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    1. PÉCHÉ ORIGINEL##


PÉCHÉ ORIGINEL. LA THEOLOGIE DES JESUITES

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ii

Jansénius, de Quesnel et du synode de Pistoie.

I. l’optimisme modéré. — C’est celui de la théoloie des jésuites (Bellarmin, Lessius, Suarez, Molina,

ipalda) et de l’humanisme dévot (saint François de Sales).

La théologie des jésuites.

Les théologiens traditionnels

ne pouvaient demeurer indifférents en face de l’erreur baïaniste et des efforts que ses tenants faisaient pour méconnaître ou minimiser les actes du magistère ecclésiastique. Grégoire XIII, dans la bulle Provisionis nostræ, 29 janvier 1579, devait d’ailleurs confirmer la condamnation précédemment portée.

Dis 1570, Bellarmin avait entrepris, à Louvain, la réfutation des opinions condamnées, sans toutefois nommer Baïus, mais à l’occasion d’autres erreurs anciennes et nouvelles. Il utilisera de nouveau largement les leçons de Louvain dans ses Controverses. Voir, pour la réfutation de Louvain, F.-X. LeBachelet, Auctarium Bellarminianum, Paris, 1913, p. 201, 323-325, 328-334, 334-337. Cf. Controverses dans Bellarmini opéra omnia, éd. Vives, t. v, 1873 : De gratia primi hominis, p. 169-207 ; De amissione gratiw, p. 248484. — Suarez, d’autre part, de 1580 à 1609, enseignait une doctrine semblable, soit dans son traité De vitiis et peccatis, et son De gratia, soit dans ses leçons à Rome, a Alcala et à Coïmbre. — Lessius, élève de Bellarmin et de Suarez, devait, lui aussi, dès le début de son enseignement, vers 1586, prendre position contre Baïus ; l’on trouvera ses idées sur le péché originel et ses suites dans son ouvrage : De per/eclionibus moribusque divinis, c. xiii. — En 1 588, paraissait la fameuse Concordia de Molina où l’on retrouve, sur la nature du péché originel et de ses suites, la doctrine reçue, depuis longtemps, dans l’École. Voir Molinisme, col. 21032104. —Enfin, Martincz de Bipalda († 1648) donnait, en appendice à son grand ouvrage De ente supernaturali, son Adversus Baïum et baïanos où il défendait la notion classique du surnaturel et de l’état de nature déchue.

Sans vouloir exposer la théologie de chacun de ces uteurs, il suffira de dégager ici leurs positions noyennes en ce qui concerne la notion du péché originel et de ses suites.

1. Caractère surnaturel de l’état primitif. - Ils sont préoccupés d’abord de bien marquer, en face des réformateurs et des baïanistes, la position catholique sur l’état du premier homme avant son péché. Voir.1. de la Servière, La théologie de Bellarmin, 1909, c. xiii, p. 511-523. Tous soutiennent équivalemment les thèses suivantes du grand controversiste : « L’homme ne fut pas créé tel qu’il naît maintenant, porté au mal, faible, ignorant ; mais droit, juste, sage, sans la concupiscence et sans ces difficultés que nous éprouvons continuellement en nous-mêmes. Dr gratin primi hominis, t. I, c. n. Opéra, t. v, p. 171. « Il ne recul pas, [ors de sa création, n’importe quelle rectitude d’âme, mais la grâce sanctifiante elle-même, qui le rendait agréable a Dieu. C. m. p. 173.

Cette rectitude était un don surnaturel en ce sens qu’elle n’est ni une partie de la nature humaine, ni une conséquence de cette nature, si bien qu’en la perdant l’homme n’a rien perdu de ses Facultés naturelles. C. v. p. 178. En cflet. notre nature, de même qne celle

do démons, quand on la compare a l’étal dans lequel

elle aurait pu êl re si elle avait été créée sans aucun don surnaturel, doit être dite intacte… Quand on la compare a l’état ::uquel la bonté du en a leur l’avait él

elle doit être dite blessée et corrompue. C. i, p. 1x2.

