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PÉCHÉ ORIGINEL. LE CONCILE DE TRENTE


Ce sont ces cireurs des réformateurs que le concile a étudiées minutieusement et dont il a dressé le tableau. Elles renouvellent l’antique erreur pélagienne et y ajoutent des exagérations touchant les effets du péché origine] dans le baptisé.

L’objet précis en est le péché originel et son remède. Le but poursuivi ci’n’est point — les Pères l’ont répété souvent au cours des discussions — de décider les questions libres, abandonnées aux controverses de l’École, c’est, comme le proclame le prologue, de redresser les erreurs, de confirmer les hésitants, en rappelant la foi catholique, en s’appuyant pour cela sur les organes et interprètes authentiques de la révélation : les Écritures, les Pères, les conciles approuvés, le jugement et le consentement de l’Église elle-même qui s’exprime en un concile œcuménique, réuni dans l’Esprit-Saint, sous la direction du pape, présent par ses légats. C’est dans ce but que le concile a défini les points qui suivent :

2. Chapitre i.

Le péché originel et ses suites personnelles dans Adam.

Si quis non confitetur, Si quelqu’un refuse de re primum hominem Adam, connaître qu’Adam le pre cum mandatum Dei in paramier homme, ayant trans diso fuisset transgressus, stagressé, dans le paradis, le

tim sanctitatem et justitiam, commandement divin, per in qua constitutus fuerat, dit aussitôt la sainteté et la

amisisse incurisseque per justice dans laquelle il avait

ofïensam prsevaricationis hu- été établi, et encourut, par

jusmodi iram et indignatiol’offense de cette prévarica nem Dei atque ideo mortem, tion, la colère et l’indigna quam antea illi comminatus tion de Dieu et, par suite, la

fuerat Deus, et cum morte mort dont Dieu l’avait au captivitatem sub ejus potesparavant menacé, et avec

tate, qui mortis deinde elle la servitude sous le pou habuit imperium (Hebr., ii, voir de celui qui, dès lors,

14), hocestdiaboli, totumque eut l’empire de la mort,

Adam per illam prævaricac’est-à-dire du démon, et

tionis offensam secundum que, par ce péché, Adam

corpus et animam in deterius tout entier, selon l’âme et

commutatum fuisse, A. S. selon le corps, fut changé en

un pire état, qu’il soit ana thème.

A la base de la doctrine du péché originel se trouve l’existence de la faute qui bouleversa les destinées de nos premiers parents et conséquemment celles de toute leur descendance : cette chute personnelle du premier homme est ici affirmée et décrite surtout par les effets qu’elle comporte pour le coupable : un état de détérioration qui l’affecte, corps et âme, dans tout son être.

Le concile de Trente en effet définit ici, contre les néopélagiens du moment, cette vérité traditionnelle qui était déjà impliquée dans les deux premiers canons d’Orange (voir art. Orange, col. 1093), à savoir : le bouleversement de la situation d’Adam et d’Eve par suite de leur prévarication coupable.

Il ne fait que rappeler le fait du précepte divin et de la désobéissance formelle d’Adam et aussi le caractère supérieur de l’état dans lequel il avait été établi : c’était un état « de justice et de sainteté ».

Selon la loi qu’il s’était faite de ne point dirimer les controverses d’école, mais de condamner les erreurs, le concile emploie le mot « établi » et non le mot « créé », pour éviter de définir ce qui faisait l’objet d’une discussion entre disciples de saint Bonaventure et disciples de saint Thomas. Les premiers pensaient qu’Adam, créé d’abord in nnturalibus, avait été ensuite élevé à la vie de la grâce ; les seconds croyaient que le premier homme avait été élevé à l’état surnaturel en même temps que créé.

