo, et non par quatenus, sous prétexte que le contraire serait mépriser ouvertement l’autorité des conciles. L. VII, c. xii-xv, p. 264-268.

Le péché originel se trouve, dit-il, en relation très intime avec la concupiscence : « Ce désordre n’est pas seulement un des effets de notre péché, mais il en fait

partie puisqu’il en est le fond et le sujet. Nous naissons dans ce désordre parce que c’est par ce désordre que nous naissons et qu’il est inséparable du principe de notre naissance. C’est donc là ce qui fait en nous la propagation du péché et la rend aussi naturelle que la vie. » L. IX, c. xi. « C’est une doctrine commune et très véritable de l’École que la concupiscence est le matériel du péché de notre origine. Pour le formel, quelques-uns le mettent en ce que ce dérèglement radical est un véritable péché, tant qu’il domine et qu’il y faut la grâce habituelle et sanctifiante pour l’empêcher de dominer… Cette doctrine, quoique spécieuse, est insoutenable dans le fond, puisque, si le formel du péché était le règne de la convoitise, toutes les fois que l’on perd la grâce et que ce règne revient, le péché originel reviendrait aussi, ce qui est contre la foi… Il faut donc dire que la malice, et comme parle l’École, le formel de ce péché c’est d’avoir été en Adam, lorsqu’il péchait et la rémission de ce péché, c’est d’être transféré en Jésus-Christ comme juste et comme auteur de toute justice. Qu’est-ce qu’ « avoir été en Adam ? » Notre être, notre vie notre volonté avait été dans la sienne ; voilà notre crime. Dieu, qui l’avait fait notre principe, avait tout mis en lui, pour lui et pour nous, et non seulement la vie éternelle, mais celle de la grâce, c’est-à-dire la sainteté et la justice originelle. » Ibid, c.xii, xiii.

Où l’on voit que Bossuet se garde bien d’identifier complètement la concupiscence comme telle avec le péché originel, puisque, pour lui, le formel de ce péché consiste en une relation morale de celle-ci avec l’acte même d’Adam. Comme saint Augustin, Bossuet fonde notre culpabilité sur une participation mystérieuse à l’acte même d’Adam de fait que nous ne formons en lui que unus homo.

Dans un chapitre précédent, t. VIII, c. xxvii, i| avait invoqué la doctrine du concile de Trente en faveur de son sentiment sur le caractère de culpabilité de la concupiscence dans les infidèles, « tant à cause qu’elle domine dans les âmes où la grâce n’est pas encore et qu’elle y met un désordre radical, qu’à cause qu’elle est le sujet où s’attache la faute d’Adam et le péché d’origine ». Selon l’esprit de son école, et de ses autres contemporains, Bossuet devait chercher à voir dans la nature déchue plutôt les ruines faites par le péché que les ressources qu’elle garde encore. Voir art. Bossuet, col. 1085.

Il condamne ceux qui, « en avouant ce péché (originel ) n’en voulaient pas voir toutes les suites, dont l’une est le droit qu’il donne à Dieu de damner et les grands et les petits et de faire miséricorde à qui il lui plaît ». L. IX, p. 355. On sait, du reste, qu’il entend la damnation non seulement au sens de privation de la vision béatifique, ce qui serait juste, mais au sens de condamnation à la géhenne.

Bossuet ne peut entendre parler de l’opinion des scolastiques qui reconnaît aux enfants morts sans baptême un bonheur naturel : « Le péché originel ne leur attire, selon Hilaire et selon M. Simon, que la mort du corps, « la seconde mort, ni la peine que l’on « souffre dans les enfers » ne sont pour eux. Ce grand critique ignore la définition des deux conciles œcuméniques, du concile de Lyon sous Grégoire X, et de celui de Florence sous Eugène IV, où les deux Églises réunies décident, comme de foi, « que l’âme de ceux « qui meurent ou dans le péché mortel actuel, ou dans « le seul originel, descend incontinent dans l’enfer, « ad infernum, pour y être toutefois punie par des « peines inégales », d’où le cardinal Bellarmin et, après lui, tout nouvellement, le P. Petau concluent la damnation éternelle des uns et des autres sans qu’il soit permis d’en douter. Les voilà donc dans l’enfer, dans la psine, dans la punition, dans la damnation, « dans