Mais, remarquent les adversaires, la béatitude éter

n’Ile est la fin naturelle de l’homme. Sans vouloir dis au fond la question, Bellarmin, en partant de hypothèse, raisonne ainsi : On peut répondre

qu’elle (la béatitude) l’est (la fin nal u relie de l’homme)

en tant que souhaitée, non en tant qu’obtenue ; il n’est pas indigne de la nature humaine d’avoir une tendance naturelle vers un bien qu’elle ne pourra obtenir qu’au moyen d’un secours surnaturel… Au contraire, il est très honorable pour notre nature qu’elle ait été créée pour une tin si sublime que ses seules forces ne puissent l’atteindre. Sans doute, il aurait été absolument équitable que Dieu, ayant ordonné l’homme à une fin si sublime, lui donnât les moyens d’y parvenir ; cependant, s’il les lui eût refusés, ce refus n’aurait rien eu d’absurde. En effet, en admettant que la béatitude suprême soit la fin naturelle de l’homme, elle est cependant une fin non proportionnée, et l’homme en a une autre proportionnée à sa nature qui est de chercher la vérité par le raisonnement. Dieu donc aurait pu conduire l’homme par ses moyens naturels à une fin proportionnée à sa nature et ne pas l’élever plus haut. » C. vii, p. 191.

Sans vouloir discuter à fond la question de savoir si la béatitude éternelle est la fin naturelle ou surnaturelle de l’homme, « question qui n’est pas petite », remarque-t-il, Bellarmin maintient avec l’École, contre Baïus, la possibilité de l’état de nature pure.

2. Extension universelle du péché originel.

Nos auteurs rappellent la doctrine commune de l’Église sur l’existence du péché originel, son extension à tous les enfants d’Adam, sans exempter, comme le veulent Zwingle et Calvin, les enfants des fidèles ; voir Bellarmin, De amissione gratise, t. IV, c. xiv, Opéra, t. v, p. 371. Ils reconnaissent l’exception unique qu’il faut faire en faveur de Marie immaculée.

3. Nature du péché originel.

Bellarmin se préoccupe non seulement d’écarter les notions erronées sur la nature du péché originel, mais s’efforce d’en donner une définition précise. J. de la Servière, op. cit., p. 553-562.

Le péché originel ne peut être, comme le prétend Flaccius Illyricus, la substance même de l’âme, totalement pervertie à la suite de la faute d’Adam, et l’image de Dieu devenue image du diable. De amissione gratiw, t. V, c. 1, p. 387.

Il ne peut être non plus, comme le veulent les réformateurs, la concupiscence. Contre eux, il faut tenir que la corruption de la nature ou la concupiscence, qui reste, même après le baptême dans les fidèles régénérés, n’est pas le péché originel, non seulement parce qu’elle n’est pas imputée, mais parce qu’elle ne saurait l’être, n’ayant rien de la nature du péché, lbid., c. vii, ]). 405.

Comme les réformateurs se couvrent de l’autorité d’Augustin, Bellarmin en appelle aux textes où l’évêque d’Hipponc aiïirme fortement que « la concupiscence est une infirmité et non un péché, sinon au sens métaphorique ». lbid., c. VIII, p. 414. Il s’agissait, il est vrai, dans ces textes, de la concupiscence après le baptême ; restaient les textes où saint Augustin déclare que la concupiscence chez les non baptisés est alTcctée d’une culpabilité qu’elle tient de sa relation morale avec la faute du chef de la famille humaine. Bellarmin s’efforce de les expliquer en établissant différents sens de ces mots rc(dus concupiscentiw. C. xiii. p. 130.

Après la réfutation des doctrines hérétiques, liellai min repousse deux opinions soutenues par les catho liques > sou époque, et qu’il estime inconciliables avec les décrets du concile. La première, jadis proposée par Pierre Lombard. Henri de Gand, Gré goire « le lïimini. reprise par Driedo <i 1535), voyait

dans la concupiscence une qualité morbide, ajoutée a

l’âme ei l’identifiait formellement avec le péché originel. Comment affirmer avec cela que la culpabilité originelle disparaît au baptên v, p. 11° 143

elle de Pighius et de ("alharin. pour