C’est non moins sciemment que le concile consacre et maintient, après discussion, la distinction et l’emploi des deux mots « justice et sainteté » pour décrire l’état dans lequel Adam avait été établi, cela malgré quelques Pères qui eussent désiré un mot plus vague,

reclitudo, pour laisser indécise la question de savoir si le premier homme avait été établi dans l’état de grâce. Par le maintien du mot « sainteté », le concile fait entendre qu’Adam a revu la grâce sanctifiante et son cortège de dons a côté de la droiture de la justice originelle.

I.idécret énonce directement les suites personnelles de la prévarication d’Adam : elle entraîne pour lui la perte de l’état de justice et de sainteté dans kernel il a été établi, la colère et l’indignation de Dieu, la mort et l’esclavage du démon, bref un état de détérioration qui l’affecte dans tout son être.

Ce sont les effets attachés par la tradition commune à la faute d’Adam, avec quelques précisions cependant par rapport aux formules du concile d’Orange. Tandis que celui-ci parlait « d’intégrité dans laquelle la nature a été constituée », le concile de Trente, par un progrès dans l’analyse de l’état primitif, parle de sainteté et de justice ». Le concile d’Orange ajoutait à la formule totum, id est secundum corpus et animum, in deterius hominem commutatum, l’incise suivante serf animæ liberlate illœsa durante. Celle-ci avait un écho dans le décret primitif de Trente : nulla ttiam animæ parte illœsa durante. Notre décret officiel ne contient pas cette incise. C’est que, par l’introduction de celle-ci, les Pères craignaient de favoriser les exagérations touchant la corruption intégrale de la nature humaine et se réservaient de parler ailleurs de l’amoindrissement de la liberté consécutif à la faute originelle.

3. Chapitre n.

Le péché originel et ses suites générales dans la postérité d’Adam. — Le premier homme avait reçu de la libéralité divine les dons de la justice et de la sainteté originelle non comme un bien personnel, mais comme un apanage de nature qu’il devait conserver, qu’il pouvait perdre aussi, pour lui et toute sa race. En fait, par sa prévarication, il a entraîné ses descendants avec lui dans un état non seulement malheureux, mais fautif. Telle est la doctrine exprimée dans le 2e canon :

Si quis Adæ prsevaricatioSi quelqu’un soutient que

nem sibi soli et non ejus prola prévarication d’Adam ne

paginiasserit nocuisse, et acfut nuisible qu’à lui et non

ceptam a Deo sanctitatem et à sa postérité, qu’il a perdu

justitiam, quam perdidit, sipour lui seul, et non pas pour

! bi soli et non nobisetiameum nous aussi, la justice et la

perdidisse, aut inquinatum sainteté qu’il avait reçues,

ilfum per inobedientiæ pecou qu’étant souillé lui-mèine

catum mortem et pœnas corpar le péché de désobéissance

poris tantum in omne genus il n’a transmis au genre hu humanum transfudisse, non main que la mort et les au autem et peccatum quod très peines du corps, mais

mors est anima ;  : A. S., cum non le péché qui est la mort

contradicat Apostolo dicende l’âme ; qu’il soit anathème,

ti : Per unwn hominem peccacar il contredit l’Apôtre di lum intravit in mundum, el sant que le péché est entré

per peccatum mors, el ita in dans le monde par un seul

omnes homines mors pertrarthomme et la mort par le

sitl in quo omîtes peccaverunt péché et qu’ainsi la mort est

(Rom., v, 12). passée dans tous les hommes,

tous ayant péché dans un

seul.

Le concile de Trente reproduit à peu près littéralement le canon 2 du concile d’Orange. En cette assemblée on avait rappelé, contre toute tendancepélagienne, que le péché d’Adam a été préjudiciable non seulement à lui-même, mais à tous ses descendants : on avait précisé, contre Fauste de Riez, que le mal originel ne consiste pas seulement dans la transmission de la mort du corps qui est la peine du péché, mais aussi dans la transmission du péché qui est la mort de l’âme ; ici l’on est amené à reproduire la même doctrine traditionnelle contre le pélagianisme nouveau de Zwingle. Celui-ci ramenait les conséquences de la chute à n’être que la transmission d’un état misérable,